Après avoir remué les tripes des spectateurs du festival TNB en automne 2018 avec la pièce immersive Hébron H2, le duo Winter Family est revenu à Rennes sur la scène du Cabaret Botanique de Mythos lundi 1er avril pour une (trop courte) heure de concert. Le pianiste Faraj Suleiman les a précédés avec des compositions hypnotiques. En seconde partie de soirée, Mythos s’est branché sur les ondes de Radio Elvis tandis que Lou Doillon parachevait la programmation avec une note pop folk acidulée.
Faraj Suleiman entre sur scène et s’installe derrière un piano noir. Le pianiste né en Galilée, également compositeur, le dos courbé sur ses touches blanches, au plus près des notes, déploie en solo des compositions originales aux sonorités orientales et occidentales, entre jazz, tango et classique, fines, sensibles et subtiles. Une belle découverte qui résonne intensément sous le chapiteau du Cabaret Botanique.
Faraj Suleiman laisse la place à un carré d’instruments (orgues, instruments de percussion, cloches etc.) en bord de scène afin d’accueillir Winter Family. L’artiste israélienne Ruth Rosenthal et le musicien français Xavier Klaine entrent en scène toujours en partenariat avec le TNB. Le duo établit encore et toujours une proximité avec le public vers une immersion totale comme un discours susurré, narré ou hurlé au creux de son oreille.
Commence alors une succession de titres issus de leur dernier album South from Here. Un projet germé dès 2010 suite à un déménagement à New York. Le duo-couple s’inspire de son environnement et absorbe le bruit des rues, des voix, des quartiers de la ville-phare américaine. Pour mieux le restituer à Paris en 2014 où ils commencent à enregistrer treize chansons en anglais, français et hébreu. Et. convie le public à une expérience unique qui transgresse les codes du genre.
Sur la scène du Cabaret Botanique, la voix-psalmodie de Ruth Rosenthal associée au son des orgues électriques de Xavier Klaine délivre un lyrisme électro-rock moderne et poignant, empreint d’un regard critique sur le monde qui les entoure. Une histoire de famille au sens propre comme au figuré puisque leur fille Saralei Klaine les rejoint sur scène pour jouer de la flute, des maracas ou faire les choeurs. Une heure en apesanteur, sombre, mélancolique et bouleversante avec son lot de poils qui se hérissent. Une histoire d’épiderme et de chair heurtée south from here.
En deuxième partie de soirée, Radio Elvis est attendu par un public converti. Pierre Guénard (chant, guitare), Manu Ralambo (guitare, basse), Colin Russeil (batterie, claviers) et Martin Lefèbvre qui vient de les rejoindre aux claviers entonnent des morceaux de leur deuxième album Ces garçons-là. Onze titres entre références littéraires et textes personnels très écrits dont il faut certainement s’imprégner au préalable pour en saisir la subtilité.
L’autrice, compositrice et chanteuse Lou Doillon, achève cette soirée par une note pop folk acidulée. Première scène à Mythos de sa tournée, la sympathique artiste présente pour son dernier album Soliloquy, aux arrangements électro-pop calibrés avec entre autres par Benjamin Lebeau, la moitié de The Shoes, et Dan Lévy, la moitié de The Dø, ett Cat Power en invitée spéciale pour un duo folk rocailleux comme il faut, le meilleur titre de l’album.