Rappeur contradictoire, provocateur ou incompris, nombreux seraient les adjectifs pour tenter de définir Médine. Il faudra que chacun creuse sa propre opinion; nous, on est simplement allé sans prétention voir ce que Prose élite, son dernier album, donnait sur scène le vendredi 22 septembre à l’Étage.
Le concert démarre par le rappeur rennais ABD; les deux pieds dans la trap, le son vient du Blosne et a connu un large succès, maillot du Stade Rennais à l’appui (enfin là c’était Intersport pour l’occasion) au pied des tours. C’est la merde dans un nuage de fumée, et ça rappelle que le rap finalement a peut-être juste un peu changé la bande son, pas le constat.
Mais c’est bien sûr Médine que le public est venu voir, et le terme entrée triomphale est totalement adapté; acclamé après 3 phrases, le public hurle le nom du rappeur et son succès n’est plus à démontrer. Après une projection d’images du clip où l’on voit la fameuse affiche du rappeur mélangé à la figure de Victor Hugo, il commence donc par « Rappeur de force » : « la force de la culture face à la culture de la force ».
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Medine, une entrée bien mise en scène pour rentrer dans l’arène.
Médine se pose en rappeur conscient, mais en luttant contre l’islamophobie il a fait traîner ses guêtres au côté d’individus que nous aimerions ne pas citer ici, et qui lui ont malheureusement valu comme il le déclare dans « Global » : « Numéro 1, j’suis passé du fauteuil de Newton en rotin, Au sofa d’Soral à jouer les penseurs de Rodin, J’grossis l’trait, mais pour certains ça ressemblait à ça ». Il serait donc peut-être temps de rouvrir le débat et dépasser la polémique de « Don’t laïk » pour écouter finalement beaucoup plus de points d’interrogations qu’il n’y paraît, ce que nous posions dans notre Revue de 16 printanière; et le refus catégorique de toute radicalisation comme il l’a déclaré à plusieurs reprises. Pour tous les grandes doutes où la caricature et les images simplistes ont remplacé le fond du propos, nous vous renvoyons à cet entretien accordé à Ballast en 2015, et à cette interview de l’Abcdr Du Son.
Ce n’est donc sûrement pas un hasard si parmi les anciens titres, il interprètera « Don’t panik » : lutter contre la peur, et proposer une réflexion aussi dense que le son qui envahit la salle. Le tout dans un show de haute volée : Médine a un flow implacable, servi dans une mise en scène éclatante qui participe de l’effet frontal du concert : prends-toi les punchlines dans les dents. Et apprends à frapper des mains en rythme accessoirement, ce que le public rennais aura du mal à suivre ! Son cinquième album sorti chez Din Records est défendu avec force et conviction; durant à peine plus d’une heure (seul regret) c’est une bonne claque, Médine naviguant d’anciens titres comme « Lecture aléatoire » à « Prose élite » qui rappelle que « Le rap [est] un sport d’esclave, qui porte l’espoir d’une jeunesse oubliée ». Le public lui, n’a apparemment pas zappé l’idée.