Juliette Armanet est en tournée dans toute la France depuis plusieurs mois. Passée ici à Rennes par l’Ubu et le Cabaret botanique de Mythos il y a quelques semaines, elle était à Saint-Brieuc au festival Art Rock le week-end dernier. Rencontre avec cette nouvelle et talentueuse pointure de la chanson française, dont la voix n’est pas sans rappeler celle de Véronique Samson.
- Imaginer jouer sur un piano et faire des chansons a-t-il toujours été évident pour vous ?
J’ai toujours fait de la musique, j’ai toujours composé. Je ne sais pas lire la musique, alors j’ai un rapport à la musique assez primaire. C’est-à-dire que je ne peux pas jouer les partitions des autres mais seulement créer, imaginer et composer les miennes. Je me mets au piano tous les jours et depuis toute petite. Dès 21 ans j’ai travaillé à la réalisation de documentaires pour Arte, ce qui m’a ouvert l’esprit et m’a fait rencontrer de nombreuses personnes passionnantes. À cette époque, j’avais une pudeur extrême, une exigence telle, presque paralysée d’évoquer ma passion pour la musique. J’ai mis ce temps à élaborer mon style à moi. J’en ai même fait quelques albums pour moi, des brouillons en quelque sorte, je me suis cherchée en fait. Puis comme je suis une lente, tout ça, ça m’a pris du temps.
- La sortie de ce premier album est intervenue à quel moment ?
Au départ, je ne connaissais personne dans la musique puis après j’ai rencontré celles qui ont su me donner confiance, qui m’ont poussée, qui m’ont aidée. Mais ça a été un long chemin, j’ai été chiante, j’avais du mal à oser, à me faire confiance, à essayer d’aller au bout des choses. Ce sont les encouragements des autres qui m’ont aidée à le faire et à proposer enfin quelque chose d’abouti, après une dizaine d’année à douter sur moi-même, mes textes, mes compositions.
« Les chansons on les écrit pour soi »
- Une certaine fierté, le disque est réussi ?
Je ne sais pas, que ça marche ou pas, j’avais besoin de le faire cet album. L’enjeu n’était pas la réussite commerciale, mais plutôt mon accomplissement pour ce projet. Je l’ai fait, j’en avais besoin dans ma vie personnelle pour avancer profondément dans mon identité. Le succès et la réussite de cet album c’est une autre histoire. Les chansons on les écrit pour soi, quand on est tout seul face à son piano en pyjama avec les cheveux en vrac et du Nutella sur les dents. On fait les choses pour soi-même avant tout. Ce sont des chansons pour se guérir, pour se faire du bien. Ce n’est pas égoïste mais je l’ai quand même écrit d’abord pour moi il est vrai.
- Et cette ferveur de retrouver le public chantant vos chansons, des émotions contenues ?
Il est vrai que ces moments-là sont les plus émouvants depuis quelques temps. C’était difficile de se l’imaginer. Quand ces chansons-là que l’on a écrites pour soi peuvent avoir un chemin vers d’autres, être accueillies par d’autres, embarquées dans la vie des autres, c’est bouleversant, je ne m’en remets pas ! Ces chansons qui passent par le corps, par la vie du public que je rencontre, c’est fort quand même non !? En ce qui me concerne en tout cas, je dois avouer avoir bien du mal à contenir mes émotions parfois.
- Le 1er album de Juilette Armanet Petite amie est produit par Barclay/Universal | 02-02-2018