Chemin de croix, drame allemand miraculeux de Dietrich et Anna Brüggemann

Chemin de croix : ce beau drame (de Dietrich Brüggemann et sa sœur Anna) en forme d’interrogation sur le Bien et le Mal – à travers le prisme d’une secte d’une famille ultra bien-pensante – ne fera pas de mal, mais au contraire un bien fou.

Ach ! Le cinéma allemand !

Le long de 14 tableaux, filmés à chaque fois d’une traite (avec quelques jolis travellings ou en plans fixes qui retiennent l’attention), on suit les aventures de la jeune Maria, 14 ans (Lea van Acken). Celle-ci est éduquée à la dure par une mère fondamentaliste psychorigide (inquiétante et fascinante Franziska Weisz). Élevée à coups d’interdictions, de prières et d’homélies interminables en latin, de confessions hebdomadaires et de catéchismes vaguement flippants prodigués par le jeune et beau Père Weber (Florian Stetter), Maria souhaite donc devenir sainte – rien que ça. Y parviendra-t-elle ? Basée sur l’évitement des péchés et la multiplication des renoncements, sa quête de Dieu a-t-elle un sens – et si oui lequel ??? Une jeunesse faite de sombre obéissance et de frustrations continues, pendant laquelle tout plaisir est prohibé (notamment les musiques puisque les rythmes et les basses du rock ou du funk conduisent à la débauche) peut-elle déboucher sur autre chose qu’une profonde névrose (pour ne pas dire nécrose – car on discerne vite qu’il y a quelque chose de pourri de l’intérieur dans cette éducation) ?

Face au terrifiant portrait de cette famille d’une austérité accablante, on en redemande ! on est immergé dans une communauté religieuse racornie, comme dans une émission de Strip-Tease. Ces 14 tableaux à l’énergie ramassée, ces 14 stations* s’enchaînent, s’empilent plutôt, comme dans un jeu de cubes, et on sent bien que peu à peu on se rapproche du point de rupture. Le déséquilibre s’accentue… Le grotesque et la tension s’amplifient. La peine s’accroît. Chemin de croix, croyez-moi ou ne me croyez pas, est un itinéraire conseillé.

 

Chemin-de-croix_Vater-Weber

Expert ès prières latines et recettes dévotes, apôtre du sacrifice et soldat du Christ prompt à enrégimenter de nouvelles et malléables recrues, Vater Weber (l’admirable Florian Stetter) saura-t-il contribuer à élever l’âme de la pâle Maria (Lea van Acken) ?

Bref, n’était cette mamie assise à mes côtés qui tripota son portable puis renifla et se moucha tout le reste de la séance en respirant bruyamment et en faisant des petits bruits avec sa bouche, cette session au TNB en la grande salle Louis Jouvet aurait été parfaite.

* On ne parle pas ici de ligne de métro, mais du parcours douloureux que Jésus fit, portant sa croix, jusqu’au Mont des Oliviers.

 


Chemin de croix – Drame allemand de Dietrich et Anna Brüggemann – Ours d’argent et Prix œcuménique au festival de Berlin – Avec Lea van Acken, Florian Stetter, Franziska Weisz – Durée : 1h50 – Sortie le 29 octobre 2014

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