La Revue de Seize #18 [mai/juin]

Avis de tempête, L’Imprimerie Nocturne risque d’être fortement inondée par les ondes. Joe Lucazz, Mani Deïz, Lucio Bukowski, Lonepsi, Damso et Senamo ont deversé tour à tour leurs verbes sur des albums bien distincts. De vraies play ouvertes qu’il va falloir vite reboucher ! Une actu musicale lourde, très lourde comme Médine au Bataclan. Comme Macron au RSA. Comme Aquarius chez visages blancs. Comme Coupe du Monde sans trucage. Comme Revue de Seize avec présent. Comme une logique implacable ! En bref, profitons du vacarme ! Enjay ! 


revue-seize-bandeau


« Les jeunes d’aujourd’hui m’ont dit :
« Dems, on veut la montre, fuck le temps »
Pensant qu’le temps court après la montre
Sauf que les aiguilles s’arrêtent avant »

[60 Années] Damso


Ça Vient De Sortir ///


  • Lucio Bukowski & Mani Deïz - Chansons

chansons-lucio-manideiz« L’histoire de ta vie n’aura jamais l’Goncourt ». Ça commence par une intro des plus sombres. Étrange quand on pense au titre de l’album. Chansons. Ça sonne guilleret Chansons. Surtout en matant le sosie de Michel Polnareff, bonnet noir vissé sur la tête et veste rouge impec’ en plein sur la pochette. Chansons. Terme très généraliste. Depuis quand le hip-hop fait de la chanson ? Mauvaise question. Chansons. « Texte mis en musique, souvent divisé en couplets et refrain, destiné à être chanté ». Définition. Alors c’est quoi ce bordel finalement ? Il y aura du chant ? Un élément de réponse : « Les Corbillards ne payent pas de parcmètre ». C’est clair, net et précis ! Produit de nouveau par Mani Deïz (comme à l’ancienne dirait l’autre), L.B balance de nouveau de l’huile sur « Le Feu de Singes ». Le Lyonnais prend ce petit recul nécessaire ou fait ce petit « Pas de côté » pour ré-appuyer sur la détente là où ça fait mal. Comme sur « Monde Libre » avec Mai 68 en ambiance de fond et en hommage à ceux et celles qui se sont rangé·e·s. Avec Ol Zico et Swift Guad pour pousser la chansonnette, Chansons n’entre toujours pas dans une case. Avec Swift Guad en Super Saiyan sur « Eurêka », ceau-mor très réussi au passage ou avec un Mani Deïz tranchant et poursuivant sa montée en puissance en tant que parolier, on ne peut pas calculer en avance leurs coups. « Face aux coups durs, Instagram ne sauvera pas tes potes » entend-on sur « Oppenheimer ». Il ne manque plus qu’un peu d’effet de voix, un clip censuré par YouTube et le tour est joué. C’est le cas avec « Sale Putain ». Un titre provo mais avec de belles dédicaces aux non-affranchis qui revendiquent l’inverse. Ce titre remet aussi en place ceux qui n’aiment pas l’auto-tune sans chercher à comprendre, ceux qui disent que c’était mieux avant, ceux qui balancent leurs avis à tout bout de champs en commentaire. La liste est longue. Alors après tout ça, on sait pourquoi L.B sera toujours celui qui « n’aura pas de chroniques dans Télérama ». Il ne s’en plaindra pas. Chansons, j’crois que c’est finalement des tombes à rouvrir ou des grands trous à creuser jusqu’à l’éternité. Là où le profane s’incruste et le sacré s’invite. Alléluia. Tous en cœur !

