La Fab’, c’est deux Rennais, artisans du son et acteurs de la scène hip-hop locale. Rencontre avec Nos et Alexel, qui garnissent la table de l’Imprimerie de réflexions sur leur parcours, la scène rennaise et la vie qui passe à toute vitesse, avec en bonus deux titres inédits et des envies d’ailleurs. « Fidèle à notre éthique, tu connais la provenance » aurait dit Fisto. Pas mieux pour ces deux grandes gueules qui s’assument comme telles.
■ La Fab’ [anciennement la Fabrique, NDLR] qu’est-ce que c’est pour ceux qui ne vous connaissent pas ? Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Nos : Nous nous sommes rencontrés à l’époque du mouvement contre les CPE, en 2005, 2006. De mon côté, je faisais un peu de son avec DJ Kopt [Avec qui il a monté le groupe Kon7ept en 2006, NDLR]. Parmi les connaissances de Kopt, il y avait DJ Foch [Qui forme aujourd'hui avec DJ Kopt le duo Beat Traderz, NDLR], et un MC. Ce MC, c’était Alexel.
Alexel : Exactement. D’ailleurs, au départ je ne t’ai pas supporté [Rires]. Il faut quand même savoir que ce mec est une boule de nerfs. La première fois qu’on l’a vu rapper, c’était chez Kopt. On venait faire quelques enregistrements et lui était là. On a commencé à faire tourner les instrus et le mec était surexcité, il sautait dans tous les sens, il rappait, ne s’arrêtait plus.
Nos : [L'interrompant] Ça ne me ressemble pas ça c’est faux ce que tu racontes !
Alexel : Et je me souviens, la première fois que je suis ressorti de chez mon pote je lui ai dit « Il est gentil mais il est fatiguant ». Et puis au final on s’est recroisés sur pas mal de soirées et le feeling est passé.
Nos : À ce moment-là, je bossais pas mal avec Kon7ept, mon ancien groupe, et puis Alex passait pas mal pour faire quelques freestyles. Du coup quand le groupe s’est dissout, on avait déjà fait un ou deux morceaux ensemble et on a continué. En fait, tout ça s’est fait naturellement et c’est d’abord une histoire d’amitié. Cette amitié plus la musique ont donné naissance à La Fab’. Au début on s’appelait simplement Nos et Alexel mais au final ce n’était pas très porteur, alors c’est devenu La Fabrique, tout simplement parce qu’on fabrique de la musique.
Alexel : Ce nom, c’est aussi pour montrer qu’on ne fait pas des projets à échelle industrielle. On fait nos disques un peu au compte-gouttes. Et avec le temps et devant le nombre de projets ou de groupes qui ont aussi utilisé ce nom, on a décidé de l’abréger. Mais pour beaucoup de gens, on reste La Fabrique, et puis ce qu’on aime dans La Fab’ c’est le petit côté 2.0 .
Nos : Dans l’esprit, La Fab’ restera la même chose que La Fabrique, ce seront juste la forme et les ingrédients qui changeront.
« Aujourd’hui on a envie que les gens qui écoutent notre musique se marrent autant que nous »
■ Vous aviez appelé votre premier projet Crash Test. Est-ce qu’on peut voir une double signification dans ce titre : premier test donc la peur du crash ?
Nos : Oui, quand tu envoies ton premier projet, tu sais que tu te mets un peu dans une position casse gueule.
Alexel : Dans la forme, on a peut-être aussi été ambitieux. Autant on a sorti le projet gratuitement, donc il n’y avait pas d’objectif de chiffres ou autre. Mais c’était un LP de 20 titres sur lequel ça rappe non-stop, donc c’est un format assez lourd. Même sa conception a été longue…
Nos : Oh oui, ça a duré de 2011 à 2013. Et encore, on a mis un coup de collier à la fin ! Sans ça, je pense qu’on y serait peut-être encore.
