Molinier, mais surtout ses jambes, à l’honneur au TNB

C’est une pièce en bas nylon et bustiers qui se joue au TNB jusqu’au 1er otobre : Mes jambes, si vous saviez, quelle fumée… signé Bruno Geslin, et remet sur scène un spectacle créé en 2004 autour de la figure de Pierre Molinier. Hommage en talons hauts.

186548-mes-jambes_brunogeslin

Le moins qu’on puisse dire de Pierre Molinier (1900-1976), c’est qu’il fut hors norme. Sans aucune case, avec des intentions qui paraissent sans limite, tout comme sa recherche de liberté. Peintre, photographe, poète et proche du mouvement surréaliste, celui qui voulait faire du monde un immense bordel se retrouve mis à l’honneur par le metteur en scène Bruno Geslin. Entre scènes de travestissement, petits tableaux aux lumières sensuelles et déclarations crues, place aux talons hauts portés ici par le comédien Pierre Maillet.

“Je voudrais que mon tableau ressemble à un être humain avec tout ce qu’il comporte de mystère.”

Le temps d’une heure et quelques minutes qui filent comme un collant en fin de journée, l’acteur incarne Pierre Molinier. Il prend sa voix, son rire, ses éclats quasi nerveux; la vie finalement, s’en moquerait-il totalement ? Il raconte son histoire, depuis la région bordelaise. Son histoire, avec sa femme qui l’emmerdait royalement lorsqu’il peignait ses toiles. Son histoire avec les notables de la région, qui finalement aiment beaucoup moins son art lorsqu’il arrête les paysages pour passer à la nudité; Molinier sera subversif ou ne sera pas, assumant de faire de ce que la société nomme vices, ses passions. L’acteur lit, aussi, les réflexions de Molinier, dont la voix s’invite parfois par le biais d’archives d’enregistrements. Chez Molinier, surtout pas de morale; l’âme ? Il n’y croit pas, mais il apprécie l’esprit, celui qui se stocke dans la matière de nos corps, voués à se transformer un jour. Ces corps qui deviennent ici compagnons de jeux, amant·es de passage, même si franchement, on comprend vite que Molinier s’amuse aussi bien tout seul, fétichisant ses propres jambes et racontant ses aventures masturbatoires.

186548-mesjambes_christophe-raynaud-de-lage

Ses obsessions, on les retrouve dans ses toiles et ses photographies, qui sont sur scène directement représentées, par le biais de projections, ou de jeux des acteurs avec la lumière; car Pierre Maillet n’est pas seul, il est accompagné par Nicolas Fayol et Élise Vigier. Un trio qui joue donc de toutes ses jambes, nous mélangeant l’arrière avec l’avant par des jeux de masques, oscillant entre sensualité érotique, passages plus comiques ou scène désenchantée en musique qui rappellerait un cabaret perdu. Oscillant sur le fil du masculin/féminin en permanence, cherchant à se prolonger par une représentation de l’orgasme, du plaisir (voire de l’amour ?), la lumière des corps fait aussi place au versant de la mort, que Molinier se donnera en 1976. Une part d’ombre, une part de lumière. Une part de fantasme, une part d’absolu. Une quête qui se joue comme un tableau, et la vie comme un déclic photographique, ou le bruit d’une balle de revolver.

NB : le port des bas n’est pas obligatoire pour assister au spectacle, mais c’est assez confortable de venir avec.

Les infos sur le spectacle / Écouter un chouette podcast sur Molinier

pierre-molinier

 

 

Envie de réagir ?

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>