Florian Mona au festival Travelling : un ciné-concert surf et pop

Soixante-quatorze jours. C’est la période qui s’est écoulée, à ce jour, depuis l’annonce de la (re)fermeture des cinémas le 30 octobre 2020 (sans compter le flou des lieux de rassemblement non dédiés à l’achat de marchandises). Deux fois trente-sept jours que l’on se passe de contacts et de découvertes vivantes dans les salles obscures. Qu’à cela ne tienne : le rendez-vous annuel cinéphile du festival Travelling maintient le cap, avec une programmation inspirée et généreuse, et même quelques performances live à l’affiche.

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Comme tous les ans, l’association Clair-Obscur travaille à préparer une sélection de films en lien avec une thématique urbaine, et une destination où emmener les spectateurs en voyage. Cette fois-ci, c’est la Nouvelle Orléans que le public est invité à découvrir : ville créole aux innombrables influences, qui résonne de musique et de mélancolie. Au programme, des pépites à découvrir ou à revoir, comme Un tramway nommé désir, Easy Rider ou Les bêtes du Sud sauvage, des avant-premières, des compétitions de films ainsi que des expositions et même – osera t-on y croire ? – des concerts. Difficile d’imaginer une édition sur la Nouvelle Orléans sans musique live !

 

En ce début janvier, le Jardin Moderne accueillait donc Florian Mona pour une résidence de création, autour d’un ciné-concert : A scene at the sea de Takeshi Kitano, programmé pour le festival. Durant ces quelques jours, le multi-instrumentiste rennais, accompagné de Pierre Lucas, a développé la composition d’une bande-originale live pour un des films les plus contemplatifs du cinéaste japonais. Ni gangsters, ni yakuzas dans cet opus : Shigeru est sourd-muet, il travaille en tant qu’éboueur et ramasse un jour une vieille planche de surf abandonnée. Il la répare et fait ses premières tentatives, pour très rapidement se dédier à sa nouvelle passion, sous l’œil attentif de son amie Takako, sourde et muette elle aussi. Aux phases de dialogues entre les autres surfeurs, les vendeurs de planches et les gamins du quartier, succèdent de longs passages silencieux, où le mutisme des deux jeunes gens laisse toute la place à la mer, au son des vagues, aux tableaux formés par les vastes étendues de sable et la silhouette des gens qui s’amusent, s’entrainent ou se promènent sur la plage.

 

 

Une atmosphère idéale pour les nappes oniriques jouées par le duo, dont les claviers enveloppent les silences et y donnent de la profondeur : « Il y a tout ce que j’aime chez Kitano, une alliance de contemplation et de poésie » nous dit Florian Mona. « Le cinéma alimente beaucoup ma musique : il m’arrive souvent de mettre un film sans le son et de composer dessus, un peu comme quand tu mets un casque sur tes oreilles et que tu fais un voyage en train. Je suis très touché par les images et le mouvement, comme on peut retrouver chez Gus Van Sant par exemple ». La musique vient en effet accompagner les gestes, les émotions, les regards ; le dialogue muet qui se joue dans le couple s’exprime à travers les différents mouvements de la composition, qui déferle comme des rouleaux.

 

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Encore quelques semaines et le spectacle pourra être joué, dans sa version finale, lors du festival Travelling. Artistes et organisateurs travaillent dans l’hypothèse d’une réouverture des lieux de culture début février, tout en s’attendant à des revirements de situation en fonction des directives gouvernementales. Les créateurs doivent s’adapter : « En ce moment je me consacre à des projets en créa : l’album, le ciné-concert… Tout ce temps, je le passe à créer pour que, quand enfin on pourra sortir de chez nous, je puisse reprendre le live. On n’a pas d’autre choix. »

On peut sentir à quel point ces voyages de l’imaginaire sont « essentiels », dans une période où les corps sont contraints et où les déplacements sont réduits. À dans un mois, nous l’espérons !

 

 

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