Dolziger Str.2 – Odezenne est un corps à prendre

Après Sans chantilly, OVNI et Rien, Odezenne sortira le 13 novembre prochain son quatrième « projet » : Dolziger Str. 2. De quoi partager notre avis sur cet album très particulier, comme à l’accoutumée lorsqu’il s’agit d’Odezenne. Pardon ? Vous ne connaissez pas ce groupe issu de la scène parisienne et bordelaise ? Ne vous inquiétez pas, on va vous aider. Quand on parle d’un album d’Odezenne, c’est comme si un puzzle immense se présentait devant vous et que vous seul pouvez agir pour rassembler les pièces. Un puzzle qu’il faut à tout prix décoder. Qu’en est-il avec Dolziger Str. 2 ?


« Les grands de ce monde je les calcule pas » (Souffle le vent)

dolzingerLa première fois que j’ai entendu « O2zen », c’était sur l’excellent morceau « Et plus si affinités » de Moi-même FlowJe me suis seulement rendu compte cette année en 2015 que c’était bel et bien Al et Jaco (sans oublier Dj Lodjeez) sur ce titre qui accompagnait le MC parisien. On parle à l’époque d’adultère, de rap, de beaux et de mauvais sentiments. La résultante de plusieurs conflits intérieurs en quelque sorte. Plusieurs années après, les deux MC ont évolué dans différents registres. Déjà au niveau des prods : depuis que Mattia a rejoint le groupe, celui-là lui a insufflé une autre dimension sonore. Et surtout, au-delà de l’aspect qualificatif de leurs sons, ils font étalage d’une communication très particulière à base de concerts gratuits, de clips peu normaux comme à Noël, de freestyles à la radio, de justification du prix des albums auprès de son public, d’écrans télés ou de portes défoncées. Bref, c’est assez transparent et détonnant. Cela montre avant tout qu’on n’est pas obligé de vendre une « bonne » image pour être « acheté ». Ils sont « eux-mêmes » ou du moins ils en ont l’air, c’est déjà pas mal ! Alors pourquoi Dolziger Str.2 ? Il faut savoir que Dolziger Str. est d’abord une rue située à Berlin. Ils ont certainement fréquenté les lieux pour que cela les marque autant. C’est sans doute le cas puisque le crew est parti vivre à Berlin en 2013 et y avait déjà enregistré Rien. Il est utile de comprendre que Rien a marqué une nouvelle étape dans le sillage d’Odezenne. Dans Rien, ça rappe mais pas trop, ça chante mais pas comme les rossignols et les sujets sont exprimés avec un pseudo-nihilisme et une certaine conception spirituelle qui en a déconcerté plus d’un (ex : Je veux te baiser). Les images et les symboles ont une grande importance dans les bouches d’Odezenne.

D’ailleurs, à la première écoute de Dolziger Str.2, j’étais… perdu. Comme d’habitude, les albums d’Odezenne sont des chemins jonchés de ronces et d’embuches et il faut parfois piocher sévère pour espérer comprendre le fin mot de l’histoire. Dieu, la mort, l’amour, ce qu’on vit, ce qu’on ressent, ce qu’on vomit. Odezenne, c’est l’expression la plus noble et à la fois la plus malsaine de nos pensées. Celles qui se cachent dans les méandres de notre inconscience. Productions sonores au ralenti, parfois lentes et lancinantes avant de subir de violentes accélérations de plein fouet. On passe les vitesses dans le désordre. C’est perturbant. C’est même dérangeant. Et c’est le kif ! Bon… à l’Imprimerie Nocturne, nous sommes parfois dérangés aussi. Les morceaux sont teintés d’une nostalgie mélancolique, d’instants fragiles dont l’orgue symbolise cette ambiance, n’hésitant pas à vaciller entre l’envie d’en découdre,  celle de se laisser aller ou celle de mordre dans le vide. Un vide rempli de bons et mauvais souvenirs. Halo, c’est Dolziger.

« Je cultive le pessimisme en haut de ma colline » (Satana)

Odezenne-Photo2015MathieuNIETO (1)On commence alors par « Un corps à prendre ». Drôle d’introduction. Jaco ouvre le bal à toute vitesse : « Si la chance veut tourner dans un sens, Arrogant ne perds pas ton beau temps à prier ». Le beat entre en scène. Action. Ce titre raconte la douce séparation entre ce qui nous rend vivant et ce qu’il ne l’est plus quand Bouche à lèvres s’éclate au lit et nous raconte la petite mort et les gouffres immenses qui nous séparent des un(e)s et des autres. Titre énergique et carnivore. On comprend très vite qu’Odezenne raconte ses bons comme ses mauvais penchants. « Vilaine ». On hoche la tête, ça y est. « Doudou se dégoûte » dit Al. L’ivresse démarre. « Je ne crois pas que je t’aide » recommence-t-il dans « Cabriolet ». « Quand souffle le vent, s’essouffle le temps » répond Jaco. « Souffle le vent » est certainement « ZE » morceau de l’album. « Je veux de la vodka, devenir rigolo » continue-t-il sur « Vodka », un morceau très expressif et remarquablement produit. Un autre appel à l’ivresse sur gros fond de tristesse. Un hymne aux rêves enfouis et aux ambiances paillardes. Très mélancolique. Cette chanson s’opposerait presque à « Boubouche ». « Entrez dans ma danse, entrez dans ma bouche » ou le je-m’en-foutisme d’un type lambda sur fond de techno parfait. Le rythme frénétique et entraînant coïncide avec la spirale infernale du texte et du ton employé par Al : très lent, désabusé : « Les anges, mais qui peut bien s’en soucier ? »

Après un petit au revoir (qui me fait étrangement penser à une track de la bande son du jeu FF7… ah mon passé de gamer…), « Satana » prend des allures d’apocalypse : repli sur soi destructeur « Je suis juste une petite merde issue d’un gland » ou encore « Je ne suis pas un porte-parole, je ne tiens jamais la mienne », on assiste à un très beau texte livré sur la quête de soi et de ses inaptitudes à faire face. Mais faire face à quoi ? « Les réponses aux questions, je les laisse aux Grosses Têtes » nous répond Odezenne. On naît on vit on meurt conclut la marche. Une marche haute sur laquelle on a sauté à pieds joints. Dolziger Str.2, c’est finalement l’histoire d’un saut vertigineux qui peut se faire n’importe où et n’importe quand et sans atterrissage forcé. Dolziger Str.2, c’est le combat de l’instant présent contre l’infiniment grand. Alors perdez-vous. Et vite !

« Bouche à lèvres  » – Extrait de l’album d’Odezenne Dolziger Str.2 – 10 titres, sortira le 13 novembre 2015


En concert à l’Antipode MJC le 13 novembre

Restez à l’affût, concours à venir sur l’Imprimerie

12.11.2015 – Paris (75) – Festival Les Inrocks – La Cigale
13.11.2015 – Rennes – L’Antipode
14.11.2015 – Orléans – L’Astrolabe
18.11.2015 – Rouen – Le 106
19.11.2015 – Bruxelles – L’Orangerie
20.11.2015 – Londres – Oslo
21.11.2015 – Lille – Grand Mix
27.11.2015 – Nantes – Stéréolux
03.12.2015 – Strasbourg – La Laiterie
04.12.2015 – Lyon – Ninkasi
05.12.2015 – Montreux – Le Ned
09.12.2015 – Clermont-Ferrand – La Coopérative de Mai
10.12.2015 – Toulouse – Metronum
11.12.2015 – Montpellier – Rockstore
12.12.2015 – Marseille – Le Moulin

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