Beaucoup de belles choses sortent en cette saison au-delà des primevères ; voilà un jukebox aussi printanier qu’éclectique, résumé en quelques mots d’une humeur confinée. Bonnes découvertes !
Muga – Chants de femmes des Asturies
La Muga est un fleuve orienté est-ouest qui prend sa source dans les Pyrénées et se jette dans la Méditerranée. Mais c’est aussi (et surtout) un trio qui sortait un premier opus sur le label (qu’on aime bien, avouons-le), Pagans. Au chant (mais aussi au pandereta et pandeiru) Clara Diez Márquez qui défend le chant traditionnel des Asturies. Qui arrivent à rallier… la Bretagne, en invitant les musiciens Martin Chapron à la guitare et Thomas Felder au violon. À trois, ils réenchantent à leur façon un répertoire qui prend rapidement aux tripes. 10 titres bruts et fascinants. Les fleuves sont parfois plus profonds qu’il n’y paraît.
10 titres – 10 avril 2020 – Pagans
Bertrand Betsch - La Traversée
Il est parfois difficile de mettre des mots sur le disque de quelqu’un qui les manie si bien ; Bertrand Betsch revient avec un 13ᵉ disque, La Traversée, qui démarre « À la nage ». Ici et là sur le rivage, des orchestrations qui s’étoffent au fur et à mesure des textes ; là où « À la dérobée » commence avec quelques notes de piano la chanson finit en chœur ; comme « Le bus 51″ qui embarque les cordes sur son trajet. Bertrand Betsch peint de petits tableaux poétiques, sorte de clair-obscur où s’affrontent gentiment la lumière et la pénombre. La nostalgie et l’envie du lendemain. Un disque réconfortant à écouter en barque pour rejoindre l’autre rive.
10 titres – 24 avril 2020 (5 juin 2020 pour le cd) – Microcultures records
Arnaud Le Gouëfflec – L’orage
Arnaud Le Gouëfflec a une place à part dans la chanson française ; car il la dépose sur un rock qui la transforme en « chanson en français » (à moins qu’il ne soit en train de scénariser pour la BD mais ça c’est une autre histoire). Pour ce nouvel opus, sorte d’ambiance atmosphérique sur fond de réchauffement climatique, il a su s’entourer des percussions impeccables de Régïs Boulard, des guitares noise d’Olivier Mellano, des claviers de Thomas Poli, du chant d’OoTi ou encore des bidouillages de John Trap. 10 titres qui suivent un fil : enterré avec « Le meilleur pour la fin », électrisant avec « Un blasphème », ou encore vacillant comme « La flamme de la chandelle ». La poésie oscille entre les notes, les oiseaux volent bas, l’orage s’avance.
10 titres – 15 mai 2020 – L’Église de la Petite Folie
Emilie Zoé & Christian Garcia Gaucher – Pigeons : Soundtrack for the Birds on the Treetops Watching the Movie of our Lives
Nos fidèles lecteurs et lectrices savent combien nous apprécions Emilie Zoé et nous commencions à nous ennuyer d’elle depuis The Very Start sorti fin 2018. Et voilà que début avril, comme un perce-neige qui pointerait ses pétales, un disque : Pigeons : Soundtrack for the Birds on the Treetops Watching the Movie of our Lives. Un disque réalisé lors du festival 2300 plan 9, les étranges nuits du cinéma, où elle invite son producteur Christian Garcia-Gaucher à la rejoindre. Ils choisissent alors d’habiller de musique le film A Pigeon Sat on a Branch Reflecting on Existence de Roy Andersson. Voilà donc deux oiseaux musiciens qui ré-inventent (musicalement) les pensées de ce pigeon en train de nous observer. En résulte 11 titres, dont des mélodies superbes comme « The painter » ou une sensibilité à fleur d’aile comme « Lotta ». À savourer assis sur une branche.
11 titres – 3 avril 2020 – Hummus Records
Compilation – Music for containment
Plutôt qu’organiser un concert de casseroles géant à 20h, l’artiste Molecule a eu la bonne idée de réunir une trentaine d’artistes pour une compilation (dont les recettes iront à la Fondation de France) de musiques planantes. De quoi accompagner la léthargie générale, ou plutôt de voir des morceaux inédits sortir des tiroirs ; voilà donc sur la même galette Rone, Flavien Berger, Étienne de Crécy, Nosfell, Arthur H ou encore Rebekka Warrior. Comme le précisait l’artiste à Fip : « C’est aussi utile à la réflexion et à l’introspection. Il faut prendre la mesure de ce qu’on est en train de vivre, que beaucoup de choses vont se jouer demain, et que la musique peut participer à cette prise de conscience. » Respirez, tout va bien se passer (en théorie, mais on a toujours pas trouvé le lieu dans nos GPS). Respirez, ça s’écoute par là.
