Le Loup de Wall Street ou la vie de Jordan Belfort et ses tentations. Dents longues pour un biopic abouti sorti fin 2013.
Le dernier film de Martin Scorsese présente un scénario sans grande surprise. Nous suivons la vie de Jordan Belfort (Leonardo DiCaprio), courtier de Wall Street, qui monte sa propre société boursière et frauduleuse avec son ami Donnie Azoff (Jonah Hill). Le tout noyé dans une surabondance de drogues, de sexe, d’argent, de luxe et de violence.
Il est évident que 90, voire 95 % du Loup de Wall Street sont inutiles au scénario mais servent uniquement à donner de la profondeur à ce qui compte avant tout dans ce film, l’ambiance ainsi que les caractères des personnages. Des presque trois heures de film, pas une minute n’est à jeter, toutes les séquences sont longues mais paraissent entières, comme si Scorsese avait exploré chaque possibilité, chaque détail, offerts par les situations auxquelles on assiste. Les personnages sont puants, avides de consommer tout ce qu’il leur est possible de consommer, mais on ne peut résister à un certain attachement pour les deux protagonistes principaux et la meute de traders insupportables qui les entoure. Peut -être est-ce dû au ton comique avec lequel tout le film est abordé, qui renvoie ces hommes assoiffés de pouvoir à ce qu’ils sont réellement, des êtres humains. Leonardo DiCaprio est au sommet de son art. Il interprète subtilement l’évolution de Jordan Belfort d’un jeune homme timide en un leader d’hommes passionné et passionnant. Présent dans quasiment tous les plans, c’est tout simplement un plaisir de le voir porter ce film avec tant de virtuosité. Le réalisateur lui laisse tout le temps de déployer son talent et ne se contente pas d’exhiber sa belle gueule dans des plans de dix secondes maximum. Et bien que DiCaprio soit magnifique et magnifié, il n’empêche pas les seconds rôles, Jonah Hill le premier, d’être visibles. Incarnant une sorte d’âme damnée – et encore plus dégoûtante – du personnage principal, il n’en reste pas moins attachant, drôle et insupportable à la fois.
Seule ombre au tableau, bien que Scorsese se montre finalement très critique envers le capitalisme sauvage, il paraît avoir du mal à intégrer la moindre notion de féminisme. Très peu de femmes sont présentes au casting, la majorité n’étant que des figurantes présentes pour prendre part à des amas de chair lors de scènes orgiaques. Margot Robbie interprète la femme de DiCaprio, donc un des rôles principaux, mais représente la femme parfaitement faite, mannequin, et totalement vénale… Est-ce un parti pris pour coller à l’esprit machiste des personnages décrits ou simplement un tantinet de conservatisme ?
Enfin, note spéciale à la superbe bande originale où l’on retrouvera avec plaisir Cypress Hill, The Specials, Louis Armstrong ou même… Plastic Bertrand.
Article signé Lucas S.