Nous attendions avec impatience un prochain concert de Shannon Wright. Le dernier rendez-vous datait de 2014 lors d’un dimanche-goûter envoûtant à l’Antipode. Une éternité. La songwriteuse d’Atlanta est enfin revenue à Rennes pour le festival Mythos. Un mardi 2 avril 2019 à marquer d’une étoile blanche (qui brille davantage que la pierre), en compagnie d’une artiste, la musique à fleur d’épiderme. Une interprète singulière, unique et bouleversante.
Ceci est évidemment une déclaration. À ce bout de femme menue en jean-baskets qui investit la scène du Cabaret Botanique de Mythos pile à l’heure. Investir c’est peu de le dire tant Shannon Wright prend possession de l’espace dès le premier morceau. Elle se lance sans filet dans l’arène du Magic Mirror avec « Plea », titre de 2004, sa guitare collée, grattée, secouée avec une énergie rugueuse et viscérale. La musique, combat de sang noir aux vertus laudatives.
Déjà presque 20 ans de carrière pour Shannon Wright. Onze albums. Son dernier, Division, date de 2017. Elle ne l’interprétera pas ce soir-là, au profit de pépites de son répertoire (« Fractured », « Black Little stray », « In the Morning… ») extraits d’albums tels que Other the Sun, Let in light, Secret Blood ou In film sound… Les convertis de longue date jubilent, les tripes en vrac, broyées par des saccades de mélancolie à la beauté brute. Lave en fusion des envolées abrasives et émotion-tsunami de la voix écorchée de Shannon Wright devenue bruissement au piano. Piano, guitare, voix, sa sainte-trinité de toujours.
Une petite heure de sensations pures et intenses, à savourer les yeux souvent fermés pour mieux s’imprégner, ressentir, humer, écouter (nos excuses au pourtant excellent batteur qui l’accompagne que nous avons oublié de photographier « légèrement » hypnotisée par l’intensité folle de l’artiste). « With closed eyes » également le dernier titre de ce concert de grâce disloquée, fragile et fort à la fois. Un au revoir timide et Shannon Wright disparaîtra. Pudique et somptueuse.