La nouvelle comédie de (et avec) Bruno Podalydès Les 2 Alfred fait la part belle à la poésie et face au monde déshumanisé des entreprises branchées. Bruno y donne bien sûr la réplique à Denis. Et c’est en trio avec Sandrine Kiberlain que les péripéties vont s’enchaîner, entre scènes loufoques et goût de l’enfance.
Faire un benchmarking, forwarder le dossier, vendre de la déconnexion et autres joies du coworking (avec ces fabuleux espaces où l’on peut jouer au ping-pong, sauter sur un petit trampoline, ou faire son « to do potager », qui revient à arroser les plantes) : bienvenue chez The Box ! C’est la boîte dans laquelle se fait embaucher Alexandre (Denis Podalydès) ; le hic ? Il ne faut pas avoir d’enfants pour travailler chez The Box. No child. Car il faut être disponible H24, notamment en cas de galettes des kings pour débriefer la réunion en visio des résultats de l’entreprise. Le hic donc, c’est qu’Alexandre a deux enfants et qu’il doit prouver à sa femme, partie en mission de sous-marinière, qu’il peut se débrouiller seul. Il fait rapidement la connaissance d’Arcimboldo (Bruno Podalydès, ici spécialisé en revendeur de mini ventilateurs sur eBay), puis de sa collaboratrice Séverine (Sandrine Kiberlain), dont la voiture sans chauffeur est un véritable casse-tête.
Le scénario tricote habilement les mailles de l’univers insupportable de cette start-up et celui de l’enfance. D’abord par ses légères touches de dystopie, dans une société où les drones qui n’ont plus de batterie atterrissent sur le trottoir mollement dans un bruit de vieille marmite et les montres font dans la reconnaissance faciale et la commande vocale ; mais la science-fiction s’arrête là. Dans Les 2 Alfred, les coursiers à vélo sont à deux doigts de l’apoplexie, les projets municipaux invitent des entreprises extérieures à dynamiser les quartiers où le tramway vient d’arriver, et les employés de The Box sont bien sûr classés par ordre de réussite, sous les ordres d’un chef faussement cool ; proposant un aspect aussi décalé que frontal, la start-up nation en prend un coup. Mais c’est surtout avec la tendresse et la sensibilité qui arrivent à se faufiler entre des scènes beaucoup plus cartoonesques (comme la scène du combat de game of drones), par les loufoqueries que tentent Alexandre et Arcimboldo pour se dépatouiller, que le film touche. Une heure et demie à savourer (de ouf) entre doudous à cacher dans un congélateur et les histoires à lire le soir pour s’endormir : Les 2 Alfred rend le cœur léger, et la réussite ailleurs que dans une entreprise.