Elles, l’autre mémoire, de Caroline Alaoui et Lety Pardalis : un spectacle drôle et panaché sur des femmes énergiques mis en scène par la Compagnie les Combats Ordinaires.
Le surlendemain du 8 mars qui a vu des cortèges féministes défiler en brandissant d’innombrables slogans (contre les violences sexistes, contre la culture du viol qui imprègne nos sociétés, contre le réarmement démographique qui résonne comme une injonction insupportable, contre les dérives du patriarcat, pour la liberté de disposer de son corps, contre les mesures réactionnaires ou d’austérité qui touchent en premier lieu les femmes, pour une remise en question du modèle dominant, pour le cessez-le-feu à Gaza, pour le partage des tâches ménagères, contre l’impunité dont bénéficient les violeurs…), la Compagnie les Combats Ordinaires invitée par l’Imprimerie nocturne investit l’auditorium de la MIR pour présenter son spectacle Elles, l’autre mémoire, co-écrit par Caroline Alaoui et Lety Pardalis. Sur scène : Audrey Caille et Caroline Alaoui. Le duo complice et pétillant de malice présente au public une revue de personnages féminins qui ont mené des combats pas ordinaires. C’est fou le nombre de femmes qui gagneraient à être connues tant leur action ou leur engagement furent décisifs. Pourquoi leur geste est-elle invisibilisée ? Que ce soit Harriet Tubman (vers 1820-1913), anti-esclavagiste américaine ayant elle-même connu cet état, qui s’échappa puis contribua par l’action directe à délivrer une foule d’autres esclaves ; que ce soit la criminologue et médecin-légiste américaine Frances Glessner Lee (1878-1962) qui enseigna, grâce à ses « maisons de poupées » reproduisant des scènes de crime, l’art de ne négliger aucun détail dans le cadre d’une enquête policière ; que ce soit la pionnière en gynécologie Trotula de Salerne (1050-1097) ; qu’il s’agisse de l’Ougandaise Vanessa Nakate (née en 1996) qui multiplie les prises de parole pour que ses compatriotes et le monde entier prennent conscience des choses à changer pour éviter les désastres liés au changement climatique ; que ce soit la Brésilienne Marta Vieira da Silva (née en 1986) au palmarès footballistique époustouflant ou bien la jeune rappeuse afghane, Sonita Alizadeh (née en 1996) militant courageusement contre la tradition des mariages forcés, exilée aux États-Unis où elle étudie le droit ; ou la Parisienne Thérèse Clerc (1927-2016) qui milita au sein du Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception (MLAC) et créa à Montreuil la Maison des Babayagas, etc., la Compagnie les Combats Ordinaires brosse avec humour et pédagogie des portraits de femmes inspirantes. Sans temps morts ni lourdeurs malgré un sujet – la place des femmes dans nos sociétés et dans notre mémoire collective – qui ne prête pas forcément à rire, Audrey Caille et Caroline Alaoui réussissent le tour de force d’orienter nos mémoires vers des directions trop souvent inexplorées.
Elles, l’autre mémoire, de Caroline Alaoui et Lety Pardalis. Sur scène : Audrey Caille et Caroline Alaoui. Représentation du dimanche 10 mars 2024 à l’auditorium de la MIR (7 quai Chateaubriand), suivie d’un échange avec le public et du vernissage de l’exposition Fièr·e·s. Dans le cadre du mois des droits des femmes soutenu par Rennes Ville et Métropole.