Route du Rock 2016 : un samedi au Fort Saint-Père

Route du Rock 2016 : Here Comes The Suuns !

Retour sur la soirée du samedi 13 août, au Fort Saint-Père. Un week-end qui aura accueilli 15000 festivaliers. Une baisse de fréquentation mais un objectif atteint sous le soleil.

Ecocup RDR 2016

Pour la 26e année, le Fort Saint-Père accueille la crème (fraîche) des tendances et les plus anciens de la pop rock qui fait du bien. En mode soleil cette année, le festival est plutôt bon enfant comme à son habitude. Les bénévoles efficaces et pédagogues (sur le cashless, les gobelets, les boules Quiès, les Famas…) au bar ou aux accréditations, les groupes sur la scène des remparts ou de la scène du Fort. Bon  enfant ne voulant pas toujours dire souriant, non non. Mais parfois, volontaires, contents d’être là, ou pas, mais jamais agressifs.

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Les aimables et jeunots londoniens de Ulrika Spacek démarrent la soirée en plein cagnard. Short Nike défraîchi, pieds nus, cheveux gras baissés sur les 3 guitares, t-shirts informes ; on se dit : c’est stylé c’est voulu, c’est une posture, ou mieux : un message ! La musique est lancinante, un petit côté Cure ado mêlé de Kim Gordon au masculin plutôt captivant, la basse percute le torse du spectateur, le batteur fait semblant d’être nonchalant comme les autres, et finit par relever la tête, hilare et jouissant du moment. Ils sont contents d’être là, ils le disent, en anglais dans le texte. Les festivaliers crament au soleil, en étudiant leur programme sous leur panama distribué à l’entrée.

 

Le public encore peu fourni (en effet, la soirée complète se compte tout de même en 9 heures et 8 groupes, et l’on se prend à se dire que c’est un mal pour un bien si The Fields, pourtant très attendu, est annulé purement et simplement, car au final cela réduira le côté endurant de la soirée. Même si ce soir-là on aura pu s’asseoir dans la poussière de l’enceinte du Fort pour reposer son dos) se déplace vers la scène du Fort, prévue pour accueillir les plus grosses pointures. Les retardataires sont attirés par la voix du chanteur de LUH (Lost Under Heaven), une accroche que n’aurait pas reniée Bruce Springsteen. Nappes, reverb, chœurs à la U2. Les tenues cette fois sont sombres et classieuses, grosse scène oblige. On se met en jambe, mais un manque de quelque chose. Quelques problèmes techniques avoués, le groupe fait place au suivant sur la même scène après une pause-repas imposée par le trou dans la prog’ certainement prévu pour. Après une copieuse « Mémé box », les stands merchandising font le plein, et l’on se surprend à y faire un tour, juste pour voir, et pourquoi pas, acheter un tote bag, un vinyle ou une carte postale.

Là, les Tindersticks. Il ne fait pas encore nuit, et pourtant une ambiance différente s’impose. Le groupe n’a pas besoin de références. Aux 1ers rangs, les fans de la 1ère heure sont aux anges. Stuart Stapple (rose à la boutonnière) et ses comparses apparaissent. Ils ont la classe, c’est indéniable. Autant que cette nuit inoubliable à la Salle de la Cité – non « occupée » ni « évacuée » alors – il y a quelques années où, au ralenti, j’avais croisé leurs cheveux au vent juste après m’être pris en plein cœur leur concert incroyable aux nappes envoûtantes de violons et du timbre grave de Stuart. Lui est là, bien là, sourit, ferme les yeux en posant sa voix sur le fil de nos cordes sensibles, et lance de sobres mercis entre chaque morceau ; le groupe ne lésine pas sur le profond, le minimalisme, et les combinaisons d’instruments plus ou moins atypiques : duo de xylophone, chekeré, œuf, guitares sèches et jazz. La simplicité dans l’efficacité coupe le souffle. Le chanteur n’hésite pas à sortir sans chi-chi une feuille A4 anti-sèche qu’il ne lira même pas, toujours les yeux fermés. Mais il sait aussi montrer sa fragilité tranquille, autant en annonçant la fin du concert (« more delicate« , mais qu’ils vont finir par quelques morceaux plus « … » parce que…) qu’en lançant deux fois de suite (après un faux départ) en un tranquille « 1 2 3 4″ le vieux tube attendu, sans se départir de son calme et de sa présence intemporelle. « Can you see the light ? It’s around you« …

Tindersticks

The Tindersticks

Après un changement de plateau efficace, La Femme déboule, harangue Saint-Malo et démarre au huitième de tour. Du son, de la pop, des lights verts énergiques. Le public s’agite, les attendait. Les voix partent, décollent, les quatre claviers cavalent sur les morceaux aux paroles légères et absurdes. Le chanteur tombe la veste, elle bouge les épaules, un pianiste se lance dans un bouger de hanches et de jambes frénétique, les genoux des festivaliers bougent dans la mouvance d’un twist endiablé dans la terre sèche du Fort Saint-Père. Le deuxième chanteur, Billy Idol propret, prend ensuite le micro et se lance au-dessus de la foule, puis remonte, électrique, sautillant. La musique vire presque à la techno, les lights au rouge. « Est-ce que vous êtes rock » sera en tout cas la question qui aura taraudé le groupe pendant tout ce concert survolté.

Pendant ce temps, certains ont pris le devant de la scène des remparts pour un terrain de jeux (foot-chaussure, corrida, gouren…) sous le regard amusé des techniciens qui attendent le groupe suivant. Quelques militaires passent à côté de jeunes filles encore en short. La journée a effectivement été ensoleillée contrairement à plusieurs éditions du festival abonnées au bottes et à la boue.

Les interludes entre deux concerts sont assurés par les Magnetic Friends, entre « No Alohah » et zouk décalé, pour faire patienter le festivalier en chapeau. On ne parlera pas d’Exploded View, attendu mais raté, dû à un problème de voix ou de motivation, à suivre tout de même.

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Et enfin (car 7 heures de concerts c’est déjà beaucoup donc pas de Battles pour cette fois !) les Suuns, les aguerris, qui foulaient la scène du Fort pour la 4e fois, ont montré qu’ils tenaient la barre haut, tant en scénographie qu’en présence sonore et physique. Oppressant, sonorités de la plus pure pop des profondeurs, voix incantatoire et asymptotique, une prestation pour le moins hypnotique. La Route du Rock ne manqua pas encore cette année de fournir du gros, du pro, du beau.

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Au final, épuisés mais repus, certains quitteront le site pour dormir au camping, d’autres plus loin, accompagnés par les portraits accrochés aux cimes des arbres de Patti Smith, Morrissey, Nick Cave et les autres…

Expo Renaud Monfourny

Exposition Renaud Monfourny – Photos : Suliane L.

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