Misst1guett, en avant la couleur !

A l’occasion de sa réalisation pour Quartiers d’été, l’illustratrice Misst1guett a bien voulu se prêter au jeu des rencontres de l’Imprimerie et répondre à quelques questions tout en présentant quelques unes des pièces de son travail. Bonne découverte !

Bonjour Misst1guett, tu publies aujourd’hui pour l’événement Quartiers d’été une affiche. Peux-tu nous raconter ton parcours de graphiste ?

Misst1guett : Depuis le plus longtemps que je m’en souvienne, j’ai toujours eu envie/besoin de dessiner, c’est plus fort que moi. Tout de suiteaprès le collège j’ai eu la chance de poursuivre pendant 3 années un Bac Arts Appliqués dans une super école d’art parisienne : l’école Boulle. Le Bac AA en poche j’ai choisi de me spécialiser dans le stylisme de mode, s’en est suivi 3 années d’étude encore : un BTS stylisme-modélisme de mode près de Lille et une dernière année dans une école privée de stylisme-modélisme sur Paris : les Ateliers Chardon-Savard dont j’ai obtenu le diplôme. C’est donc dans ce milieu très particulier que j’ai débuté ma vie professionnelle. Mon expérience s’est faite au sein de différentes gammes de prêt-à-porter : Sentier, jeunes créateurs, et luxe. J’ai également été styliste-costumière sur des courts-métrages et sur un opéra en Allemagne. Cette courte, mais riche expérience m’a permise de me rendre compte que la création me passionnait toujours autant mais que ce n’était peut-être pas le milieu qui me correspondait le mieux. J’ai donc mis de côté la mode pour revenir au dessin pur associé suivant les projets à l’infographie.
J’ai réalisé ma première exposition personnelle fin 2007 à Paris. Celle-ci s’est très bien passée et m’a donné confiance en moi pour continuer dans cette voie. Depuis mon arrivée à Rennes il y a un peu plus de 3 ans et la réussite de ma seconde exposition ici, mon désir de création s’est encore accéléré. Actuellement ma vie se partage entre un travail de vendeuse à temps partiel dans une chouette boutique rennaise qui m’apporte un petit revenu régulier « sécurisant » et celui d’artiste indépendante/auto-entrepreneur sous ma signature « Misst1guett ».

Quelles sont tes techniques favorites, comment travailles-tu pour arriver à une création comme celle-ci ?

-  Une fois mes recherches finies et mon idée en tête, je commence toujours par un dessin à la main au crayon, puis j’ai besoin de tracer une première fois les contours noirs des éléments les plus importants au stylo bille ou encre pour me les « placer ». Ensuite vient la mise en couleur, je travaille avec un mélange de différentes techniques, les plus courantes: encres, crayons aquarellables, gouache, poscas, stylos spéciaux..cette étape est très instinctive. Pour finir je vais travailler de manière assez obsessionnelle les contours de mon dessin au stylo noir. Si c’est pour un travail infographique, je le (ou les reprend si il y a plusieurs dessins à associer) sous Photoshop avec ma tablette graphique pour terminer la mise en forme du projet.

Dans ton travail, le motif du bison est récurrent; as-tu une explication ?

-  En fait, ce totem du bison n’est pas le mien c’est celui du projet solo musical rennais « The Wâll Factory » pour lequel je réalise toute la communication visuelle. Mais on peut dire qu’il ne m’est pas totalement étranger car il vient de son coup de foudre sur un marché pour une sculpture en forme de bison réalisée par un artiste Huichol ( minorité indienne du Mexique). Découverte faite lors d’un voyage que nous avons fait ensemble au Mexique, un pays et une culture qui m’inspirent beaucoup dans mon travail personnel.

Oui, on sent bien l’influence extérieure de deux pays, le Mexique et la Russie; qu’est-ce qui t’y attires en particulier ?

-  Je n’ai jamais voyagé en Russie encore, peut-être un jour, ce qui m’attire dans cette culture c’est surtout les couleurs et les éléments « folkloriques », je suis une grande fan des célèbres Matriochkas aux joues roses.

Mais alors que mon inspiration pour cette culture n’a été pour le moment que passagère, celle née de mon voyage au Mexique et de mes rêveries mexicaines me nourrit aujourd’hui beaucoup. Tout me passionne sur le Mexique, ses bons comme ses mauvais côtés. C’est étrange je sais que ne pourrais pas y vivre et pourtant c’est comme si j’avais trouvé dans ce pays un alter-ego, une pierre de rosette pour comprendre ce qui était déjà en moi mais sur lequel je n’arrivais pas forcément à mettre des mots.
La découverte de la fête du jour des morts mexicain ( « Dia de Muertos » ) surtout a été un révélateur dont je me suis directement inspirée pour ma dernière exposition.

A propos de cette exposition sur la fête des morts justement, il y a eu également un travail plastique réalisé en parallèle; comment tout cela s’est-il construit ?

- L’exposition comprenait à la fois des peintures, des sculptures en forme de crânes peints et des réalisations en sucre et chocolat nées d’un partenariat avec un artisan chocolatier rennais :  » Le Daniel « . L’idée était de présenter au travers de mon propre univers cette fête des mort à l’antipode de la notre: hautement colorée et festive! Je souhaitais pour cela aborder différents aspects de cette fête:  la création d’autels, la musique, les caricatures macabres et la réalisation d’offrandes comestibles faites entre autre de pains et de sucreries, d’où ce partenariat original. Ce projet a reçu un très bon accueil du public partout où il est passé, le thème n’a pas laissé indifférent et a donné lieu à quelques chocs culturels mais surtout à des discussions très intéressantes sur ce thème de la mort encore très tabou chez nous.

