Quel périple pour aller jusqu’à l’Aire Libre en caisse où Mythos et Jean-Louis Murat m’appellent !
Les sens de l’orientation en alerte, m’égarant en cherchant la route la plus courte, n’osant pas demandé mon chemin aux passants rares, je tournicote, de ronds-points en fausses routes bordées d’autos garées, de zones artisanales désertes en cette heure en quartiers modernes taillés au cordeau dans les années 90 et 2000 – Saint-Jacques-de-la-Lande est composé de quartiers pour certains récents… où je ne mets pas souvent les pieds à vrai dire. L’au-delà de la rocade est pour moi, qui vis dans le Blosne, plein de mystères et d’étrangeté. Surtout la nuit. Entre chiens et loups. Si bien que pour ma première sortie crépusculaire en voiture – je viens tout juste de passer le permis m’autorisant à conduire ce genre d’engin – l’adrénaline coule à flots dans mes veines fragiles de citadin. Je me gare un peu à l’arrache sur des bas-côtés pour essayer de comprendre comment fonctionne le GPS sur mon téléphone. J’hésite à mettre les warnings – je ne sais plus ce qu’en pareil cas préconise le code de la route que j’ai dû ingurgiter ces derniers mois. En agglomération éclairée, des feux de position devraient suffire… Je garde les feux de croisement. Je redémarre. Pas complètement sûr de la route à prendre. Pour me détendre dans cette quête de la salle de concert où Jean-Louis Murat est programmé, j’écoute Nostalgie. Les Eagles m’amènent un peu de joie. Je repasse pour la deuxième ou troisième fois un même rond-point de la D177. Ma boussole interne commence à m’inquiéter… qui plus est, l’heure tourne. Vers vingt-deux heures, je parviens enfin à me garer à proximité du lieu ciblé. Près de l’église et du cimetière. La rue Jules Vallès n’était pas si compliquée à dénicher. Je retrouve Agathe et Isa qui sortent d’un spectacle-documentaire d’Emmanuelle Hiron sur les vieillesses et les questions qui surgissent avec l’avancée en âge. Ça me fait un bien fou de les voir. Je suis arrivé à bon port, sain et sauf, sans accrochage à signaler. Fébrile, mais vivant.
Je commande une bouteille d’eau au bar. Puis je gravis les marches et présente mon pass. Il fait chaud. Les fauteuils sont confortables. Maintenant, pour ce qui est du concert à proprement parler, entamé par le titre « Chant soviet » extrait de son dernier album Babel, la voix nonchalante de Murat fait des merveilles. « Ayez pitié de moi » implore-t-il. Son phrasé dilettante qui engloutit certains phonèmes convient bien à sa poésie tranquille et sans paillettes. « Que vas-tu faire à minuit, seul, dans la forêt ? », « Nous n’irons plus au bois, ma mie, les lauriers sont coupés », « Il se rêve roi de Suède et de Sibérie »… Les mots font mouche – certains se font même frelons d’Asie – sans qu’on sache trop ce qui est ciblé. C’est la magie du verbe. Les phrases flottent, coulent, volent… Sa Fender scande des ballades rock-blues. Un batteur habile, un bassiste-contrebassiste barbu et un élégant musicien aux claviers épaulent l’Auvergnat errant. Ça passe bien. Le public est content. Moi aussi.
J’écoute Rod Stewart sur Nostalgie en rentrant.