Madeleine de Sinéty : un village oublié

Depuis octobre 2021, le Musée de Bretagne des Champs libres présente l’exposition Madeleine de Sinéty, Un village. Sorte de voyage dans le temps, empreint d’une vive sensibilité photographique et humaine, c’est une ruralité disparue qui s’y développe. À voir et à ressentir impérativement avant le 27 mars 2022.

 

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Il y a plusieurs histoires dans cette exposition : celle de la photographe Madeleine de Sinéty, ses carnets et ses images. Celle d’un village, Poilley dans le nord du département de l’Ille-et-Vilaine. Et enfin, celles des familles qui y vivaient dans les années 1970. L’artiste, alors parisienne et autodidacte en photographie, s’y installe après une sorte de coup de cœur. Mais bien loin des clichés de cartes postales de vacances, c’est dans la ruralité d’une France aujourd’hui disparue qu’elle se plonge.

Se liant d’amitié avec les familles, elle photographie sans relâche la vie de leur quotidien : jeu d’enfants, parties de football, mariages, bals populaires, abattage du cochon, scènes de cuisine, travaux des champs. C’est tout un décor qui prend place, et, grâce au jeu de la lumière et des complicités, il deviendrait quasi palpable. Nous voilà donc projetés autour de1975, là où le linge sèche au-dessus d’une cheminée, où les repas se partagent dans un confort sommaire, où les danseurs ont les pieds dans la gadoue, et où la nature prend une place primordiale. Ou plutôt elle fait partie intégrante des vies, liées inévitablement à elle, et notamment pour s’alimenter.

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« De temps en temps, écrit Madeleine de Sinéty, j’invitais tout le monde à une projection de diapositives. Il fallait transporter depuis l’église, jusqu’à la salle des fêtes au plancher en terre battue, assez de bancs pour asseoir tous ceux qui venaient admirer, au milieu des cris et des rires, leur propre vie, leur travail de tous les jours, étonnés de trouver cela si beau ». Madeleine de Sinéty, carnets de 1974 à 1976

Qu’importe la question de la qualité graphique d’un pommier, Madeleine de Sinéty cherche autre chose, à attraper l’insaisissable, l’intimité, la tendresse, les regards, les rires, les gestes banals qu’ils en deviennent sublimes. Prises à la volée, les photographies ne sont pas posées, et celui ou celle qui les regarde se retrouve presque à vivre la scène, et c’est là toute la force du travail de Madeleine de Sinéty : un regard sensible qui en révèle d’autres.

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Sur les 67 photographies présentées, soit au mur soit en projection de diapositives, l’importance de la couleur saute aux yeux, dévaluant presque le noir et blanc traditionnel, et conférant des aspects parfois incongrus, celles des vêtements, ou des joueurs de foot qui, de loin, ressembleraient à de petites figurines de danseurs en plomb. Et, au cœur de cette série photographique, il y a la question de la mémoire, et du changement ; la transformation agricole d’une vitesse vertigineuse a effacé les chevaux, l’artisanat, la réalité de l’abattage d’une bête et sa valeur, des formes de vie collective, ce qui au-delà de la nostalgie, nous confronte à des réalités environnementales actuelles : qu’avons-nous effacé de nos paysages et de la vie de nos aïeux ? Poilley en est une trace, et la sensibilité de Madeleine de Sinéty va bien au-delà de celle des pellicules photographiques.

 

Visible jusqu’au 27 mars 2022

Toutes les informations sur l’exposition

 

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