Ceux qui travaillent, drame d’Antoine Russbach

Ceux qui travaillent d’Antoine Russbach : un film qui met dans la balance le confort des nantis (acquis dans la souffrance à force de travail et d’abnégation) et l’inconfort de pauvres hères, loin d’être nantis et qui seront potentiellement sacrifiés pour que perdure le confort de ceux-là.

Matérialiste élevé à la dure et très peu empathique (si ce n’est avec Mathilde [Adèle Bochatay], la petite dernière de ses 5 enfants), Franck Blanchet (Olivier Gourmet) vit en Suisse. Son épouse, femme au foyer (Delphine Bibet), repasse les chemises en robe de chambre. C’est en Porsche Cayenne (équipée d’un moteur V8, qui permet de monter de 0 à 100 km/h en 3 secondes) que Franck roule pour aller au boulot. Sa maison, dans un quartier résidentiel, dispose d’une piscine. Tous ces signes extérieurs de richesse sont possibles grâce à son travail. Franck bosse dans le fret maritime. Son rôle est de s’assurer, depuis son bureau, que les porte-containers de sa compagnie partent et arrivent à bon port sans encombre. Il a tendance à travailler plus pour gagner plus et fait partie de la Suisse qui se lève très tôt, afin de garantir un niveau de vie matériel hautement confortable à sa famille.

Un jeune Libérien, embarqué clandestinement à bord du Cervantès et découvert par l’équipage en haute mer, va être le « grain de sable » qui va enrayer la belle carrière de Franck.

Ceux qui travaillent est une charge contre le capitalisme mondialisé, amoral et prédateur, qui fait si peu de cas de la vie humaine – surtout si celle-ci est libérienne et sans visa. Capitalisme marchand impitoyable qui permet aux hypermarchés d’être achalandés en tout, partout et tous les jours de l’année (kiwi, avocat du Chili, déodorants, baskets Puma…) et aux enfants gâtés, assez monstrueux de fait (si ce n’est Mathilde, la petite dernière), de la famille Blanchet de pouvoir se passer du vernis à ongles sur les doigts de pied en toute insouciance et de posséder chacun l’ultime smartphone à la mode.

Gourmet_cravates

Olivier Gourmet (ci-dessus dans un magasin de luxe où se fournissent les cols blancs) est magistral dans ce rôle de père de famille, cadre habitué à travailler d’arrache-pied et qu’une psychologue à l’idéologie douteuse (Pauline Schneider), lors d’un bilan de compétences, suspectera de ne rien savoir faire d’autre.

De quels bénéfices parlons-nous quand le facteur humain est relégué en énième position ? À quel prix peut-on vouloir préserver son (bon) niveau de vie ? Et si ce dernier est basé sur une absence manifeste de scrupules, de morale, est-il toujours si « bon » que ça, si enviable, si profitable ? Telles en sont en substance les questions fort intelligemment soulevées par Ceux qui travaillent.

Ceux qui travaillent – Drame helvético-belge d’Antoine Russbach – Avec Olivier Gourmet, Pauline Schneider, Adèle Bochatay  – Sorti le 25 septembre 2019 – Durée : 1 h 42.

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