Le traître, de Marco Bellocchio

Le traître – Il traditore : un biopic dramatique de Marco Bellocchio sur la pieuvre sicilienne, aux tentacules raccourcis par la justice.

Festival_de_Cannes_Logo.svgJe me rappelle cet été des années 80 de mon enfance, où sur Europe n° 1, on ne parlait que de ce procès monumental. La mythique mafia sicilienne se faisait rattraper par la justice italienne, en l’occurrence incarnée par un jeune juge intrépide, Giovanni Falcone (1939-1992), interprété ici par Fausto Russo Alesi. À l’époque, tout ceci me semblait assez confus. Une trentaine d’années après les faits, Marco Bellocchio revient sur cette affaire pour en éclaircir les contours.

À l’origine, Cosa Nostra est une organisation secrète à laquelle de jeunes Siciliens – tel Tommaso Buscetta (Pierfrancesco Favino) donc, au centre de ce biopic – jurent fidélité, pour leur vie entière.  Selon la légende colportée par les hommes d’honneur qui la constituent, Cosa Nostra est censée être une œuvre sociale redistributive, qu’enrichit la contrebande de tabac – et qui ne recule pas devant un petit homicide par-ci par-là pour asseoir sa réputation. Quand l’héroïne devient source de profits autrement considérables que le tabac, les luttes entre familles mafieuses s’intensifient. S’approprier ce marché mondial en expansion est l’enjeu. Les Corléanais dégomment à tout-va, y compris des membres de la famille Buscetta. Ces trahisons entre membre de Cosa Nostra, ces petits meurtre entres amis, seront peut-être à l’origine de la collaboration future de Tommaso Buscetta avec le juge Falcone.

Petit parrain palermitain désormais très confortablement installé au Brésil pour fuir la fureur desdites hécatombes, Tommaso Buscetta connaît bien les rouages de Cosa Nostra dans laquelle il évolue depuis ses 16 ans. Une fois tombé dans les mailles de la police brésilienne chargée de lutter contre le trafic international d’héroïne, puis extradé vers son pays natal, Tommaso Buscetta va vider son sac.

Retraçant ce procès épique, Le traître détaille le fonctionnement d’une confrérie, visiblement corrompue par l’appât du gain, à la morale aveuglée par celui-ci, et qui recourt assez facilement à la violence pour étendre ses aires d’influences et avoir raison de ses ennemis.

Avec ses confrontations entre parrains, ses accusés encagés par dizaines, ses débordements, le tribunal ressemble dès lors à un grand théâtre tantôt comique, tantôt tragique. Et comme pour le procès de Nuremberg durant lequel furent jugés des criminels de guerre nazis – mais pas tous, loin de là – on se doute qu’ici aussi, certes des pontes tombent, mai beaucoup d’autres échappent à quelque peine que ce soit, faute de preuves suffisantes ou parce qu’ils bénéficient d’une certaine indulgence de la part de la justice.

Le traître – Il traditore - Biopic dramatique franco-italo-germano-brésilien de Marco Bellocchio - Avec Pierfrancesco Favino, Luigi Los Cascio… – Durée : 2 h 31 – Sortie le 30 octobre 2019 – 12 fois nommé à la 72ᵉ édition du festival de Cannes.

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