Ladylike Lily : un conte musical… et des papiers découpés

La musicienne rennaise Ladylike Lily lance cette année un projet jeune public intitulé Echoes. Un spectacle onirique et musical dont elle signe à la fois les compositions mais aussi les créations graphiques en tous genres.

 

ladylike-lily-portraitAnimant un workshop « Écriture et création audio » à l’Antipode du 12 au 15 avril, les Rennais retrouveront l’artiste en exposition au théâtre du Vieux Saint-Étienne lors du festival Les Embellies. Tout un programme qui accompagne le lancement de son album Echoes sorti début mars. Mais Echoes est plus qu’un album, il s’agit aussi d’un conte et d’un spectacle, dont elle signe la scénographie et les créations plastiques. Interview.

■  Peux-tu résumer ton parcours et présenter ce projet ?

Je suis musicienne, guitariste, j’ai monté mon projet solo il y a une dizaine d’années, sorti plusieurs disques, et là j’ai monté un conte musical, à l’adresse des enfants mais avec des thématiques d’adultes. C’est un voyage initiatique, l’histoire d’une petite fille qui vit dans un monde de censure en noir et blanc et qui part à la recherche des couleurs. Avant d’être musicienne sur le temps du midi, j’étais animatrice avec les enfants, sur l’art plastique; j’ai toujours aimé dessiner, découper, bidouiller, mais jamais publiquement. Et là je relie tout ce que j’aime bien faire, avec de la vidéo, des découpages. Puis j’avais envie d’aller vers quelque chose où on ne se prend pas la tête; de faire des choses avec les enfants qui sont hyper ouverts artistiquement, leur proposer quelque chose d’acoustique et passer à l’électro ne leur pose pas de problème.

« J’adore les livres pop-up ! »

■ Vu que tu fais les visuels toi-même, comment tu as travaillé le lien entre la musique et l’image, quelles techniques tu utilises ?

Au départ c’était un spectacle, je voulais proposer une forme live à cette histoire, et puis très vite je me suis mise aux illustrations. Et là c’est parti dans tous les sens, j’ai exploré plein de choses. Je voulais qu’il y ait du végétal, des choses assez colorées, un peu de peinture, un peu de dessin; je suis pas hyper forte en dessin donc je suis plutôt sur la découpe et le volume. J’adore les livres pop-up ! Il y a donc du papier en fond et des éléments qui se superposent, avec une source lumineuse derrière. L’écran permet de recevoir des vidéos préparées, mais aussi d’être un support comme une page blanche pour créer des ombres chinoises en direct. Pour le spectacle, je suis conteuse de l’histoire, avec des passages où je suis juste musicienne en incarnant la petite fille, d’autres où je raconte en posant mon instrument, d’autres où j’anime des personnages en direct.

■ Tu évoquais des thèmes pour adultes; qu’est-ce qu’il y a comme symboles derrière ?

J’avais beaucoup envie de parler d’écologie, et de la femme en général; sans donner de leçon mais regarder le monde, tel que je le perçois, et leur livrer cette sensibilité-là. L’écologie on est obligé d’en parler, ils sont obligés de l’aborder. Qu’est-qui me touche profondément ? L’enjeu était de « comment leur parler de ça ? ». Donc cette petite fille voyage, et j’aime le côté où tout se construit au fur et à mesure où tout est possible, dans le rêve, comme Alice au pays des merveilles. Les enfants se fichent de savoir si on est dans l’espace sans avoir pris de fusée.

echoes

Le thème de la femme, s’embarquer là-dedans c’est « quel est ton propos, qu’est-ce que tu défends… » Je suis juste en train de dire que la femme n’est pas complètement libre; dans mon histoire le monde perd ses couleurs parce qu’on enferme les femmes. Un monde où on empêche les femmes de s’exprimer est un monde sans couleurs, incomplet. Je suis pas sûre que les enfants comprennent tout ça directement mais la petite fille part en voyage, les animaux lui rappellent qu’elle n’a rien à faire là mais elle y va quand même. Il y a un passage aussi qui parle du harcèlement de rue; je voulais faire un morceau depuis longtemps là-dessus, mais sans tomber dans le cliché. Le spectacle est diffusé dans les milieux scolaires, ça génère beaucoup de discussions, avec les enseignant·e·s, les familles, et je trouve ça chouette de pouvoir raconter ça dans une histoire. Dans la jungle, la petite fille se fait enrouler par des serpents, et réagit pour dire « c’est mon territoire », c’est un passage en ombres chinoises, et les enfants comprennent tout dans la chanson qui a pourtant des mots adultes.

■ Nous avions publié un numéro consacré à la place des femmes dans les milieux culturels. Est-ce que le fait d’être une femme a bloqué des choses en tant qu’artiste et musicienne ?

Dans ce qui se pratique malheureusement, on a besoin de te mettre dans une case. La question du look est très souvent revenue et je continue de trouver ça hyper choquant; tu viens faire écouter ta musique et on parle de ta plastique, ta manière de te présenter. Ça peut aussi être le cas pour les hommes, mais tu sens bien qu’on est à la frontière de quelque chose. Je pensais être malléable parce que je voulais signer en maison de disques, et puis finalement non. Très tôt, tu touches à quelque chose qui est trop sensible. En tant que musicienne sur la route, j’ai tout de suite vécu en arrivant sur un plateau le technicien qui te prend de haut, qui pense que tu connais pas ton matériel; alors t’es obligée de ramer un peu plus que les autres, de montrer que techniquement t’es pas à la ramasse. On l’intègre tellement depuis des années… ça va prendre un certain temps mais ça va forcément aller vers autre chose.

On va revenir à la musique; l’album est sorti début mars, quelle est la suite ? Il n’y a que les enfants qui ont la primeur du spectacle ?

FRONT_ECHOES_LADYLIKE-LILY_web-1En général je fais deux séances scolaires et une tout public. Là on a déjà fait 100 000 km ! Je fais aussi des ateliers avec les enfants. La semaine dernière j’étais avec des CE1 qui avaient vu le spectacle au préalable; on a fait un passage de l’histoire en ombres chinoises et on a fait un clip, c’était trop bien. Il y a le Printemps de Bourges prochainement. Ça fait deux ans que je prépare ça, j’ai planté plein de graines, et là je commence à voir les choses se matérialiser. J’exposerai aussi lors du prochain festival des Embellies début mai.

■ Pour finir, quel serait ton dernier coup de cœur musical ?

J’aimerai bien aller voir Voyou en concert, c’est un mec hyper créatif, j’aime bien ses morceaux, comment il se détache de son image, et il a une super scéno avec des plantes, je me dis qu’il faut que je voie ça ! Il faut aussi que j’écoute le nouvel album de Sônge, une chanteuse qui vient de Quimper comme moi, elle est bluffante dans ce qu’elle explore.

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