Alors que le secteur des musiques actuelles est toujours dans l’incertitude et les difficultés, le festival rennais Les Embellies a reprogrammé cet été certains noms de son édition initialement prévue en avril, dont Hazel Anne qui jouera le jeudi 27 août.
Nous avions sélectionné sa dernière production Kheops dans nos disques de printemps, et nous attendions avec joie le festival. Puis comme tout le monde, tout s’est arrêté et nous avons attendu. Dans le courant de l’été, nous avons rencontré Hazel Anne pour lui poser quelques questions au sein d’une discussion à bâtons rompus sur la création artistique et le confinement.
■ Comment tu résumerais ton parcours ?
Petits pas par petits pas ! À un moment donné j’ai eu des chansons que j’avais envie d’exprimer, et l’envie de faire des concerts, de privilégier le live. J’ai commencé à jouer dans les bars, et à Rennes c’est cool, on a pas mal d’endroits et de lieux qui t’accueillent. Il y a aussi des associations qui m’ont fait jouer, de fil en aiguille on rencontre des personnes ; ça c’est le bon côté après avoir démarré seule, de rencontrer des gens qui sont dans le même élan. Pour la programmation aux Embellies c’est suite à mon passage sur Canal B, dans l’émission Purple Rennes, que j’ai été contactée.
■ En février tu as sorti Kheops ; une passion pour l’Égypte antique ?
Comme d’habitude j’ai pas d’idée préconçue, je fais des morceaux qui se ressemblent pas forcément les uns les autres, là on me l’a redit qu’ils sont tous différents d’ailleurs ; puis à un moment j’en ai assez pour les enregistrer et les mettre en ligne. Dans le lot il y avait « Kheops », qui est peut-être celui qui s’écoute le plus facilement. J’ai envie de dire des choses et la musique est là pour venir les porter ; la base de ma démarche c’est tout de même de faire des chansons. Ce qui est bien avec le looper, pour créer et composer c’est immédiat ; j’ai mon truc d’effets et si quelque chose me plaît je le garde. En général il y a une idée, et ensuite je brode autour ; je pense que c’est tout le monde comme ça ?!
« on sait tous qu’on va vers un mur »
■ On a passé deux mois de confinement qui ont valu l’annulation des Embellies en avril ; comment tu as vécu cette période et cette annulation ?
C’était dommage… mais pour tout le monde dommage ! C’était pas moi la plus à plaindre, pour beaucoup ça met leur intermittence en péril ce qui n’est pas mon cas. Dommage aussi pour ceux qui organisent, avec tout ce travail fait en amont pour quelque chose qui au final ne se fait pas…
■ Le confinement t’a inspiré des choses créatives ?
Pas du tout. Au début j’y croyais pas, j’étais à la mer avec l’arrivée des beaux jours quand ça a été annoncé. Je me suis dit que j’allais avoir du mal à rester confinée, puis au final ça a été très bien ; j’ai déjà un tempérament solitaire, pour moi vivre seule c’est pas un problème, ça m’a confirmé ça. Je pense aussi qu’on a une grande capacité à s’adapter, pour la plupart des gens autour de moi ça s’est bien passé. Mais j’ai pas travaillé ; ça a tout de même cassé un élan, ça m’a fait me poser beaucoup de questions sur ma vie personnelle, sur le monde, on était pas mal à se dire que ça aurait pu être le moment de calmer le jeu. Les abattoirs à l’arrêt, les trucs qu’on fait en chaîne sans y penser, ça veut dire que c’est possible de ralentir ; on sait tous qu’on va vers un mur c’est pas un secret, est-ce que c’est possible de ralentir ? J’ai aussi beaucoup pensé à l’auto-suffisance, de se dire qu’on est dépendant de plein de trucs, et finalement c’est quoi l’essentiel ?
« il faut pas qu’on se laisse faire et qu’on soit solidaires »
■ Nous posons régulièrement la question si le fait d’être une femme semble poser des difficultés dans un parcours artistique… si tu as déjà subi des discriminations…
Le truc c’est que j’m'en fous, donc je pense que je pourrais dire oui, mais pas plus qu’une nana qui fait autre chose, pas parce que je fais de la musique spécifiquement. Moi en tout cas je ne me sens pas inférieure, donc à partir de ce moment-là même si on peut avoir un regard sur moi… mais c’est pas le cas. Par contre je ne supporte pas qu’une personne domine une autre personne, j’aime que les femmes soient fortes ; il faut pas qu’on se laisse faire et qu’on soit solidaires. On dit souvent que c’est contre les hommes, mais le problème qu’on peut avoir c’est surtout un problème contre la bêtise ! Je pense qu’il y a des choses qu’on a acceptées avant qu’on accepte plus et que les hommes commencent à s’en rendre compte.
■ Tu joueras fin août pour les Embellies…
Le 27, en extérieur mais le lieu sera indiqué au dernier moment. Ce sera le premier concert depuis le confinement ! J’ai eu du mal à m’y remettre, mais là je rebosse mon set et je vais être contente de rejouer !
■ Quel serait ton dernier coup de cœur artistique ?
J’aime bien Deeper que j’ai découvert sur Bandcamp, c’est un groupe de Chicago. Sinon j’ai hâte d’aller voir l’exposition Martin Parr.
Concert le 27 août à 19 h à La Coulée Verte (maison de quartier Bellangerais)
Écouter Hazel Anne // Le site des Embellies