Il y a également une influence par le conte; quelles sont tes lectures préférées dans ce domaine ?

-  Tout à fait, mon âme d’enfant se raccroche énergiquement aux contes et mes créations s’en ressentent aussi. Mes goûts sont plutôt classiques dans ce domaine, je suis très attachée aux gros recueils de contes célèbres qui comme quasiment tous les enfants ont bercé mon enfance ( Grimm, Perrault, Handersen..). Ce n’est pas un conte, mais cela le pourrait, Alice et son pays des Merveilles m’inspirent aussi beaucoup, surtout dans ce sens où Lewis invente des créatures, des choses qui n’ existent nulle part ailleurs que dans sa tête, tout droit venues d’un rêve ou d’une hallucination. C’est aussi pour cela que les histoires de Miyazaki me fascinent, tels des enfants ils ont une imagination sans aucune limite, qu’on pourrait imaginer « hors de contrôle », c’est à cet idéal que j’aimerais aspirer.

“ On m’a souvent dit que mon univers pouvait faire penser à celui de Tim Burton, au graff, ou encore aux mangas et aux livres d’enfants…”

Entre les couleurs et les thématiques, on sent une forte identité visuelle colorée, ainsi qu’une pointe de décalage, tout n’est pas si « rose bonbon »; comment définirais-tu ton style si tu devais y apposer quelques mots ?

C’est une question très difficile et je ne suis pas sûre d’être la mieux placée pour y répondre. Il m’est arrivé de faire seulement de « jolis dessins », mais j’ai de plus en plus le désir de partager des thèmes détenteurs de messages. Comme tu le dis « tout n’est pas rose bonbon », j’aime autant parler de moments naïfs et heureux que de moments sombres et troubles, de cette dualité que nous portons tous en nous. Tout cela passe au travers de mon spectre de couleurs positives, mais ce n’est pas parce que les dessins sont de couleurs vives qu’ils ne peuvent pas parler de thèmes plus durs, c’est juste ma manière à moi d’aborder les choses.

On m’a souvent dit que mon univers pouvait faire penser à celui de Tim Burton, au graff, ou encore aux mangas et aux livres d’enfants.. ça doit être un assez bon aperçu extérieur de ce que cela peut donner, j’ajouterais que depuis quelques temps il devient assez psychédélique sûrement l’influence de l’art Huichol mexicain..et qu’on commence à me parler de tatouages..

Tu as aujourd’hui développé un petit merchandising de tes illustrations; pourquoi, et est-ce que ça marche ?!

-  Dans un premier temps, c’était surtout pour mon plaisir personnel et celui de mes amis, le plaisir d’avoir sur un objet un petit bout de ce qui sortait de mon imagination. Puis c’est devenu un petit commerce qui fonctionne de mieux en mieux (même si ça reste de toutes petites séries) .
Je me suis faite une petite clientèle (surtout grâce au bouche-à-oreille) mais là j’en suis arrivée à un point où si je voulais que cela fonctionne véritablement ( c’est à dire essayer d’en vivre) , il faudrait que je prenne beaucoup de mon temps pour créer des visuels dans ce sens, développer de nouveaux produits, chercher des fournisseurs, des points de vente etc.. et du coup je n’aurais finalement plus beaucoup de temps pour la création. Sans doute pourrais-je trouver une personne pour se charger des questions de points de vente, de médiatisation ..mais la « bonne » rencontre ne s’est pas faite encore.. Pour le moment je poursuis à mon rythme pour mon plaisir et celui des personnes qui me suivent.

Quels sont tes projets en cours ?

-  En ce moment je travaille surtout sur des projets à caractère « musical »; la pochette d’un second album pour une chorale originaire de Douarnenez et  mon premier vidéoclip en stop motion pour une chanson du projet « The Wâll Factory », pour lequel je réalise également la pochette du futur EP ( sortie en septembre prochain). En parallèle dès que j’ai un peu de temps « libre » je me remets à l’élaboration de ma nouvelle exposition (commencée il y a déjà plusieurs mois), mais je n’ai aucune idée de quand elle verra le jour, car cela avance assez lentement, d’autres commandes plus urgentes passant en priorité. Pour finir, avec l’aide d’un jeune et talentueux webmaster je travaille aussi à la mise en forme de mon futur site internet, j’espère qu’ il pourra être en ligne courant de l’été.

Quels sont tes derniers coup de cœur visuels, littéraires ou musicaux  ?

-  J’en ai eu plusieurs depuis début de l’année; côté animation, j’ai eu un véritable coup de foudre pour un vidéoclip fait de collages en papiers, il m’a mis les frissons: The Shrine réalisé par Sean Pecknold pour une chanson du groupe Fleet Foxes. Pour ce qui est de la lecture, quand je parlais de l’imagination « enfantine » sans limite et hors de contrôle de Lewis et Myazaki, dernièrement un roman plus récent m’a fait vivre ce même sentiment Le livre des choses perdues de John Conolly : magnifique!
Autres coups de cœur du moment : l’artiste américain AJ Fosik qui crée des sculptures-masques en bois aux couleurs vives  représentant, tels des totems indiens modernes, des sortes de divinités animales. Coup de foudre également pour les univers oniriques et fantasmagoriques fascinants des illustratrices Talita Hoffmann (Brésil) et Emmanuelle Houdart (Suisse) que j’ai découvert récemment. Côté musique : The Wâll Factory, Peter Kernel, Ladylike Lily, Puppetmastaz, et le dernier Patriotic Sunday pour ne citer que  cinq noms.

Le site officiel de Misst1guett

Le site de The Wâll Factory

En remerciant Misst1guett pour la présentation de son travail. Et pour te récompenser toi, lecteur, ci dessous une vidéo alléchante sur les friandises de la fête des morts.

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