Anatomie d’une chute, de Justine Triet

Anatomie d’une chute : un drame de Justine Triet sur les difficultés de la vie en altitude.

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Palme_d'or_LogoSandra est auteure, d’origine allemande, et vient de publier un énième roman (très convaincante Sandra Hüller). Samuel (Samuel Theis) est auteur, lui aussi, mais au creux de la vague – surtout depuis l’accident dont il se sent coupable et qui causa la cécité de leur fils Daniel (Milo Machado Graner), cependant devenu un pré-ado d’une vivacité d’esprit exemplaire. Après avoir quitté Londres, ils vivent désormais dans les Alpes françaises, au-dessus de Grenoble. Elle, s’ennuie. Lui, à la recherche d’une inspiration qui le fuit et d’un nouvel équilibre, bricole laborieusement sous les combles de leur chalet à trois étages. Leur couple semble avoir du plomb dans l’aile. Le jour où le corps sans vie de Samuel est retrouvé dans la neige, les soupçons de la police et de la justice se portent sur la femme qui partageait sa vie.

Tout l’enjeu d’Anatomie d’une chute sera de démêler le vrai dans les faux-semblants, le réel des préjugés, l’essentiel de l’anodin. Avec force habileté, intelligence et sensibilité*, Justine Triet (qui a amplement mérité sa Palme d’or et dont on ne saluera jamais assez le courage lors de la remise des prix, lorsqu’elle osa contester ouvertement le bien-fondé du projet de la réforme des retraites et dénoncer la violence avec laquelle celui-ci aura été imposé à l’ensemble d’une population largement opposée à ce rétrécissement programmé du précieux temps de loisir et de repos acquis lors de précédentes luttes sociales victorieuses), aborde donc des thèmes profonds et universels : le handicap d’un enfant ; les mauvaises passes au sein d’un couple ; la dépression ; la difficulté de créer et la circulation des idées (qui n’appartiennent à personne en vérité et sont des biens communs co-construits) ; la misogynie de la police, des médias, de la médecine et de la justice ; les dégâts collatéraux causés par l’idéal de réussite néolibéral, qui laisse tant de monde, toutes castes confondues, sur le carreau, le bec dans l’eau ; l’amour et l’amitié incarnée ici par Vincent (Swann Arlaud), un avocat sympathique… Bref, autant de bonnes raisons pour ne pas se priver d’aller y jeter un œil.

* On ne s’étonnera donc pas que l’intraitable Élisabeth Borne, vu le pedigree de la bougresse, ne soit aucunement attirée par cette œuvre pourtant remarquable.

Anatomie d’une chute, drame de Justine Triet, avec Sandra Hüller, Swann Arlaud, Antoine Reinartz, Samuel Theis, Milo Machado Graner… – Palme d’or du 76ᵉ festival de Cannes – 2023 – Durée : 2h32.

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