Grave, ou bouffer la vie

Le premier long métrage de Julia Ducournau Grave, sorti le 15 mars, raconte l’initiation d’une jeune fille végétarienne aux appétits charnels – avec les dents.

 

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Justine (interprétée par Garance Marillier) est une adolescente surdouée qui rentre en école vétérinaire à seulement 16 ans. Toute sa famille étant véto et végétarienne, la jeune fille réservée et obéissante n’a jamais dérogé à ces règles, jusqu’au jour où dans le cadre d’une session de bizutage elle est forcée de manger un morceau de foie de lapin cru, que sa sœur aînée Alexia (Ella Rumpf) lui fourre dans la bouche. Cette ingestion provoquera la transformation de Justine, d’abord des plaques et des démangeaisons invasives puis une faim profonde, sans limites, pour la chair, et pas de blanc de dinde non, la chair humaine.

 

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Grave est un film très référencé mais qui a aussi son caractère bien à lui. Organiquement flippant comme le body horror cher à Cronenberg (que Julia Ducournau cite volontiers, notamment La Mouche), on pense aussi à deux films de réalisatrices françaises autour du cannibalisme, Dans Ma Peau de Marina De Van et Trouble Every Day de Claire Denis, entre réappropriation de son corps pour le premier et un certain geste d’amour pour l’autre. Justine (comme l’héroïne sadienne) a la dalle, elle a faim d’émancipation face à ses parents (« elle t’a bouffé Maman, hein? »), sa sœur (qui lui impose une séance d’épilation lourde de conséquences) et aux règles de l’école, faim des autres notamment de son coloc qu’elle bouffe des yeux jusqu’à en saigner du nez, faim d’elle-même et de cette nouvelle vie (la scène où elle danse devant son miroir, plus rock’n'roll que dans The Neon Demon de Refn).

 

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Néanmoins il ne faut pas s’arrêter aux aspects gore du film, et les personnes ne recherchant que ça seront déçues. La relation entre Justine et Alexia est le pilier central dans la construction de ce personnage frêle puis féroce, et le fil rouge (sang) de l’intrigue jusqu’au dénouement, prévisible mais bien amené. Quant aux références évidentes, ce n’est pas rare dans le cinéma de genre et ça n’enlève rien de la personnalité du film, qui joue de ces balises pour proposer une œuvre qui célèbre ce type de cinéma, le corps féminin, la relation intense entre deux sœurs et la rébellion contre les normes.

 

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Grave est visible au Gaumont esplanade Charles de Gaulle. Il est interdit aux moins de 16 ans.

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