L’Empreinte du renard, de Moussa Konaté

L’Empreinte du renard – meurtres en pays dogon, polar de Moussa Konaté : un voyage sous les cieux chauffés à blanc du Nord malien, au pays des masques sacrés et des prédictions, lues par les devins, dans le sable foulé par les renards.

« Le Hogon [chef spirituel dogon, Ndr] hocha la tête, les yeux fixés au sol.

- Quand nous, les Dogonos, nous sommes venus nous installer ici il y a plus de sept cents ans, c’était parce que nous étions un peuple farouche, fier et jaloux de sa liberté. Nous sommes venus du grand Mandé [vaste région de l’Afrique de l’Ouest, désormais à cheval sur plusieurs pays, où était établi l’Empire mandingue entre les XIIIe et XVIIe siècles, Ndr], sans armes ni richesses. Nous n’avions que notre foi. Depuis, ici, nous nous sommes mis sous la protection de notre dieu Amma. Tout ce qui est sur notre terre et sous notre terre n’existe que par la volonté d’Amma. Amma seul a réponse à tout. Notre premier ancêtre, Lèbè, nous a apporté la mort, certes, mais il nous a donné aussi la mission de veiller sur l’héritage commun. C’est pourquoi chaque Dogono, où qu’il se trouve, doit se dire qu’il a pour mission de veiller sur l’héritage de l’ancêtre, sinon il cesse d’être un Dogono. » (page 220)

IN_l-empreinte-du-renard-de-moussa-konateCommissaire à Bamako, au Mali, Habib se voit confier une enquête qui va le mener, lui et l’inspecteur Sosso, au cœur du Pays dogon*. Dans un village montagnard du très aride Nord malien, des meurtres ont lieu. Les cadavres étrangement boursouflés, d’élus notamment, ont été retrouvés. Les villageois obéissant plus volontiers à leurs chefs traditionnels plutôt qu’aux fonctionnaires de police (institution à la réputation assez déplorable), l’enquête patine. Habib va devoir penser comme un Dogon, comprendre leur cosmogonie originale, leurs croyances et leur façon de s’organiser pour mener à bien cette délicate mission.

Moussa Konaté décrit ce conflit culturel entre la modernité post-coloniale (qui n’apporte pas que des bienfaits, loin s’en faut) et les modes de vie ancrés dans un passé qui, lui, plonge ses racines dans un monde aux pratiques mystérieuses, empreintes de sorcellerie et de liens tribaux puissants, intransigeants, qui valorisent la survie de la communauté face aux intérêts individualistes vénaux.

NB : Que celles et ceux qui ont la phobie des serpents soient averti·e·s, ce livre ne leur conviendra guère. Pour les autres, allez-y gaiement et que la force du cobra soit avec vous !

* La Ville de Rennes entretient un jumelage avec le Plateau Dogon depuis 1985.

L’Empreinte du renard – meurtres en pays dogon – Polar de Moussa Konaté – Fayard, 2006 – Points 288 pages, 7 €.

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