Pippo Delbono, la folie sur les planches

Metteur en scène italien reconnu, Pippo Delbono présentait à Rennes lors de la 16ème édition du festival Mettre en scène sa nouvelle création, Dopo la battaglia (Après la bataille). Un cri de révolte qui a bouleversé une grande partie du Triangle.

Enfermement – Isolement – Poésie – Hommage – Chœur – Souffrance – Folie – Journal intime – Danse – Défouloir – Antonin Artaud – Kafka – Schizophrénie constante – Bordel – Cabaret. Voilà les premiers mots qui viennent après avoir vu ce spectacle, quelque part entre le théâtre et la danse, et présenté comme suit par le metteur en scène :

« Pour ce spectacle j’ai pensé à un lieu vide, comme cette pièce vide, mémoire des horreurs passées, qui, cependant, portent encore les signes, les couleurs, les odeurs des prisons. Mais, j’ai aussi pensé à l’esprit vide, après le cri de la passion, de l’amour, de la rage, de la douleur. Un besoin de lucidité après la folie. » Pippo Delbono

C’est enfermé dans une scène aux allures de cellule psychiatrique que Pippo Delbono nous livre sa nouvelle création, voire se livre lui même. En effet, l’espace scénique encadré de hauts murs grisâtres donne lieu à une succession de scènes dans lesquelles le scénographe souhaite rendre hommage aux gens qui l’ont touché : de Franz Kafka à sa mère disparue depuis peu, en passant par Antonin Artaud (écrivain et théoricien du théâtre) ou encore Pina Baush (danseuse contemporaine récemment emportée par la maladie) ainsi que ses comédiens : Bobo, être rencontré dans un hôpital psychiatrique, y ayant vécu 46 ans, Nelson Lariccia, ancien sans abri. Pour se faire, il nous donne à entendre et à voir des cris de folie, des bribes de discussion avec sa mère, des images illustrant selon lui la misère de l’homme et, par extension, sa folie, les traumatismes qu’on lui inflige et qu’il inflige par la suite, laissant alors sur nos routes cadavres et fantômes que l’on n’ose regarder, de peur qu’ils ne nous demandent de leur venir en aide, ou par peur de l’image de nous-mêmes qu’ils pourraient nous renvoyer. La scène se retrouve alors être une sorte de défouloir, un extrait du journal de son créateur, un lieu sur lequel règne une schizophrénie constante mais tout de même gérée par Pippo Delbono présent comme narrateur, commentateur, comédien, faisant des allers et venus entre son bureau, installé au milieu du public et la salle. Cette rupture de la frontière imaginée par le public entre lui et la scène nous amène dans une relation plus intimiste avec l’auteur, adoucit le cadre froid de la représentation et la dureté du sujet, le tout porté par des textes d’une poésie et d’une justesse de qualité. Pippo Delbono réussit sa création avec succès, laissant derrière lui un public debout, ne pouvant rompre ses applaudissements, ému aux larmes ou emporté par une joie soudaine et inexplicable, laissant derrière lui très peu de mécontents.

Le site de la compagnie Pippo Delbono

Dopo La Battaglia – Un spectacle représenté du 14 au 17 novembre au Triangle – Rennes

avec Dolly Albertin, Gianlucà Ballaré, Bobò, Pippo Delbono, llaria Distante, Simone Goggiano, Mario lntruglio, Nelson Lariccia, Marigia Maggipinto, Julia Morawietz, Gianni Parenti, Pepe Robledo, Grazia Spinella avec la participation de Alexander Balanescu musiques originales Alexander Balanescu décors Claude Santerre costumes Antonella Cannarozzi lumières Robert John Resteghini traduction Christian Leblanc son Angelo Colonna, Corrado Mazzone lumières Orlando Bolognesi régie plateau Gianlucà Bolla vidéo Mattia Manna habilleuse Elena Giampaoli responsable de production Alessandra

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