The smell of us, de Larry Clark : entre testostérone et sodomies tarifées, pas facile de chroniquer ce panorama d’une jeunesse parisienne aux démons indomptés.
Peaux tatouées et prostitution lucrative ; drogues qui se fument ou se sniffent ; flasques de whisky pour oublier les excès et les errances de la veille ; Viagra, coke ou somnifères pour les riches client·e·s de Math (Lucas Ionesco) et JP (Hugo Behar-Thinières) ; cigarettes roulées ou pas ; bières et vins dégoulinant sur les mentons ; vandalisme ; rackets ; sauvagerie d’une bande d’ados flirtant avec les limites et avec les interdits et les normes à abattre ; Bob Dylan et John Lee Hooker ; escort-boys cyniques et clientèle friquée vaguement repoussante ; amitiés trahies ; parents débordés ; adolescents paumés et adultes hors-jeu ou pervers qu’un gouffre sépare ; argent « facile » et nuits de débauche endiablées ; pornographie sur Internet et skate-board dans les rues et squares parisiens ; sexualité débridée et genoux écorchés… Larry Clark saisit l’énergie d’une jeunesse incontrôlable, ultra-violente, qui se déchaîne, picole, pille, brûle, filme ses ébats et ses exploits à coup de smartphone. The smell of us sent la sueur et le tabac froid, la pisse, le sperme, le gel douche pour effacer tout ça et la peinture en aérosol – sans parler des simples effluves des corps d’éphèbes filmés à hauteur de caleçon par un Larry Clark qui a le sens des cadrages guidés semble-t-il par les hormones épidermiques et le goût du réel.
La folie et la beauté de la jeunesse irresponsable, le sexe et la honte, l’amour et l’impuissance, les névroses et la liberté, la chair et les vices : au-delà de la pudeur et de la morale, Larry Clark aborde la vie sous le prisme de contrastes violents. Les humains sont filmés sans concession, leurs fétichismes pitoyables dévoilés. Les uns sont des prédateurs, les autres des victimes poussées au désespoir, mais ça vit, ça souffre, ça sanglote, ça gémit, ça endure, ça sue, ça tente, ça expérimente, ça fait peur ou pitié. Dans cette fange et ces exubérances, la grâce, la puissance de l’indécence et le burlesque surgissent. Effets comiques alors garantis.