Le pili pili est le nom donné au piment dans certains pays d’Afrique. Pour ne rien faire comme tout le monde, l’expatrié Gaël Faye a décidé de l’étaler sur un croissant beurre pour nous faire déguster les cinq premiers titres d’un album à venir.

Depuis son départ du Burundi qu’il a quitté en 1995 jusqu’à aujourd’hui, Gaël Faye a taillé sa plume, notamment avec le groupe Milk Coffee and Sugar qui avait sorti un excellent album éponyme en 2010. Il partageait le micro avec Edgar Sekloka pour des constats plutôt sombres sur des compositions tendance hip-hop. C’est en solo que l’artiste prépare alors un nouvel opus, et livre au public en mai 2012 un premier EP cinq titres réjouissant et joliment intitulé Pili pili sur un croissant beurre. Il n’a pas abandonné le rap pour autant, non non, c’est d’ailleurs pour cela qu’il écrit avec fougue « Fils du hip-hop » introduit par quelques accords au piano et qui tranche avec les titres précédents. Tout débute avec « Je pars », rythmes sautillants et renforts de cuivres; une sorte de hip-hop acoustique déjà défendu par Hocus Pocus. « Blend » nous offre un flow rapide (« qui copie les tams tams ») sur une base funk à souhait. C’est la guitare qui est à l’honneur pour « Petit pays » (un titre en clin d’œil à celui de Cesaria Evora ?); toujours est-il qu’il s’agit sûrement du texte le plus illustratif d’une thématique chère à Gaël Faye : le déracinement. Alors il se souvient, de sa jeunesse, et pleure les conflits, celui de la guerre civile au Burundi, mais aussi les morts du Rwanda et « guerre, sida, Darfour, Biaffra » (« Je pars »). Gaël Faye soigne ses démons avec de l’encre, ou avec le jazz de « Slowoperation », et son propos peut paraître naïf, mais il porte un message fort, un message métissé qui entremêle musiques et émotions poétiques. Même si certains regretteront le grain de Milk Coffee and Sugar, il n’en reste pas moins que ces cinq premiers titres sont extrêmement bien réalisés et constituent la première pierre de ce qui risque d’être l’un des grands succès de 2013.