Ils étaient attendus à Rennes depuis l’été : Snarky Puppy jouait donc à guichets fermés jeudi 13 novembre au Diapason dans le cadre du festival Jazz à l’Ouest. Un groupe jazz fusion qui a mis le feu à la salle.
Et l’Imprimerie avec la complicité de l’émission Le Comptoir de la Soul en a profité pour poser quelques questions à Michael League, bassiste du groupe.
■ Quelle sont vos inspirations musicales, pour vous et pour le groupe ?
Il y a beaucoup de gens différents dans le groupe, tout le monde est très ouvert d’esprit quand il s’agit d’écouter de la musique, donc nous écoutons constamment des bonnes musiques de beaucoup de différents styles, donc nous puisons l’inspiration dans beaucoup de styles différents. Moi personnellement, j’aime lire, l’architecture et l’art, et je trouve vraiment cool de pouvoir trouver de l’inspiration de formes artistiques différentes de la musique.
Donc je pense que la combinaisons de ces choses, et le fait de voyager, de voir le monde, rencontrer des gens différents et tout ce qui va avec cela nous garde inspirés.
■ Pour vous, que veut dire le jazz ?
Dure question, je veux dire à chaque fois que vous définissez une musique avec un style,un nom, une généralité, c’est un peu comme si vous demandiez un argument…
Or pour qu’un genre aille de l’avant, il a besoin de changer. Pour moi je pense qu’il y a certains éléments de musique qui ont à être là pour en quelque sorte être considéré comme du jazz, il doit y avoir de l’improvisation, doit être inspiré par la musique blues américaine… Et un autre élément que je trouve essentiel, mais que je pense que vous retrouverez dans la majorité des musique issues du jazz, c’est qu’il y ait une énergie créatrice que essaie de pousser vers les choses vers l’avant & qui permet d’explorer son inspiration, ainsi que la communication entre les membres du groupe sur la scène… Je pense que ceci la rend différente de beaucoup d’autres formes de musiques.
■ Quand je vous ai vus au Paris Jazz Festival, la chose qui m’a le plus impressionnée fut l’échange avec le public, cette énergie que vous lui transmettiez… Je ne comprenais pas cet aspect de votre musique avant de venir vous voir et là je me suis dit « Holy Shit Man! That’s the real deal! » et ce fut comme une claque en plein visage…
J’espère que ça ne faisait pas mal! Oui Je pense vous voyez, qu’une des raisons pour laquelle le jazz est vraiment mort dans le sens d’être populaire avec le public c’est que les musiciens de jazz ont au fur et à mesure du temps, du moins c’est ce que je ressens, cessé de communiquer avec les gens normaux et ont plus ressenti le besoin de communiquer avec les autres musiciens, donc j’ai fini par penser que la musique est devenue un peu fermée et est devenue une sorte de « musique pour musiciens » et je pense qu’il est de notre responsabilité de musiciens d’atteindre un public de gens normaux, un public de non-musiciens.
Juste des gens qui aiment la musique mais n’en jouent pas forcément. C’est pourquoi nous essayons vraiment vraiment de communiquer, autant que possible.
■ Quelle genre d’atmosphère cherchez-vous quand vous enregistrez vos albums avec un public ?
Ce qui est cool est le fait d’avoir une très bonne qualité de son car nous enregistrons en studio, mais parce qu’il y a du public avec nous il y a beaucoup d’énergie et nous pouvons communiquer et jouer pour ces gens! Donc c’est un peu les meilleures choses issues du fait de faire un album studio et de faire un concert le tout en une fois.
■ Et comment avez-vous choisi le public ?
La première fois c’était juste des amis, et la fois suivante nous avons vendu des tickets!
■ Et avez-vous différentes personnes avec qui vous voudriez jouer à part le groupe, comme un Femi Kuti ou un Seun Kuti?
Oh, yeah! Nous avons fait un album qui s’appelle Family Diner où l’objectif est de collaborer avec des chanteurs, un invité par chanson pour être exact. Ce premier essai fut si marrant que nous en préparons un second pour février qui sera enregistré à la Nouvelle-Orléans, et les invités seront incroyables! Je ne peux pas annoncer qui il y aura, car on l’annonce la semaine prochaine, mais ce sera vraiment vraiment excitant! Ce second Family Diner aura beaucoup plus d’artistes connus, car le premier nous a donné la notoriété pour pouvoir atteindre ces gens-là. C’est notre propre façon de partager la scène et faire des projets avec des gens que nous respectons.
■ Vous avez votre propre façon de jouer ensemble, et lorsque que quelqu’un arrive qui a sa propre façon de travailler, n’est-ce pas trop difficile de vous mettre en accord pour que l’alchimie marche ?
Je pense que c’est en fait un avantage, car Snarky Puppy est tellement habitué à jouer les uns avec les autres, nous avons une telle alchimie, que lorsque l’on amène une personne c’est beaucoup plus facile que de jouer comme si nous étions un nouveau groupe. Car nous amenons notre alchimie, notre son pour cet artiste. Il peut vibrer avec nous, et je trouve cela très chouette.
« On peut voir que le jazz grandit dans une belle direction. »
■ Et qu’est-ce que vous pensez de la nouvelle génération de jazzmen, comme par exemples Shai Maestro, Tigran Hamasyan, Ibrahim Maalouf ?
Je ne pense pas qu’il y ait eu une période de temps où le jazz a autant regorgé d’autant de musiciens incroyables. La question est, à quel point la réception de cette musique est bonne par le public et quelle influence elle aura dans le monde de la musique. Et je pense que nous sommes dans une période de temps où de plus en plus de grands musiciens de jazz sont reconnus hors du monde du jazz. Comme Shai Maestro, Tigran, Esperanza Spalding, Robert Glasper qui sont de plus en plus connus par les gens, et notamment chez les jeunes. Et cela permet de renouveler une ère musicale. Je trouve que c’est une chose magnifique, et chez quelqu’un comme Glasper qui insère des éléments du hip-hop, ou Shai qui insère parfois des éléments presque classiques, on peut voir que le jazz grandit dans une belle direction. Je pense qu’il y a de l’espoir, que tout n’est pas perdu!
■ Snarky puppy est plutôt dans le coté urbain du jazz ?
Oui ! Je pense que nous prenons de beaucoup de différents endroits, mais nous prenons définitivement auprès du gospel, de la soul, du hip-hop, du r’n'b et du monde de la musique noire américaine. Et également de la musique tout autour du monde, Astor Piazolla d’Argentine, beaucoup de musique du Brésil et Salif Keita au Mali… Nous sommes vraiment influencés par beaucoup de gens différents, et nous prenons tout ce que nous préférons quand nous jouons avec Snarky Puppy.
■ Et préférez-vous les grandes ou les petites salles ?
Les petites évidemment, je veux dire, dans une petite salle tu peux voir le public et tu as une responsabilité entre lui et toi. Tu dois les divertir, et il est responsable du respect de la musique et quand la pièce devient trop grande tu perds cela…
Interview signée Lalaina
Émission Le Comptoir de la soul Radio Campus Rennes le mercredi de 20h à 21h.
Merci à Snarky Puppy, au Diapason et Jazz à l’Ouest pour leur accueil.