Samedi 6 avril au Cabaret Botanique du festival Mythos, c’est la pianiste-chanteuse-interprète-trublionne des mots Juliette qui était attendue. Un régal verbal et musical qui a fait oublier la pluie pendant plus d’une heure.
« Chère Juliette,
c’est avec joie que nous avons reçu votre invitation au grand banquet de votre tournée concernant l’album J’aime pas la chanson. Nous non plus, pas trop, du coup nous avions envie de procrastiner sur cet article et le reporter au mois prochain; déjà parce que prendre en photo des pianistes et musiciens jouant face à un public concentré, presque studieux, n’est pas une mince affaire et que nous préférons travailler dans des conditions confortables. Ensuite parce qu’après vous avoir écoutée, l’usage des mots nous paraît être une entreprise olympique. Enfin, nous ne parlons pas turc. »
Voilà comment aurait commencé notre article si nous avions eu l’audace, tout comme Juliette, qui ose déclarer, et même afficher sur scène, « J’aime pas la chanson », de poursuivre sur ce ton-là. Si vous arrivez à poser vos doigts au hasard sur le clavier du piano et que « ça fait des trucs jolis », rien n’est moins sûr via notre Azerty. Alors nous avons écouté, attentivement, ou plutôt avons vécu, ce spectacle. Car Juliette sur scène avec ses musiciens, ça n’est pas uniquement un concert. Tout va au-delà, avec une louche d’auto-dérision, un kilo (voire plus) d’humour, un renfort d’accessoires, avec une moustache ou une corne de brume qui a transformé en un simple tournemain la salle en match de rugby. Allant même jusqu’à plaisanter allègrement sur les cloches de l’église Saint-Melaine (et les bonnes ouailles qui vont avec). L’art de l’improvisation et de l’introduction.
Face à des titres légers sur la procrastination, ou se spécialisant dans le développement de la mélatonine pour un texte grinçant sur l’insomnie, Juliette sait aussi dérouler un spleen que ne renierait pas Barbara sur le sensible et très bien arrangé « Météo marine ». « Si on pleure encore, c’est qu’on est perdu ». Sauf qu’avec vous, Juliette, on rit, d’un rire salvateur de votre talent entre gouaille et poésie, on rit d’un « pas féminine » dédié à Yann Moix, on sourit tendrement de votre longue histoire « à carreaux » concernant vos lunettes ou de cette chanson qui dort encore dans le piano. Alors le public, conquis, en redemande. Au point de ne pas vouloir vous laisser aller fumer votre clope. Il est vrai qu’après un concert de Juliette, on a pas envie de quitter cet univers unique. Vous n’aimez pas la chanson, vous avez bien fait de venir le prouver à ce festival des arts de la parole.