La falaise des lendemains (qui chantent)

C’était une première : le festival Jazz à l’Ouest s’invitait à l’Opéra de Rennes pour une création signée Jean-Marie Machado, La Falaise des lendemains. Une pièce jazz qui, fort heureusement, ne termine pas au fond du gouffre.

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©Laurent Guizard

Le pari était osé : faire jouer dans l’opéra de Rennes une pièce jazz, chantée en français, anglais et breton. Au départ, un livret de Jean-Jacques Fdida, mis en musique par Jean-Marie Machado (au piano durant le spectacle) et scénographié par Jean Larconerie. Sur scène, 26 artistes, musiciens et chanteurs lyriques. S’élance alors une sorte de West side story sauce bretonne, puisque l’action démarre à Roscoff en 1913. Pour faire bref : Lisbeth rencontre Chris, un Anglais marionnettiste de passage, mais Dragon, amoureux violent et jaloux de Lisbeth qui s’y refuse, fracasse Chris et lui casse les doigts, tandis que la poule de Dragon, Maureen, fait des pieds et des mains pour que Dragon l’aime, et puis paf la guerre éclate, ça traficote pendant que Lisbeth qui s’est jetée du haut de la falaise dépérit dans son fauteuil roulant en attendant Chris qui tente de se refaire un visage. Vous l’aurez compris : l’amour est empêché, la tragédie se déroule avec sa galerie de personnages, le tout dans le brouillard de la guerre (en l’occurrence 1914-1918) et du port avec ses lampadaires blafards.

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Lisbeth, à droite, interprétée par Yete Queiroz auprès d’Alys (Karine Sérafin) – ©Laurent Guizard

 

Partant au tout début du matériau du conte et de la légende, celui de la création des musiques bretonnes, c’est donc toute une toile entre tragédie amoureuse et remous de l’histoire  qui se tisse autour de l’orchestre. Car l’orchestre est partie prenante du décor, centré sur scène, installé en partie sur des gradins géants qui servent à représenter, au choix, la falaise ou les quais du port. Autour des musiciens, les chanteurs et chanteuses évoluent, et nous embarquent dans le récit. Chants collectifs, duos, les tableaux s’enchaînent entre vivacité des compositions ou lyrisme échevelé, entre rondes assez lentes ou swing dynamique ; des compositions musicales souvent riches et intenses. Durant plus d’une heure, on se croirait presque au cinéma, chorégraphies dansées à l’appui, jeux de lumières ou parfois de simples éléments qui arrivent à représenter beaucoup, comme les filets de corde ou les masques à gaz tricotés. Ou une simple marionnette finale qui achève subtilement ce récit émaillé de rêverie sentimentale et des petites bassesses humaines, vouées, sûrement, à s’échouer au pied de la falaise ? Ce qu’évite ce « diskan opéra jazz » en ne nous donnant qu’un seul vertige : celui de la musique.

La Falaise des lendemains – Jouée à l’Opéra de Rennes du 7 au 10 novembre en partenariat avec Jazz à l’Ouest.

Jean-Marie Machado  composition et arrangements // Jean-Jacques Fdida livret // Jean-Charles Richard direction musicale // Jean Lacornerie  mise en scène

Lisa Navarro scénographie // Marion Benagès costumes // Raphaël Cottin chorégraphie // Kevin Briard création lumières // Émilie Valantin conception marionnettes // Gérard de Haro ingénieur du son // Mattéo Fontaine régisseur son retours

Orchestre Danzas direction Jean Charles Richard

Avec : Karine Sérafin Alys // Gilles Bugeaud Don // Florian Bisbrouck Dragon // Nolwenn Korbell Maureen // Florent Baffi Malo  //Cécile Achille Yuna et la nurse // Yete Queiroz Lisbeth // Vincent Heden Chris

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