Les gros maux de Daria Marx et Eva Perez-Bello

Parmi les discriminations que doivent endurer nombre de personnes il y a la grossophobie, soit le rejet et la haine envers les personnes grosses. Ce mot est enfin entré dans le dictionnaire, ce qui permet de faire connaître davantage cette oppression. Daria Marx et Eva Perez-Bello sont deux des voix les plus importantes en France sur le sujet via leur collectif Gras Politique. Leur ouvrage « Gros » n’est pas un gros mot dresse un constat précis et urgent de la situation pour faire avancer les mentalités.

 

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« Si vous n’êtes pas gros, vous êtes certainement grossophobe par défaut. Vous avez été élevé dans une société qui vous apprend que les personnes grosses ne sont pas des modèles, que l’état gros est détestable . Vous reproduisez donc les schémas sans vous poser de question, c’est compréhensible. Il n’est jamais trop tard pour changer ! Commencez par interroger vos représentations des gros. »

 

Dans une société qui vante la volonté et le contrôle de soi dans chaque domaine de l’existence, une vision très normative du corps en particulier celui des femmes, l’amour de la bouffe et aussi des restrictions alimentaires après les fêtes de fin d’année et avant l’été, les personnes grosses font tache. L’obésité est la seule maladie où l’on attaque ses porteurs et pas les causes (à part peut être le Sida, encore jugée comme la punition des personnes droguées et homosexuelles pour nombre d’esprits malveillants et réducteurs, mais c’est un autre sujet). Il suffit de traîner un peu sur les réseaux sociaux et lire les commentaires sous la photo d’une personne grosse et/ou qui parle de grossophobie pour constater les réactions souvent violentes qu’elle suscite.

 

« Un jour j’ai compté le nombre de remarques vis-à-vis de mon poids en 24 heures. Quand je suis arrivée à 16, j’ai arrêté. » Amandine, 34 ans

 

504099-gros-n-est-pas-un-gros-mot-sortie-le-23-622x0-1Pourtant l’obésité touche de plus de plus de personnes, il serait donc temps de se poser les vraies questions sur la cause et adapter la société, à commencer par les mentalités. Ne plus projeter des stéréotypes tous plus injustes voire destructeurs sur les personnes grosses, leur permettre de facilement sortir de chez elles, prendre les transports en commun, travailler, s’habiller, être soignées, utiliser une contraception, avorter, faire un enfant et accoucher, arrêter de les pousser vers la chirurgie à tout prix, ne plus subir des blagues vaseuses, renouer un rapport sain avec l’alimentation pour les personnes atteintes de troubles avec celle-ci. Ce n’est pas « faire la promotion de l’obésité » que de réfléchir à avoir un comportement le plus bienveillant possible, trouver des solutions politiques, vivre en paix avec son gros corps.

Ce livre se veut pédagogique et militant, les arguments sont clairs et sourcés, avec beaucoup de témoignages pour les illustrer. Son bas prix est un choix des autrices pour qu’il soit diffusé auprès d’un maximum de personnes.

 

« La grossophobie ne fait pas maigrir. Le surpoids est un problème bien plus complexe que ce que l’on veut bien nous présenter et l’obésité est une problématique mondiale qui ne va pas disparaître demain. »

 

L’année dernière, Gabrielle Deydier a publié On ne naît pas grosse, une enquête sur l’obésité et la grossophobie qui marquent sa vie, citée dans l’ouvrage précédent puisqu’il fait déjà référence. Son témoignage décrit de multiples étapes connues par les personnes grosses : problèmes de santé et errance médicale faisant grossir, pauvreté ne donnant pas forcément accès à de la nourriture dite saine, troubles mentaux et alimentaires, chômage et précarité. A lire avant ou après « Gros » n’est pas un gros mot.

 

« J’ai touché les limites du supportable ; je ne veux plus avoir honte de ce que je suis. Ma vie est une survie, une expérience radicale, une cavale. »

 

Daria Marx et Eva Perez-Bello, « Gros » n’est pas un gros mot, éditions Librio, 128 pages, 5 euros, paru le 23 mai 2018

Gabrielle Deydier, On ne naît pas grosse, éditions Goutte d’or, 160 pages, 15 euros, paru le 15 juin 2017

Daria Marx a récemment été invitée par Lauren Bastide dans son podcast La Poudre.

Un autre témoignage audio : l’histoire d’Ayoub à écouter dans le podcast Transfert.

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