Drugstore cowboy de James Fogle

Drugstore cowboy, de James Fogle : une épopée pharmaceutique décadente et désenchantée.

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Robert Hugues aka Bob se came. Et pour se camer, il dévalise les pharmacies. Telle est sa vie. Quand il se fait prendre en flagrant délit, il séjourne en taule. Où il a passé la moitié de sa vie. Le reste du temps, il fomente des plans tarabiscotés pour trouver de quoi remplir ses seringues et celles de son crew (Rick, Nadine et surtout Diane). Bob a accepté son destin, affreux mélange de cambriole et de joyeuse défonce dans des appartements miteux de Portland. Bob est intelligent, charismatique, beau gosse effronté. Il sait ce qu’il fait. Il a choisi. Il ne se laisse pas faire. C’est un dur (au cœur tendre), un brin superstitieux (il ne faut pas poser de chapeau sur un lit ; ne jamais regarder l’envers d’un miroir ni regarder en arrière ; ni s’approcher des chats…). Mais, au bout du compte, peut-être que sa mortifère attirance pour les stupéfiants (qu’il préfère à l’amour qu’il porte à Diane) causera-t-elle sa perte.

Plus on réclamait haut et fort une justice impitoyable, plus on était susceptible d’enfreindre soi-même la loi

« Merde, si la population avait ne serait-ce qu’une vague idée de la bizarrerie, de la perversité et de la soif de pouvoir qui habitaient la plupart des policiers, elle serait terrorisée. À croire que plus on réclamait haut et fort une justice impitoyable, plus on était susceptible d’enfreindre soi-même la loi : Bob en avait eu la preuve à maintes reprises. » (p. 86)

Braquages, combines, arrestations, cavales, shoots au Numorphan© (un opioïde puissant) et aux méthamphétamines, drames et péripéties, Drugstore cowboy n’est pas une bluette de tout repos. Encore moins un manuel de savoir-vivre à l’usage des premiers communiants. Sur un rythme accrocheur, James Fogle dépeint un univers qu’il connaît bien, celui d’une certaine Amérique des années 70, déglinguée, iconoclaste, et bigrement romantique ! Revendiquant une ultra liberté farouche, brisant les tabous du juste milieu, préférant toujours au droit chemin linéaire les petites routes hasardeuses en théorie (et au regard de la loi) impraticables, Bob devient un héros aussi paumé que lumineux. Or cette association était tout, sauf évidente.

Je marcherai sans remords sur une montagne de starlettes nues

« Demander à un toxico pourquoi il se drogue, c’est un peu comme demander à une personne normale pourquoi elle aime baiser. Je suppose que chacun ira de sa réponse, des trucs comme : ‘ça me fait du bien’ ou ‘je ne peux pas m’en empêcher’, voire ‘ça fait partie de l’amour’ et ‘je ne le fais que pour avoir des enfants’. Eh bien un junkie vous donnera à peu près les mêmes réponses, à l’exception peut-être de la dernière. J’ai encore jamais entendu un camé prétendre qu’il se shootait pour avoir des gosses ; en revanche, le reste, oui. Et il y en a certains qui prétendent qu’aucune femme ne leur a jamais procuré autant de plaisir que l’héroïne. Personnellement, j’ai jamais pris de poudre aussi bonne que ça, mais filez-moi deux cachets de Dilaudid, avec quatre ou cinq comprimés de Desoxyn à quinze milligrammes, et je marcherai sans remords sur une montagne de starlettes nues pour avoir mon fixe. »

Drugstore cowboy, de James Fogle, 13e Note Éditions, Paris – Traduit de l’américain par Karine Lalechère – 2011 – 208 pages – Porté à l’écran en 1989 par Gus Van Sant avec Matt Dillon dans le rôle de Bob.

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