Une romance qui vire au cauchemar. Un scénario simple mais amplement mis en valeur, un film qui mêle habilement les fils des relations familiales. Perdez votre bon sens en vous laissant entraîner dans une fiction s’inspirant de faits réels.
À perdre la raison est la dernière réalisation de Joachim Lafosse (cinéaste belge) sélectionnée pour Un certain regard à Cannes cette année. Il met en scène Mounir, incarné par Tahar Rahim (la révélation d’Un prophète) et Murielle interprétée par Émilie Dequenne (l’inoubliable « Rosetta » des frères Dardenne). Ils sont jeunes, ils s’aiment passionnément. Mounir, d’origine marocaine veut épouser Murielle; il en fait part à son père adoptif, André, médecin de son état; génial Niels Arestrup dans son rôle. André apparait comme un homme aimant et aidant pour ce jeune couple qui débute dans la vie. Il propose à Murielle de venir habiter chez lui avec Mounir. Cet apparent bonheur à trois va peu à peu montrer ses limites, ses failles, son malaise. Et ce, jusqu’au dénouement final. Joachim Lafosse offre une mise en scène au scalpel, angoissante, où chaque plan couve le drame qui ne sera pas dévoilé ici. Lafosse filme au plus près des visages et révèle les sentiments enfouis en chacun de nous et arrive à saisir ainsi toute la complexité des rapports humains… Ce film dérange, indigne aussi d’une certaine manière. Il est porté par trois comédiens excellents; Tahar Rahim est très convaincant en jeune père. Niels Arestrup, effroyable en pervers manipulateur, nous rappelant son précédent rôle dans Tu sera mon fils de Gilles Legrand où il jouait déjà un personnage sadique. Il faut bien admettre que ce type de rôle lui sied à merveille. Enfin, Émilie Dequenne est littéralement bouleversante. Elle montre toute une palette de sentiments du début à la fin du film, et son personnage nous fait tirer quelques larmes. Elle a d’ailleurs reçu le prix d’interprétation féminine pour son rôle. Ce sera sûrement la prestation féminine la plus forte de l’année. Affaire à suivre. Ce film inspiré d’un simple fait divers ne laisse donc pas indemne, grâce au jeu des acteurs et à une mise en scène impeccable.