33 titres – 8 avril 2020
Rone – Room with a view
Est-il encore utile de présenter Rone, producteur à la carrière fulgurante qui en plus est copain avec Alain Damasio ? Il est en tout cas possible de dire qu’avec le confinement, le titre de son nouvel album Room with a view tombe à pic. Bienvenue dans un monde où l’électronique a des allures d’orgue de cathédrale (« Sophora japonica »), où le clavecin redevient à la mode (« Le crapaud doré ») et où une techno souterraine peut vous emmener dans la galaxie (« Raverie »). En gros, ça se passe de commentaire, ça s’écoute et ça se voyage comme dans une bonne chambre avec vue. À votre imagination.
13 titres – 24 avril 2020
Carriegoss – Touch
Carriegoss est rennaise, et joue en solo (quand elle n’est pas accaparée par d’autres collaborations). Touch plonge habilement dans les univers de la wave : ambiance sombre industrielle avec l’introduction de « Secret », on se prend à rapidement tapoter du pied avec « Typical » et ses synthés marqués au fer des 80′s. Idéal pour sautiller sans qu’on sache trop pourquoi mais sans vouloir pour autant toucher le plafond : l’ambiance y est trop nuageuse.
5 titres – 4 avril 2020
Oscar Phileas – Le barrage
Oscar Phileas a des choses à dire. Chez Oscar Phileas, ça grince, on dirait que quelqu’un a oublié d’éteindre la bouilloire. C’est un peu sombre, on ne sait pas trop si après le barrage (ou avant ?), il y a de la lumière. Oscar Phileas parle sur un fond de caisse claire répétitive. Oscar Phileas n’a pas l’air rigolo et se pose de drôles de questions « qui de proie, qui de rapace ». Oscar Phileas tourne en rond dans sa geôle où il « tue le temps à grands coups de talons ». Oscar Phileas doit être une mouche coincée dans un abat-jour. On aime bien Oscar Phileas.
3 titres – 3 avril 2020
Péroké – Tropism animalism
Vous vous sentez mou du genou ? Adoptez Péroké, un drôle de volatile qui joue en duo du côté de Tours et pioche autant dans l’afrobeat que l’électro. Impossible de rester impassible sur ce 1ᵉʳ opus dont le cocktail musical peut se prendre sans danger (mais avec risque d’accoutumance). Ça groove, ça cuivre, ça mélange les boucles, ça ne se prend pas au sérieux tout en le faisant bien. D’un « Minotaur » qui allie danse tribale aux cassures électroniques à des effets parfois plus psyché comme sur « Deadly kiss », Péroké voyage loin. Mettez-vous en vol !
10 titres – 24 avril 2020
Alcachofa – Jaguar espectro
Direction l’Amérique du Sud avec le nouvel album du duo rennais Alcachofa. Enfin pas vraiment. Si le duo garde toute son influence des cultures chamaniques du Mexique ou du Chili, le déroulé de Jaguar espectro pourrait aussi bien se tenir dans une étendue désertique d’Amérique du Nord. Car Alcachofa semble aimer le road trip à la Kerouac et la poésie aussi bien chantée que parlée. L’ambiance est plutôt ici à la méditation qu’à la danse ; 11 titres qui planent et qui s’écoutent comme un serpent sous hypnose.
11 titres – 17 avril 2020
Versari – Sous la peau
Troisième album pour un trio composé de Cyril Bilbeaud (Zone Libre) à la batterie, Laureline Prod’homme à la basse et Jean-Charles Versari à la voix. Voix désabusée pour parler de ce qui « Brûle », et des titres qui oscillent entre plusieurs étiquettes rock. Qu’importe, ce qui semble l’emporter à la noirceur n’y est que de courte durée. Le sombre revient régulièrement à la charge, comme sur « Rose ». Les riffs hurlent « Reviens ». Jusqu’à ce qu’il n’y ait « Plus de tristesse » ? Des allers-retours entre quelques trouées mélodiques et une basse incessante
8 titres – 24 avril 2020
Bison bisou – Pain pleasure
Vous êtes nerveux suite aux discours télévisés ? Vous avez envie de briser votre vaisselle mais vous n’osez pas ? Le nouvel opus de Bison bisou est fait pour vous ; une parution (ultra limitée en K7 chez Ideal crash qui ne fait jamais rien comme tout le monde et tant mieux) de 11 titres qui permettent en face A de vous décrasser les oreilles et vous briser la nuque, et en face B vous briser la nuque et vous décrasser les oreilles le tout dans un package vert fluo. Vous l’aurez compris : Bison bisou n’est pas là pour en faire (des bisous) mais dérouler un tapis iconoclaste de riffs ravageurs et brasser un rock, pardon, des rocks qui devraient être prescrits à tout·e·s en cas de refroidissement. Puissant, viscéral, indispensable.
11 titres – K7 édition limitée – Ideal crash – 11 avril 2020
Les clips rennais confinés du mois
Les artistes rennais restent confinés chez eux, mais ce n’est pas pour autant qu’ils s’arrêtent de jouer ! Nous avons sélectionné 3 clips qui nous ont été envoyés : Eighty, Nombre Z et Stërnn ! Bonne écoute !