Il est rare que des films secouent aussi violemment que l’affaire qu’ils décrivent. Présumé coupable de Vincent Garenq reprend l’affaire d’Outreau en adaptant à l’écran l’histoire d’Alain Marécaux et celle de sa famille.
Une plongée aux enfers, une introduction de film vertigineuse qui débute comme un cauchemar dont personne ne sortira intact. Inutile de revenir sur ce célèbre procès, tout au plus faut-il se remettre rapidement les faits en tête. Pour le reste, il suffit de suivre la caméra de Vincent Garenq. Et de souffrir avec Philippe Torreton qui tient le rôle principal et nous livre une performance exceptionnelle et profondément humaine. La première demi-heure est étouffante, assommante ; arrêté pour des faits qu’il ignore, qui le dépassent, Alain Marécaux se démène comme il peut jusqu’à l’intervention de celui qui va l’épauler durant quatre ans, son avocat Hubert Delarue (Wladimir Yordanoff). S’ensuivent un cumul de scènes dans l’univers carcéral et judiciaire qui rendent l’histoire à la limite du supportable.
Là où Présumé coupable frappe fort, c’est qu’il s’attache à rester en huis clos dans les méandres de la justice : commissariat, interrogatoires, bureau du procureur, cellule de prison, camion de transfert, tribunal. Des lieux fermés en permanence, rendant encore plus forte l’image d’un parcours désespéré et sans aucune issue de secours, ni même un interstice vers les proches et la famille ne peut être obtenu. Le parcours dure alors quatre ans jusqu’à l’acquittement final ; la fin du film ne soulage pas pour autant de la douleur qu’il a réussi à dépeindre pendant près de deux heures.
Détaillé, réaliste, Présumé coupable souligne les failles du dossier et pointe du même coup les erreurs de la justice qui est bien loin d’être infaillible ; le cinéma français a continué ces dernières années à s’intéresser à des affaires judiciaires, depuis L’Affaire Dreyfus de Méliès (1899 !) jusqu’à Omar m’a tuer de Roschdy Zem sorti alors quelques mois plus tôt. Mais ce film-là prend un écho particulier, s’éloignant de la simple peinture de faits divers comme L’Adversaire (Nicole Garcia 2001) car l’affaire d’Outreau a été un véritable raz-de-marée dans l’actualité, marquant beaucoup d’esprits à une échelle nationale, mais surtout montrant des dysfonctionnements judiciaires et des abus médiatiques toujours contemporains.
Verdict (si l’on peut se permettre ce terme) : un film réussi sur un sujet de société et un évènement difficile, et des prestations d’acteur remarquables.