Kery James tranche À vif au TNB

À vif est une pièce de théâtre écrite par Kery James. Kery James est un rappeur que beaucoup ont écouté notamment au sein d’Ideal J. Ideal J est un groupe de rap français qu’a sûrement écouté Jean-Pierre Baro, metteur en scène. Le TNB est une salle de théâtre située à Rennes, et qui le lundi 22 janvier 2017 s’est transformée en salle de plaidoirie pour la première représentation de la pièce À vif. Standing ovation.

« La question que pose depuis toujours Kery à travers ses textes est celle de la responsabilité, la nôtre, comme celle de nos dirigeants, de nos représentants, celle de l’État français ». Jean-Pierre Baro, note d’intention.

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À vif pourrait se dire d’une blessure, de la façon d’écrire un texte ou encore d’un jugement. La pièce écrite par Kery James met en situation deux avocats qui arrivent à l’ultime étape de la petite conférence : une joute verbale devant prouver tout leur talent de rhétorique et d’éloquence pour répondre à la question : « L’État est-il seul responsable de la situation actuelle dans les banlieues ? » Kery James, alias maître Sulaayman va prôner le contre. Yannick Landrein, alias maître Yann, va prôner le pour. Le public est mis en situation de jury populaire. Il s’agit donc d’être attentif, de mettre son cerveau en action pour mesurer les arguments les plus recevables… nuancés par nos propres opinions sur les parcours de chacun des avocats : Sulaayman a réussi à s’extirper des tours (et passe donc à la moulinette critique du parvenu) tandis que Yann Jaraudière est issu d’une très bonne classe sociale (et passe donc à la moulinette de la Rolex fiscale). Et surtout, surtout, nécessairement victime de l’éloquence et de l’art oratoire, si bien maniés par nos politiques, ici pointés du doigt. Mais le sujet principal (même si les mécanismes sociaux sont largement ratissés, et notamment la question de l’Éducation nationale) n’est pas là.

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Avec de larges passages humoristiques, ou d’autres plus poignants, Sulaayman oppose à l’accusation de désengagement de l’État la notion d’émancipation; être libre par soi-même. Ne pas attendre de l’autre/l’État qu’il gère notre problème. Ne pas céder à la victimisation.  Ne pas oublier la question raciale. La question de la classe sociale. La responsabilité de qui appuie sur la gâchette. Et enfin, il oppose aux cris de maître Jaraudière la poésie, délaisser la prose pour exprimer, au fond, quelque chose de bien plus profondément humain que des questions politiciennes face à des réflexions politiques.

Kery James avec À vif ne tranche pas finalement; il laisse le soin, à ces deux France parallèles où finalement personne n’a vraiment raison ni vraiment tort, de s’exprimer, quelles ques soient les cartes en main. D’ouvrir le dialogue, sans pour autant renier le passé avec notamment en clôture, la lecture de « Lettre à la République » paru sur l’album 92.2012. Faire se rencontrer les publics (tous les publics) au théâtre était un défi osé; le combat continue, qu’on soit côté cour ou côté jardin.

À vif se joue au TNB jusqu’au 27 janvier

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