Retour sur les Semailles de Démocratie à Notre-Dame-des-Landes les 9 et 10 juillet 2016

Semailles de Démocratie à Notre-Dame-des-Landes (44) les, 9 et 10 juillet 2016 : un week-end engagé.

 
abandon

Sous le vaste chapiteau des Semailles de la Démocratie, des oreilles attentives…

Ce n’est pas seulement le besoin de se mettre au vert qui aura conduit ce week-end-là une équipe de L’Imprimerie Nocturne sur les terres convoitées par Vinci, la Région Loire-Atlantique et l’État pour y implanter une nouvelle zone aéroportuaire en lieu et place d’un bocage non dénué de charmes certains.

La première surprise est bien sûr le grand professionnalisme de l’Acipa*, association organisatrice de ce rassemblement – or tout ce qui touche à la ZAD est traité dans les médias mainstream comme source de désorganisation et autre orchestration du chaos. Force est de constater que les médias influent donc, qu’on le veuille ou non, sur la construction de nos a priori. Mais à l’Imprimerie Nocturne, on n’est pas du genre à se contenter d’idées arrêtées. En l’occurrence ces 2 belles journées de rassemblement contre un aéroport amplement contesté sont aussi l’occasion de goûter une ambiance chaleureuse, festive, constituée d’un savant mélange de pédagogie ludique, d’innovation sociale, de cordialité et de militantisme à toute épreuve. Chaleureuse et festive de par l’installation sur le site d’accueil d’un vaste camping où, sur plusieurs hectares de prairies d’herbe grasse entourées de haies et de rus, s’alignent tentes Quechua et camping-cars hétéroclites – on se sent en vacances.

L’entrée libre et gratuite, les cantines à prix libres (nous en avons testé plusieurs à chaque fois avec grand plaisir), les buvettes animées par des brigades tranquilles de bénévoles, etc., tout ceci convoque messages politico-économiques, éveil des sens, découvertes de produits locaux et convivialité autour de festins sans chichi.

Clown

Ni expulsions – Ni travaux – Ni aéroport

Sous les 8 chapiteaux qui font ce rassemblement ressembler à une sorte de cirque itinérant monumental (dépourvu de ménagerie) se multiplient les conférences, magistrales ou participatives. On y cause (de solidarité translocale), on s’y écoute, on y débat, on s’y informe (les marais salants de Guérande auraient fait par le passé l’objet d’un GPII** mis en échec par la lutte), on y témoigne (détresse de street-médics nantais ayant subi un fort stress psychologique lors de journées d’émeutes réprimées violemment et décrivant des symptômes post-traumatiques parmi des manifestants // douleur combative de parents de victimes de bavures // importance des démarches juridiques et des contre-expertises pour justement contrer les dossiers d’État bâtis sur des contre-vérités // nécessité des plaintes collectives appuyées par des avocats et des « legal team »*** // similitudes des luttes et fiertés des points gagnés), on y voit des documentaires (sur les aborigènes spoliés), on s’y rassemble, on s’y réchauffe au rythme d’interventions sur des sujets actuels (violences policières, mobilisations internationales contre des projets imposés comme le centre d’enfouissement des déchets nucléaires prévu à Bure, dans la Meuse, ou le TAV**** de part et d’autre des Alpes italo-françaises).

Hamon

Hamon Martin Quintet devant le dance-floor en parquet ciré.

Et puis, il y a ces concerts (Hamon Martin Quintet et leur fest-noz moderne – voir photo ci-dessus – aux chants engagés, forro brésilien galvanisant la foule en rapprochant les luttes – référence à la destitution récente de leur présidente –, drôlatiques et endiablés Des lions pour des lions déguisés en contrôleurs SNCF, les foulards bleus et les rythmes touaregs de Nabil Baly…), ces animations (lâcher de lampions nocturne en hommage à un militant décédé dans le Tarn à Sivens, bus à pédales et manège pour les enfants), ces toilettes sèches impeccables et décorées de frises mongoles, ces rencontres, ces petites joies, ces émotions tangibles, ces apéritifs volubiles, toutes ces heures tranquilles qui incontestablement auront fait de ce festival du monde alternatif une expérience de terrain irremplaçable.

Merci

« Merci et on ne lâche rien ! »

Bribes entendues :

« Ben moi j’aimerais bien rentrer avant le match, ce soir !

- Waaahhh, zadiste en carton ! » (du Camping 1 vers le site – dimanche 10/07 – 11h15)

« Eh, ma tente elle s’est envolée ! » (Camping 2 – dimanche 10/07 – 17h02)

 « Quand les élus s’abritent derrière les cordons de CRS, où est le dialogue avec le peuple ? » (chapiteau 1 – dimanche 10/07 – 12h07)

« Ce qui se passe à la ZAD ne sera jamais un système ! » (chapiteau 1, sous des applaudissements  ainsi que des sourires circonspects – dimanche 10/07 – 12h10)

« Oh oui, comme les bardes !

- Les quoi ? C’est quoi les bardes ?

- Ben tu sais, les trucs bretons, là… » (un banc, près des cantines, Site des Semailles – dimanche 10/07 – 22h30)

« Mort à la privatisation ! » (près des cantines, site des Semailles de la Démocratie – dimanche 10/07 – 00h00)

« Il y a un continuum entre GPII et loi El Khomri… » (chapiteau des Semailles de la Démocratie – dimanche 10/07)

« L’État appuie l’appropriation par le privé des [biens] communs. Il n’assure plus son rôle arbitral. » (idem)

« L’anti-système que vous portez peut être le système de demain. » (idem)

« Je n’aime pas les chefs. Y compris les chefs d’inculpation. » (Conférence sur les violences policières – dimanche 10/07)

« Il existe une frange révolutionnaire réactionnaire au sein des forces de l’ordre. » (Conférence sur les violences policières – dimanche 10/07)

«  Je ne veux pas de dieu, je ne veux pas de maître ! » (dans le noir, près des cantines, site des Semailles de la Démocratie – dimanche 10/07 – 00h30)

Bure

Militants contre le projet CIGEO (prévu à Bure, dans la Meuse, où s’enracine un combat de longue haleine entre habitants du cru et industrie nucléaire), venus prendre de la graine aux Semailles de la Démocratie… (crédit photos : Suliane Legendre)
 

Prochain rassemblement prévu à la ZAD de Notre-Dame-des-Landes (44) les 8 et 9 octobre 2016

* L’Acipa : Association Citoyenne Intercommunale des Populations concernées par le projet d’Aéroport de Notre-Dame-des-Landes, luttant depuis 2000 contre la création d’un autre aéroport à Nantes (Loire-Atlantique), sur les communes de Notre-Dame-des-Landes, Grandchamp-des-Fontaines, Vigneux-de-Bretagne et Treillières. Cette association rejoint l’initiative du Cedpa (Collectif d’Élu·e·s Doutant de la Pertinence du projet d’Aéroport), créé quant à lui en 2009.

** GPII : Grands Projets Inutiles Imposés.

*** Cf. Defcol.

**** Le TAV (treno ad alta velocità, train à grande vitesse en italien) est un projet européen qui soulève des mouvements d’opposition depuis une bonne vingtaine d’années.

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