Alexel : Au-delà de tout ça, le titre voulait aussi représenter le côté un peu violent que peuvent avoir les choses. On a chacun eu un vécu différent, et on s’est tous pris des trucs dans la gueule. C’était aussi pour retranscrire un peu tout ça.
■ Le dernier morceau de Crash Test s’appelle « Une page qui se tourne ». Marque-t-il le commencement de La Fab’, la fin avec Kon7ept ?
Nos : Peut-être un peu. Quoique Kon7ept était déjà fini… Après le son a aussi un double sens, les paroles le disent d’ailleurs. On savait déjà qu’après ce disque, on souhaiterait passer à autre chose, donc oui, musicalement, c’était une page qui se tournait. Mais quand tu bâtis un disque pendant deux ans, à côté, la vie avance. On a eu des décès parmi nos amis et nos familles, on a vu des petits à arriver chez les copains. C’était une période de transition entre la fin des études et le début de la vie professionnelle.
Alexel : D’ailleurs, ce titre, on l’a enregistré vraiment dans les dernières semaines du projet. Contrairement à d’autres morceaux, celui-ci on savait déjà où on voulait le placer : à la fin du disque ! C’est un peu la synthèse des deux ans à fabriquer Crash Test, avec à côté la vie qui continue. Donc oui, il y a une page qui se tourne, mais pour continuer à en écrire d’autres. On voulait vraiment montrer que derrière il y aurait une suite, même si on ne savait pas encore quand ni comment.
■ Votre second projet, Déviances, sort normalement cette année. Sera-t-il une suite de Crash Test ?
Nos : Dans l’esprit, tu pourras toujours trouver des similitudes, mais dans la forme non. Déjà il y aura beaucoup moins de titres. Du coup, ça sera peut-être moins casse gueule. Et musicalement ça va être très différent. On est parti sur des choses beaucoup plus électro. On n’avait encore jamais exploité ce style musical, alors qu’on aime tous les deux ça ! Je suis un grand fan de drums and bass et Alex aime tout ce qui est dubstep et autre.
■ Avec qui allez-vous collaborer sur ce projet ?
Nos : Il y aura des productions d’Artisanal, Enerku et James Lega, qui rappera aussi sur un morceau. DJ Foch et Ysmé seront également présents sur quelques prods. Dans un sens, ce sera des sons plus variés que sur Crash Test car il y aura la patte de plusieurs beatmakers. Mais de l’autre ça correspondra vraiment au style qu’on veut avoir actuellement.
Alexel : Il y a aussi DJ Ober sur une production, et là ça va être n’importe quoi. Ça va être le clou du spectacle si je puis dire.
Nos : La cerise sur le clafoutis on avait dit !
■ Du coup, on doit s’attendre à des surprises ?
Nos : Oui, je pense même que quelques morceaux vont en déranger certains comparé à ce qu’ils ont entendu de nous précédemment. Mais je pense que ce sera plus ouvert que Crash Test.
Alexel : Les gens qui ont aimé Crash Test vont découvrir un mélange des styles, avec vraiment une autre façon d’aborder les productions.
« Souvent on dit que le public est chaud à Rennes, moi je ne suis pas d’accord avec ça. Il est vraiment distant, surtout si c’est des soirées où il n’y a pas d’alcool »
■ Déviances, pourquoi ce titre ? C’est lié à cette nouvelle approche musicale ?
Nos : Oui, quelque part, en allant vers des sons comme ceux qu’on a choisis, il y a une forme de déviance dans notre travail. Ce qu’on écoute et ce qu’on produit aujourd’hui n’a rien à voir avec hier, que ça soit en termes de flow, de technique d’écriture ou de thèmes abordés. Avec Alex, on rigole tout le temps, on passe notre temps à dire des conneries. Dans Crash Test tu ne ressentais pas forcément cet aspect de notre quotidien, de notre personnalité. Tout en gardant un œil sur ce qui se passe véritablement, Déviances sera beaucoup plus léger que notre premier projet. Aujourd’hui on a envie que les gens qui écoutent notre musique se marrent autant que nous. C’est encore une page qui se tourne.