  • Joe Lucazz & Char – Paris Dernière

joe_lucazz« Le seul mec en robe que je respecte est maître Abitbol ». Alors que résonneront les hymnes à la Coupe du Monde de football, Joe Lucazz chante un hymne à l’amour de Paris avec Paris Dernière. Cela ne vous rappelle rien ? Sûr·e·s ? Bon d’accord ! Avec 20 titres, tout comme le nombre d’arrondissements à Paris, Joe Lucazz s’invective sur les ambiance musicales de Char. 20 titres dont « s’invitent » plusieurs rappeurs venant également des différents secteurs. Comme Paris est grand par la taille comme la tour Eif’, il est évident que refaire la superficie de Panam’ en chansons peut-être long en solo. Alors Hyacinthe, L’Indis, Nakk, Majster ou Hifi pour ne citer qu’eux, élèvent les décibels pour décrire ses purs produits de l’environnement de titis parisiens. Ça donne un mélange de jeunesse et d’anciennetés, de codes, de road-trips nocturnes aux chemins différents. De « 23 grammes » au superbe titre éponyme, de « Bleu Nuit » à « Nuage Noir »,  il n’y a pas vraiment de quoi crever la dalle sur Panam’. Façon de parler évidemment ! Car des zones d’ombre subsistent dans la ville lumière avec des mystères et des ambiances qui en font une capitale vraiment particulière. L’album est d’ailleurs entrecoupé par des petites scénettes avec des commentaires audio de Joe, ce dernier s’appliquant à retranscrire ses vibes, parfois avec une certaine ironie. « Révolution place République, trop bobo, j’ai des relents de Mai 68. » Tantôt rider, tantôt « JMF » (Je m’en foutiste), Joe Lucazz ne loupe l’occaz de défier les étiquettes sur les Parisien·n·es. À part ça ? Il est bon de noter que Hyacinthe surprend son monde sur « 15h du mat » dans un personnage qui lui correspond bien, là où la jeunesse festoie « tard la night ». Hé oui « mimile » ! L’espace et le lieu prend une place prépondérante dans Paris Dernière ! Que ce soit les rues de Panam’ la nuit, les boîtes de nuit, les métros, les bars… aucune miette n’est laissée ! Jusqu’à terminer sur une note allant totalement à contre-pied du fil conducteur, comme Zizou avec un « Paris je te hais ». Qui aiment bien châtie bien  ? Vérifie-le par toi même « mimile » !

  • Lonepsi – Kairos (EP)

kairos« Tengo miedo como Neruda. » Changement de rythme et de jeu de jambes pour Lonepsi. Fort de son succès avec son premier album Sans dire adieux, le « rappeur pianoteur » remet ça avec un 5 titres nommé Kairos. Signifiant « moment opportun », le rappeur a semblé flairer le bon coup pour s’engouffrer dans une brèche aussi infime soit-elle : la quête du temps. Accompagné toujours de ce même enfant aux cheveux noirs qui nous tourne le dos, comme l’illustre la pochette de l’EP, Lonepsi semble accélérer la cadence par rapport à son précédent opus. Le bpm démarre souvent fort quand autrefois la douceur du piano ralentissait les mœurs. Sans oublier non plus que la machine reprend une place centrale aussi. La preuve avec le premier morceau, le ô magistral « Neruda ». Avec un texte inspiré du poème « Tengo Miedo » du même auteur, Lonepsi dévoile ses peurs « d’un dernier regard » qui peut pousser à l’angoisse. Éloigné de la punchline, Lonepsi s’inspire certainement de ses études en psychologie pour creuser autant l’introspection. Du fond de sa grotte, la voix du Parisien est comparable à un serpent arpentant les mots là où le flow retombe parfois à certains endroits qu’on ne peut soupçonner. Un exemple ? « Ressens » où la transition et l’articulation des syllabes semble être un pur exercice d’équilibriste. Sur « Les fleurs de l’ombre », le rappeur s’approche de thèmes classés dans la catégorie « affaires sensibles », tellement ça nous touche de près. Oublier ce qu’on peut ressentir, retracer la ligne du temps, se remémorer ou fuir pour de bon, les thèmes pleuvent et posent des sacrées questions perso. Alors, opportuniste Lonepsi ? Comme lui, nous avons « peur comme Neruda ». Beaucoup moins pour l’écouter une seconde fois. Une seconde ! Je n’ai dit qu’une seconde fois ? J’ai déjà oublié…

