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The Lobster, de Yórgos Lánthimos

The Lobster : un film d’amours de Yórgos Lánthimos sur les absurdités qui nous régissent ou nous hérissent.

 

Si le homard genre Homarus (« lobster » en anglais) est un plat de fête chic et prisé par certains gourmets, The Lobster du Grec Yórgos Lánthimos est lui aussi un mets raffiné qui conviendra aux cinéphiles exigeants. Ils y trouveront :

– Un monde onirique digne du Chien Andalou de Luis Buñuel (1929) ;

– Des bruitages ludiques de lancers de fléchettes soporifiques (« swifp ») qui n’auraient rien à envier aux silencieux (« pôp ») qui rythment les combats dans Les Tontons Flingueurs de Georges Lautner (1963) ;

– Des longs couloirs dans un « Hôtel » mystérieux où sont cantonnés les Célibataires qui ont 45 jours pour y trouver l’âme sœur (sans compter les jours de bonus que les pensionnaires véloces peuvent obtenir à condition d’abattre des Solitaires avec leurs fléchettes lors des chasses organisées quotidiennement) – couloirs qui ressemblent à ceux de l’hôtel Overlook dans Shining de Stanley Kubrick (1980) ;

– Et plein d’autres détails d’anthologie…

Irons-nous par exemple jusqu’à voir dans la moustache du héros, à savoir le pensionnaire de la chambre 101 (Colin Farrell), un rappel de celle de Joachim Phoenix, dans Her de Spike Lee (2013), qui, moustachu à lunettes lui aussi, errait à la recherche de sa moitié ?

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En tout cas, The Lobster, c’est l’histoire d’un monde étrange où les hommes n’ont qu’à bien se tenir sinon ils sont illico réincarnés en animaux. Où des castes étanches découpent la population en catégories crispées (Célibataires, Couples et Solitaires). Où tout est codifié, fliqué, surveillé. Où la coercition barbare est érigée en norme intégrée et plutôt bien acceptée par chacun – quiconque brave l’interdiction de se masturber est châtié sévèrement, la main coupable étant placée avec autorité dans un grille-pain allumé… Quiconque dans la forêt des Solitaires brave le tabou du baiser se fait cisailler les lèvres… Quiconque déplaît à telle chef de ce même clan (Léa Seydoux) se fait crever les yeux…

Les lois qui régissent l’univers de The Lobster sont très proches des nôtres, mais les curseurs sont décalés de quelques crans (ces crans, peut-être, qui séparent l’acceptable de l’intolérable), si bien qu’une réjouissante ambiance surréaliste (par définition très insolente) baigne cet admirable opus cinématographique.

La vie est rude et absurde dans The Lobster. En comparaison, dans notre monde, la vie pourrait sembler douce et très cohérente. Mais ce qui lie ces deux mondes, ce sont bien les comportements des êtres, tantôt sournois et soumis, guidés par des préjugés et des veules hiérarchies, tantôt rusés et emplis de détermination lorsqu’ils sont guidés par la liberté… ou par l’amour (qui rend aveugle).


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The Lobster, film hélleno-britannique de Yórgos Lánthimos – Avec Colin Farrell, Rachel Weisz… – Sortie le 28 octobre 2015 – Durée : 1h58 – Prix du Jury au festival de Cannes.

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