Le Paris bleu nuit de Dima Abdallah

Bleu nuit c’est celui de l’oubli qui n’arrive pas. Celui du deuil. Celui de la couleur du goudron et de ses âmes perdues. Bleu nuit c’est un errance autour du cimetière du Père Lachaise portée par les mots puissants et la poésie de l’autrice Dima Abdallah.

 

dima-abdallah Bleunuit

Deux ans après son premier roman Mauvaises herbes, l’autrice Dima Abdallah signe un livre aux évocations multiples, aux images fortes; un régal de mots aux couleurs Bleu nuit, qui démarre par une fuite, une fuite en avant.

« Je me suis levé, j’ai pris mon sac à dos et le sac poubelle et j’ai dévalé l’escalier. Je ne pensais à rien, je ne ressentais plus rien. (…) J’ai cherché la première bouche d’égoût de la rue et j’y ai jeté les clefs de l’appartement. C’était le 21 mars 2013″. P. 27

C’est après avoir appris la mort d’Alma, l’unique amour de sa vie, que le personnage du livre (sans prénom) décide de quitter logement et souvenirs sans ménagement. Pourtant, ceux-ci vont le suivre, s’entremêler aux effluves des boulangeries, prendre les traits des gens qu’il croise. Tout devient alors description et lumière, poésie et sensations, ponctué par des « Carnets » : un extrait littéraire, de Kundera à Duras en passant par Camus, que l’autrice remanie ensuite avec ses mots. Des ponctuations au milieu des souvenirs qui refluent comme la mer, tout ce bleu, bleu des solitudes, bleu des trottoirs, bleu des marges urbaines, bleu qui arrive à Minuit avec la chienne qui finit par le suivre.

« Le cœur qui menaçait d’exploser, une infinité d’images, celles de toute une vie avec elle, venaient me secouer comme on secoue un arbre pour en faire tomber les fruits. (…) Tout le satané bleu remontait en moi comme une vague et les images fantomatiques se sont mises à cogner aux portes de ma tête. » P. 93

Alternant émotions poignantes du narrateur et tableaux urbains désenchantés, prenant soin de garder toute trace d’humanité, même celle qui dort sur une grille de bouche d’aération du métro, la plume de Dima Abdallah fait couler une encre sur le seuil de la nuit, le seuil de l’obscurité. Une encre face aux violences de la société, une encre, presque le sang d’un homme en proie à ses fantômes, et une poésie qui griffe le texte, véritables déflagrations sensorielles entre ombres et lumières.

Bleu nuit de Dima Abadallah – Éditions Sabine Wespieser – 6 janvier 2022 – 232 pages – 20€

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