Elle l’adore : une excellente comédie dramatique à la française.

Il faudrait presque s’arrêter là. Ne rien dire en plus. Mais ça ferait peut-être une chronique un peu trop légère, évasive, expédiée au lance-pierres. Or Elle l’adore de Jeanne Herry mérite à coup sûr mieux. Car à l’évidence, l’équipe qui a concocté cette petite comédie policière n’aura pas ménagé sa peine pour que tout soit impeccable de bout en bout. Y compris ce petit clin d’œil qu’est le titre issu d’un texte de Michel Berger de 1978, et que chanta France Gall.

En chanteur populaire, Laurent Lafitte est parfait (comme à son habitude – voir Tristesse Club de Vincent Mariette avec Vincent Macaigne et Ludivine Sagnier, Les petits mouchoirs de Guillaume Canet, ou le sublime Les beaux jours de Marion Vernoux avec les impeccables Fanny Ardant et Patrick Chesnais).

Sandrine Kiberlain est honorée de ce qui est probablement à ce jour et à ma connaissance son meilleur rôle. Si elle a décroché un César pour 9 mois ferme de et avec Albert Dupontel, il faudra cette fois-ci lui ériger, a minima, une statue d’or place de la Concorde.

Les seconds rôles eux aussi sont admirables – et qui plus est déterminants. On pense bien sûr au brigadier Coline (Olivia Cote) et au capitaine Antoine (Pascal Demolon), aussi vaillants que pathétiques, en plein déboires amoureux et qui sont néanmoins  chargés de l’enquête par une hiérarchie tétanisée par les impératifs budgétaires.

Tout est joué sans fausse note. Même Michel Drucker, qui fait une courte apparition, excelle. Certes, il joue son propre rôle d’animateur-culte de l’émission Vivement dimanche ! Mais tout de même, c’est dire l’ampleur de mon enthousiasme. Et nous ne parlerons même pas du soin accordé aux décors, aux ambiances, aux accessoires et à toute la quincaillerie indispensable à la panoplie de toute bonne fan et toute bonne idole qui se respectent.

L’histoire en deux mots est celle d’un chanteur à succès (genre Patrick Bruel au faîte de sa célébrité), beau gosse et pour qui tout roule en Mercedez-Benz, dont la glorieuse routine est interrompue par un drame accidentel (la mort de sa compagne). Il va donc recourir aux services diligents et pour le moins imaginatifs de Muriel, fidèle groupie de la première heure (Sandrine Kiberlain), pour se sortir de ce mauvais pas et se débarrasser du corps qui l’encombre. Évidemment, rien ne va se passer exactement comme prévu – c’est là vous l’aurez compris le sel de toute bonne comédie réussie – et on assiste à un jubilatoire jeu du chat et de la souris entre les protagonistes. Le capitaine ne manque pas d’intuition. Muriel ne manque pas de panache dans cette situation rêvée d’aider son idole.

Avec une finesse et une authenticité sans failles, Jeanne Herry brosse donc une histoire étonnante, jamais téléphonée qui nous immerge dans le quotidien perturbé d’une star populaire dépassée par les évènements et nous fait aborder les rivages d’une passion – furieuse ? admirable ? à sens unique en tout cas – entretenue par une adoratrice compulsive. Si elle connaît et maîtrise aussi bien son sujet (le vedettariat, les fans, les coulisses du showbiz, la presse people, le besoin d’anonymat pour les uns et la chasse aux stars pour qui reste de l’autre côté de la barrière de la célébrité, le tout saupoudré des épices, magiques et tragiques, de l’existence), est-ce dû à ses origines (elle a été à bonne école, étant la fille de l’incomparable Miou-Miou et du toujours beau Julien Clerc) ? Peut-être. Quoi qu’il en soit, nous aurons adoré. Et c’est bien là ce qui importe.

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