13e Note publie depuis 2009 des auteurs déjantés, en marge, des mecs qui vivent à fond, qui brûlent leur vie pour découvrir ce qu’il reste des cendres… des gars qui pourraient rappeler un certain Neal Cassady, l’acolyte de Kerouac et Ginsberg. La rumeur dit que les temps sont rudes pour 13e Note. Pour quelle petite maison d’édition les temps ne sont-ils pas rudes ?
Leurs publications valent toutes le détour pourtant. Pour ce qu’il y a dedans ! Pour les auteurs qu’on y rencontre, et leur style percutant. Et puis pour la qualité purement esthétique de leurs livres. Des couvertures simples et sophistiquées marquées du sceau « 13e Note ». Pour comprendre quel genre d’auteur, cette maison se plaît à éditer, je vous livre seulement un passage de leur auto-description :
« Depuis nos débuts au printemps 2009, les points clés de notre ligne éditoriale n’ont pas varié : littérature anglo-saxonne mais aussi française et latino, autobiographie, sex and drugs, street, aventure, déglingue, rédemption en option, extase si affinités… »
Et parmi les auteurs de cette Auguste maison, on retrouve Dan Fante, vieux chauve de 80 ans et fils du très renommé John Fante, l’auteur de Demande à la poussière et Mon chien stupide. Dan Fante, le rejeton, a hérité de la même passion que papa, pour tout ce qui se boit après fermentation. Mais du genre à ne pas être fâché du tout du tout avec le goulot. Il a passé ses 40 ans puis ses 50 et ses 60 ans comme un « looser », comme il se définissait alors lui-même. Un alcoolique invétéré. Subversif. Proche de Bukowski. Ils étaient amis. Buko était fan du père faut dire. Et nourrissait la même passion que le fils. Les mêmes passions. Le whisky et l’écriture. Leur style est proche.
Dan a multiplié les jobs en tout genre et les réveils difficiles, gerbe aux lèvres et œsophage en vrac. Sans compter le foie et l’estomac. Pendant tout ce temps, il écrit un peu, mais rien de concluant. C’est à 60 ans que ça se débloque. Depuis, c’est plusieurs ouvrages qu’il nous a pondus, des romans, des recueils de poésies, des pièces de théâtre.
Des livres qui se lisent avec euphorie
13e Note s’est démerdé parfaitement pour le dénicher et lui proposer d’être traduit et édité en France, chez eux. Et ça a donné quelques bons bouquins, dont En crachant du haut des buildings, La tête hors de l’eau et le recueil de poème Bons baisers de la grosse barmaid. Ça se lit tout seul, avec la même euphorie que provoquerait un bon litre de bourbon. On l’ingurgite de même. Avec aussi parfois le même dégout. Et la même envie de continuer.
Octogénaire rock’n'roll, chauve et tatoué
Chaque dialogue est bourré de cet humour d’ivrogne américain qu’on retrouve chez Buko ou encore dans certains échanges de Palahniuk. Bien que le dernier n’ait rien à voir, on pioche dans chacun de ses bouquins, au moins un ou plusieurs personnages dotés de ce caractère propre aux « Barfly ». Revenons à Dan Fante. L’octogénaire rock’n’roll, chauve et tatoué. Il va sans dire qu’il a hérité de la passion de son père pour la boisson, mais bien aussi du talent de son père pour l’écriture.
Assiduité du rythme. Franchise du récit. Dialogues acidulés. Autodérision. Autocritique. Provocation. Plus trash encore que le père. Oh ça se lit avec une de ces énergies… Dan Fante ça claque.
« Las Vegas est une grande tache de foutre, un égout pailleté. Même soûl je l’avais détestée. Elle est chaque jour plus grande et plus laide – une nappe de pétrole brillante et radioactive qui envahit et contamine le désert du Nevada. »
Où trouver les bouquins de 13e Note et de Dan Fante à Rennes ? Allez voir Max au Pécari Amphibie, il en raffole, il pourra vous proposer quasiment tous les Fante disponibles et d’autres auteurs de cette gentille petite maison d’édition.
Dan Fante, La tête hors de l’eau, 13e Note Édition, 2012
Dan Fante, En crachant du haut des buildings, 13e Note Édition, 2013
Dan Fante, Bons baisers de la grosse barmaid, 13e Note Édition, 2009