  • Damso - Lithopédion

damso-lithopedion« C’est rien de bien méchant. Il m’a juste traité de négro des champs ». « Le lithopédion est un fœtus issu d’une grossesse extra-utérine non arrivée à terme, et qui est mort sans avoir été expulsé » (source : Wikipédia). Il est de retour ! Et dès l’introduction, Damso agresse en position de légitime défense. Doué d’une technicité qui mérite une palme d’art, que ce soit dans les intonations et les structures de rimes, Dams’ est l’un des artistes francophones les plus prisés du moment. Après Ipséïté et Batterie faible, c’est avec 16 titres et des bonus track qu’il vide son « chargeur surchargé ». Et c’est lorsqu’on entame le second morceau avec ces chants raccordés sur le beau « Festival de rêves » qu’on aperçoit la profondeur du type. Osant même affronter les chœurs au mot « bedo », là où la drogue prend des allures de 7e ciel. Benjay a juste fait un morceau ouffissime ! « Faut croire en Dieu, mais surtout croire en soi. Car Dieu ne connaît pas la mort. » Polémiste à ses heures perdues là où l’imbécile ne regarde que le titre quand il faut viser le contenu, « Baltringue » fait référence à ceux qui ne s’assument pas ou se fuient. Les âmes sensibles se heurteront aux premiers icebergs, ceux-ci arrivant très vite. La suite ? Des airs de suicide, de propositions incestueuses et « Julien » qui aime les gosses : une autre surprise musicale de taille ! Avec un texte empli de « pada pada pada », une voix féminine représentant Julien, une allégorie de la maladie incurable et une prod totalement décalée de d’habitude. Pour l’anecdote, Damso serait sorti de son corps en réécoutant cette prod où l’inspi’ ne venait pas. Peu habitué aux featuring, Angèle sera l’unique collaboration sur « Silence ». Le Belge pose des réflexions subtiles avec une simplicité étonnante. En l’écoutant, on peut se demander jusqu’où la pudeur s’exhibe ? Damso répond peut-être « Aux paradis », au pluriel et dans une ambiance festive. Celui qui aurait dû porter l’hymne national de la Belgique à la Coupe du Monde continue de porter « NMI » sur son dos. Et NMI à l’envers, ça fait…? « Perplexe« ,  y a quelque chose de Shinja Ikari dans Damso. Quelque chose de naïf et d’enfantin dans le rapport à la sexualité, menant inlassablement à l’auto-destruction. « Tu fuis la mort, tu fuis la vie, tu fuis toi-même ». On soulignera les morceaux « Noir meilleur » ou « Tard la night » pour ajouter le grain de sel qui fera de l’écoute de cet album un moment particulier. En position fœtale pour mieux se défendre. Toujours.

  • Senamo – Poison bleu

senamo-poison-bleu-ep« Mal luné, fuck l’horoscope. » Dernièrement, il avait tapé fort avec La Smala et 11h59. Cette fois-ci, Senamo est presque à l’heure pour Poison bleu, un huit titres qui s’est fait attendre depuis son dernier projet solo en 2013. On rentre directement dans le vif du sujet avec le morceau éponyme dès la numéro un, oui monsieur ! Efficace, avec des petits gimmicks en forme de « ya ya ya ya » , on comprend vite que l’album tourne autour d’une allégorie de la consommation et de ses conséquences néfastes. Influencé par la sauce belge Jeanjass et Caba sur le second morceau avec « C’est mon boulot », c’est accompagné de Roméo Elvis qu’ils poussent la chansonnette en mode divertissement. L’introspection est de mise aussi dans le rap de Senamo, notamment sur « Violence & volupté ». La prod et les rimes poussent à la curiosité car originales. Un titre marquant, peut-être la meilleur de l’album ! Avec Youv Dee sur « Toujours la même » sur une prod à contre-courant en mode « clubber », les deux compères s’en sortent très bien sur une ambiance peu évidente à rapper. Honnêtement, c’est réussi. Nous vivons une ère où tous les types musicaux peuvent se rapper tellement les flow peuvent s’adapter. C’est confirmé ! « Tête qui bouge n’amasse pas mousse » selon une très vieille expression à l’ancienne. C’est sur « Maladie macabre » que Poison bleu prend définitivement toute son ampleur. Comme un pied de nez à son album, le Belge termine avec « Antidote ». Pour un contenu… tout aussi surprenant ! Des ambiances changeantes, des tonalités et des flows différents, alors que pourtant, « y a Rien qui change ». Senamo met ainsi sur feuille la culpabilité qu’on ressent par rapport à ses addictions et toutes ses humeurs qu’il se doit d’affronter. Et même la culpabilité se fume ! Poison bleu est un album à ne pas prendre à la légère malgré le poids des maux. Des maux qui se libèrent à force de les dire. Poison bleu ou comment croquer la pomme dans l’innocence. Attention à la descente, la pente est fragile. C’est la vie ! 


