Le vent se lève, un film d’animation sans âme ?

Le vent se lève, prouesse multicolore et japonaise de Hayao Miyazaki. Annoncé comme son dernier long métrage, que recèle ce film d’animation ?


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Partant d’une citation extraite de la dernière strophe d’une poésie désuète de l’illisible Paul Valéry, « Les cimetières marins »*, Hayao Miyazaki pouvait-il faire plus mauvais départ ? Sur ces bases qui sont ce qu’elles sont – après tout, il existe peut-être ici des laudateurs de Paul Valéry et je ne voudrais pas les froisser –, Miyazaki a comme à son habitude développé des thèmes propres au Japon : les cataclysmes, la guerre, le monde de l’entreprise hiérarchisée et bien sûr l’amour. Car en chaque Nippon se cache un super lover ultra-sentimental.

Le-ventÉvidemment, c’est merveilleusement bien dessiné. Les effets de matières, les lumières, les ciels, les pluies et les vues sont admirablement bien réalisés. Mais pourrait-on dire, c’est la moindre des choses. Or, si ce but est atteint, le reste a un peu de mal à suivre. On regarde plus les dessins qu’on ne suit l’histoire. Car le héros, Jiro Horikoshi, myope et ingénieur aéronautique chez Mitsubishi dans l’entre-deux-guerres**, est vaguement insupportable ; certes, il tombe amoureux d’une jeune femme, il rêve de construire des avions qui franchiront le stade de prototypes qui résisteraient aux premiers essais, il se rend en Allemagne, il participe à la course aux armements, il fume et vénère ses supérieurs, mais tout ceci peine à constituer un portrait attachant. Alors on s’ennuie un peu et on admire les paysages, les perspectives, la multiplication des plans, les trouvailles de couleurs, les transparences, etc.

 

Après tout, peut-être était-ce là l’idée principale de Miyazaki : inciter à la méditation face aux calamités naturelles et à nos petits bonheurs humains, face aux soubresauts de l’Histoire jamais avare en avanies et aux prouesses technologiques (qui servent ensuite les pires causes), face à la grandeur de nos rêves et à l’immensité de nos désillusions. Et en ce cas, c’est parfaitement réussi.

* « (…) Le vent se lève !… Il faut tenter de vivre !
L’air immense ouvre et referme mon livre,
La vague en poudre ose jaillir des rocs !
Envolez-vous, pages tout éblouies !
Rompez, vagues ! Rompez d’eaux réjouies
Ce toit tranquille où picoraient des focs ! »

** L’entre-deux-guerres pour les Européens uniquement puisque les Japonais sont, dès 1931, en guerre contre les Chinois. La Mandchourie, rapidement annexée, est transformée en protectorat.

Le vent se lève – Film d’animation de Hayao Miyazaki sorti le 21 février 2014 – Durée : 2h07

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