Retour à Rennes après avoir de nouveau présenté sa pièce culte Kindertotenlieder en novembre au Triangle, Gisèle Vienne présentait du 6 au 9 février au TNB sa nouvelle création Crowd, qui explore un nouveau rite collectif, celui de la rave-party.
Un terrain vague tourbé, des débris de verre et déchets au sol, Illuminator de Mad Mike du label Underground Resistance qui remplit l’espace sonore, et quinze danseurs entrant lentement sur le plateau. Habillés dans différents styles alternatifs (fluo kid, gabber, grunge), ils semblent venir des années 1990… ou bien de maintenant vu la certaine intemporalité de ces looks. Ils débarquent pour une nouvelle fête avec ses moments de joie, d’ivresse, de sensualité, mais aussi de violence, incarnée par une jeune femme désorientée le nez en sang. Pour cette nouvelle nuit l’enjeu de cette fête est autant de s’amuser, se désirer, que s’affronter, gérer la violence dans un espace communautaire en dehors des normes du monde extérieur.
Gisèle Vienne signe ici une version contemporaine du Sacre du Printemps, autant de Stravinksy que de Bausch, avec cette fête sauvage inspirée d’expériences personnelles de sa jeunesse. Le sous-texte narratif de son fidèle collaborateur Dennis Cooper permet d’élaborer pour chaque interprète une personnalité, une histoire, ainsi qu’entre eux, même s’il n’y a pas de dialogue audible. Le temps est multiple et retouché, il y a celui de la lumière de Patrick Riou qui capte les corps à la façon d’une photographe (Gisèle Vienne cite comme influence des photographies d’animaux captées en nocturne), celui des interprètes et de leurs vêtements, celui des mouvements tantôt ralentis, saccadés ou en boucle, celui de la musique, et celui entre ressenti et mémoire. La bande-son est une sélection techno de Detroit par Peter Rehberg, qui signe aussi avec KTL un morceau inédit qui propose une autre ambiance au sein de la pièce
Une expérience intense et sensible, que l’on vous recommande de voir si vous sortez de Rennes, la pièce n’y étant plus programmée pour le moment (à moins d’attendre son retour ?).