Skid / Thr(o)ugh : les vertiges de Damien Jalet

Jouées au TNB du 13 au 16 juin, les pièces Skin et Thr(o)ugh du chorégraphe et danseur franco-belge Damien Jalet sont pour la première fois rassemblées sur la même scène. Dansant sur le fil du danger, c’est tout un équilibre fragile qui se dégage de ces tableaux cathartiques.

Avant d’entrer plus avant dans les deux pièces, il convient de saluer le travail scénographique qui voit successivement se mettre en place tout d’abord un plan incliné à 34° au-dessus du sol, et ensuite un cylindre imposant qui tourne sur lui-même. Le genre de dispositif qui rappellera l’implication et la nécessité de techniciens aguerris dans les salles de spectacles, et un long temps d’installation. Un processus qu’on peut finalement ajouter à celui du rituel développé par le chorégraphe Damien Jalet qui s’inspire pour ses deux créations d’Onbashira au Japon (il s’agit de chevaucher un tronc d’une tonne qui dévale d’une montagne).

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Avec Skid, dix-sept artistes du ballet du grand théâtre de Genève se meuvent sur le plan incliné. Un plan blanc où les corps deviennent graphiques, créant des lignes qui se croisent, des lignes en mouvement. Une toile de peintre dont les corps seraient les pinceaux et les ombres, un dessin plus ou moins aléatoire en fonction de la lumière et de la chute. Skid (dérapage) est une chute virtuose, de corps, successifs, lents, solitaires, sans résistance, puis qui finissent par se toucher. Par vouloir affronter cette pente à gravir. Une sorte de mythe de Sisyphe, pour recommencer, tenter à plusieurs, les mains jointes, avec parfois quelques tentatives de portés. Et enfin, une sorte d’éclosion, toute en fragilité, où le corps nu se découpe, solitaire, pour une ultime (ou une première ?) ascension. Une pièce sur la musique électro-acoustique de Christian Fennesz, remix de symphonies du compositeur Gustav Mahlerqui, qui joue les tensions et l’affrontement du danger. Le danger c’est aussi celui des balles dans Thr(o)ugh qui évoque l’attentat de 2015 en plein Paris auquel le chorégraphe a échappé. Les danseurs et danseuses, aux vêtements en partie calcinés, effectuent des mouvements de nouveau collectifs ou solo, autour du tube qui tourne puis finit par rouler, comme pour écraser les corps. Il y a une forme de rondeur qui occupe étrangement les deux pièces, malgré toutes les difficultés, la pesanteur des corps, leurs tentatives d’échappées. Une représentation de l’impact, la collision, en confrontation avec l’envol, l’éphémère ; où comment replacer tout le vertige de la danse face à celui de la vie.

 

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