Alexel : Dans Déviances, il y a aussi le reflet de ce mode de vie où on aime faire la fête, se mettre dans des états qui peuvent paraître assez flippant pour des gens qui n’ont pas l’habitude de ça.
Nos : Je vais dire qu’on est des gens droits, on travaille, on fait ce qu’il faut pour. Mais quand il s’agit de pas être sérieux on ne le fait pas à moitié non plus.
■ Vous vous êtes pas mal produits sur la scène rennaise et sur la côte bretonne. Que pensez-vous aujourd’hui de la scène hip-hop de Rennes ? Le public est réceptif à votre travail, à vos projets ?
Alexel : Le truc c’est qu’à notre échelle, dans les scènes rennaises, tu croises tout le temps les mêmes têtes, donc tu peux croire que t’as un truc qui est super cool, mais au final les gens que tu vas croiser ce sont toujours les mêmes. Ils vont te dire « ouais c’était cool, c’était vachement bien », sauf que ces gens-là savent déjà ce qu’est La Fab’, quel style on aime. Du coup il n’y a rien de nouveau. C’est un peu frustrant.
Nos : De toute façon, on n’est pas un groupe qui ramène des tonnes de personnes et qui remplit une salle. Mais c’est vrai que je suis beaucoup plus touché par des retours de gens qui n’ont rien à voir avec la scène rennaise. Par exemple, quand on était aux End of the Weak à Rennes, un mec qui était de Mayenne et qu’on n’avait jamais vu nous a reconnus. Tu vois, c’est bête, mais le mec on ne le connaît pas et qu’il vienne nous voir spontanément, ça veut dire que le son tourne. Quand quelqu’un qui n’est pas issu du milieu avec lequel tu travailles, qui ne vient pas de ta ville, vient te dire qu’il aime ce que tu fais et qu’avec ses potes, ils te suivent, mine de rien, ça fait chaud au cœur ! Tu te dis que si tu arrives à sortir de ton carcan, de ta ville, tu peux aller plus loin.
Alexel : Finalement, on est presque plus satisfaits quand on arrive dans un endroit où personne ne nous connaît. L’an dernier, on a fait un festival à mille lieux de nos délires habituels, limite ambiance camping un peu. Finalement c’était super sympa. Personne ne nous connaissait, les gens n’avaient jamais entendu notre musique, on s’est pointés là, on a fait notre truc, et on s’est retrouvés avec cinquante potes à la fin de la soirée. Quand t’arrives dans des endroits où tu ne connais personne c’est ce qui il y a de mieux, et c’est pour ça que des fois j’aimerais faire des scènes dans d’autres villes comme Nantes ou à l’occasion Paris. Souvent on dit que le public est chaud à Rennes, moi je ne suis pas d’accord avec ça. Aujourd’hui, je trouve le public rennais vraiment distant, surtout si c’est des soirées où il n’y a pas d’alcool. Ça devient vite limité, et tout le monde se connaît pour ce qui est du public hip-hop. La plupart des salles sont assez frileuses sur le hip-hop en plus, donc les relais sont rares. Le 4bis est l’une des rares à nous donner l’opportunité de faire des scènes.
Nos : En fait le public est chaud ici, pour des gens qui ne sont pas d’ici.
Découvrez les secrets de fabrication d’Alexel et Nos, leurs aventures solos, et leur dernier titre en exclu dans les portraits ci-dessous !
Les secrets de fabrication d'Alexel
- Ses premiers contact avec le rap.