« J’en ai rien à foutre, d’la survie d’l'espèce
Dans mes messes basses, j’te parle que d’chaos et d’apocalypse
Parmi vous, y a-t-il un fils de porc qui vote encore ?
Non, la plus belle quenelle fut socialiste »

[Salto]  Mani Deïz


Les Autres Albums [En Un Clip] ///


Demi Portion – Super Héros / Ol’Kainry – Poneglyphe / Caballero & JeanJass – Double Hélice 3 / Biffty & DJ Weedim – La Potence / Despo Rutti – Artefacts Vol. 4  / Vegedream – Marchand de sable / Les Alchimistes – Antisocial / Sheldon - RPG / Kemmler - Rose / Moha La Squale – Bendero / Jok’Air – Jok’Rambo



« C’est pas nouveau qu’ils comprennent rien, j’ai plus d’espoir pour eux
C’est dur des fois tout seul, si j’continue, c’est pour les miens
J’suis pas très sain d’esprit, p’t-êt’ qu’ils iront au Paradis
Tant pis pour tous les imbéciles qui changeront pas d’avis »

[Violence & volupté] Senamo


Ça Va Sortir Bientôt ///


  • 22.06 : Kekra – Kekraland
  • 19.06 : Laylow – .RAW
  • 22.06 : Changerz – Identiques
  • 22.06 : Kekra – Land
  • 22.06 : MMZ – Trop N’DA
  • 29.06 : VSO – Kintsugi
  • 29.06 : Take A Mic – Avant-Gardistes
  • 29.06 : La Chronik (Beni & Will) – Rien à personne
  • xx.06 : Lucio Bukowski – Aucun potentiel commercial 2
  • xx.06 : Rezinsky – Mal Poli
  • xx.06 : Didaï, Lucio Bukowski & Zippo – Bouteille, essence, chiffon
  • 06.07 : Dosseh – VIDALO$$A
  • 13.07 : Guizmo – Renard

Le Clip Rennais ///


D’un côté Jimmy Jay. A-t-on besoin de le présenter ? Producteur des premiers albums de MC Solaar, entrant dans la légende pour « Qui sème le vent » et surtout « Prose combat ». De l’autre Napoleon DaLegend, rappeur qui impose de plus en plus le bout de son nez. Et entre les deux ? Luc « The Chief » Chiefare, le réalisateur du clip. Un artiste rennais qui se met en mode New York, lieu du tournage du clip. Alors profitons-en pour croquer la pomme depuis Rain City ! Enjoy !

Ça Groove Sur Rennes !


Au 1988 Live Club :

      • 16.06 : Back 2 The Days : Dj Hustler + Dj Lordmike

      • 23.06 : Shimmy Shimmy Yo ! Summer Time Party #3

      • 26.06 : Freeze Corleone & Norsacce Berlusconi

      • 29.06 : Danitsa x Dj Looping x Sear Cabe

      • 17.11 : Necro x DJ Marrrtin

Au Bar Hic :

      • 05.07 : Ceschi + Team Plyers All Stars


« L’impossible à dire parce que pénible à entendre
Est une vague qui heurte mon navire
Le dur à prononcer parce que cruel à admettre
Est une vague qui heurte mon navire
« 

[Les vagues du silence] Lonepsi


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