Jojo Rabbit, du Néo-Zélandais Taika Waititi

Cent mille fois plus efficace, pour abattre l’hydre de l’intolérance et de la haine à l’égard d’une communauté, que la proposition Maillard du groupe LREM qui a été votée par l’Assemblée nationale le 3 décembre 2019 (par 154 voix contre 72 et 43 abstentions) qui, pour lutter contre l’antisémitisme (qui est un délit), vise à assimiler l’antisionisme (qui est une opinion politique) à de l’antisémitisme : Jojo Rabbit, du Néo-Zélandais Taika Waititi.

 

533x800_Jojo-RabbitImaginez un mix entre La vie est belle (1997) de l’Italien Roberto Benigni (qui sut aborder un thème plombant comme la Shoah avec humour et tendresse), Le Tambour (1979) de l’Allemand Volker Schlöndorff (qui porta un regard sans complaisance sur l’Allemagne nazie), saupoudré de n’importe quel opus des Britanniques du Monthy Python (pour l’humour à toute épreuve) et d’une larmichette d’It’s a Wonderful Life  (1947) de l’Américain Frank Capra (qui profita des possibilités, assez infinies, du cinéma pour mettre en scène un ange-gardien de seconde classe, lequel ne sera pas sans rappeler l’ami imaginaire de Jojo Betzler, surnommé « Rabbit » par ses petits camarades mal intentionnés des jeunesses hitlériennes), voire d’une once du Dictateur (1945) de l’Anglais Charlie Chaplin (pour la caricature absolument géniale d’Adolf Hitler). Et vous commencerez à avoir une petite idée de ce Jojo Rabbit. Sous pareil patronage, en tout cas, on est en excellente compagnie.

À travers le personnage de Jojo (Roman Griffin Davis), nazi de 10 ans convaincu de la supériorité de la race aryenne, de la malfaisance des juifs et du noble combat à mener selon les directives du Führer bien-aimé, il s’agit, notamment via une abondance de procédés comiques, de ridiculiser l’hitlérisme et le fanatisme (exercice qui demande une finesse d’esprit redoutable dont le réalisateur et acteur d’origine maorie Taika Waititi est richement pourvu). On passe donc un moment formidable avec ce nazillon blond qui est contraint de réévaluer les valeurs qui l’ont forgé lorsque, fortuitement, il découvre les actes de résistance de sa mère (Scarlett Johansson) qui héberge dans les combles de leur maison Elsa, une orpheline juive (Thomasin McKenzie).

La naissance d’une conscience émancipée des bourrages de crâne, autrement dit d’un esprit critique, chez un enfant qui s’est construit en se fondant dans le moule d’une doctrine totalitaire, est ainsi l’occasion, pour le spectateur qui se délecte de cette histoire si intelligemment troussée, de s’armer intellectuellement (car ce travail d’émancipation est toujours à poursuivre et à recommencer).

gestapiste_Stephen-Merchant

Un film, donc, où même les très intrusifs gestapistes en costume noir et au sourire obséquieux* – ici le grand Deertz (Stephen Merchant) en train de fouiner dans la chambre du petit Jojo et d’admirer le « fanatisme aveugle » de celui-ci – arrivent à être marrants.

* On sait bien sûr combien la courtoisie de façade peut être une ruse pour désarmer les victimes et masquer une violence sans limite.

Jojo Rabbit – Comédie dramatique américaine de (et avec) Taika Waititi – Avec Roman Griffin Davis, Thomasin McKenzie, Scarlett Johansson, Sam Rockwell, Alfie Allen… – Sortie le 29 janvier 2020 – Durée : 1h48 – Prix du public au festival international du film de Toronto 2019.

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