Mes premiers contacts avec le hip-hop se sont faits par l’intermédiaire du graffiti et des cassettes de rap que j’ai découvertes à 8, 9 ans. À cette époque, les radios passaient encore beaucoup de trucs cool, du coup c’est resté et j’ai grandi avec cette culture. Au fur et à mesure, j’ai écouté de plus en plus de rap américain, du boombap, des choses très classiques, puis j’ai commencé à rapper à l’âge de 15, 16 ans. C’était entre potes, y en avait un qui s’occupait des instrus grâce à des logiciels, on enregistrait ça sur cassette, et dès qu’on avait un peu de temps, on se posait ensemble et on faisait des freestyles. On a commencé comme ça. Puis j’ai croisé pas mal de mecs qui faisaient du son aussi et voilà. Ce n’était pas très sérieux, on faisait ça pour le plaisir. Après on a commencé à réaliser des maquettes et ça a évolué comme ça, jusqu’à un premier projet solo en 2011 et La Fab’ qui est le groupe que je forme aujourd’hui avec Nos.
- Son arrivée au sein du label Noircity.
Ce fut une très bonne surprise ! Je connais un peu LeDaw depuis quelques années maintenant et on s’est retrouvés dans Apéro Smooth où on était tous les deux de la partie. Il y a un an environ, on s’est dit que ce serait pas mal qu’on se voit une fois de temps en temps pour poser quelques petits trucs ensemble, mais sans avoir non plus d’idées très précises. Sur une période de trois mois on a produit quelques morceaux, et parmi eux, il y a eu le titre réalisé sur l’instru de « Bitch don’t kill my vibe » de Kendrick Lamar. James Lega qui faisait déjà partie de Noircity l’a vu et en a parlé à Ripklaw, l’initiateur du label. Entretemps on a réalisé un maxi, on y a intégré ce morceau et il nous a proposé de le produire sous le label.
- « Bitch don’t kill my vibe » de Kendrick Lamar.
Au départ ce morceau était un délire. Pour nous on avait bouclé le maxi. En entendant cette prod’, on a eu envie de faire un freestyle dessus. On l’a enregistré et on s’est pris au jeu. On a décidé de le mettre sur le maxi qu’on faisait avec LeDaw et de le clipper. Par ses connaissances, LeDaw a réussi à ce qu’on nous prête un manoir, une voiture de collection et tout l’attirail, mais vraiment avec l’idée de rester dans ce délire de branleur, sans prise de tête ni rien. On voulait vraiment que les gens le voient comme un délire. Et finalement, au niveau des retours, ça ne s’est pas tant que ça focalisé sur la production choisie.
« Dans le rap, aujourd’hui, il y a plein de styles différents. Ça c’est vraiment cool, ça montre qu’il y a une vraie créativité »
- Les projets solo.
Mon premier projet solo, c’était un mini album, qui est arrivé en 2011. C’est un projet qui était déjà en construction, certains morceaux avait étaient préparés dès 2008/2009. J’ai mis beaucoup de temps à le faire car c’était un peu une organisation « merguez » ! Suite à sa sortie, et alors que j’étais déjà en duo avec Nos, il y a eu pas mal d’encouragements. Du coup je continue beaucoup plus sérieusement dans la musique mais tout en gardant une part de plaisir. Actuellement je prépare d’ailleurs un maxi, dans lequel j’aimerais inclure le morceau « Ma Clique », dont le clip devrait bientôt sortir. Un maxi où il n’y aurait que des prods de beatmakers du label Noircity. Et j’ai sûrement un autre projet aussi, probablement encore un maxi, que je vais surtout réaliser pour moi si je puis dire. Je ne sais pas encore s’il sera sous le label Noircity. Il se fera sûrement avec Dj Foch, un pote de longue date.
- Sa vision et son éthique du rap.
Pendant un moment j’ai été un peu « ancienne école ». Pour moi, en plus d’être bien fait, le rap doit garder un minimum de conscience. Même si ça me fait vraiment marrer, je ne suis pas fan des discours à la Kaaris ou autre parce que ce n’est pas ce qui me correspond. Après chacun est libre de faire ce qu’il veut au niveau musical, j’écoute ou je n’écoute pas, c’est tout. Je ne vais pas aller critiquer si ce n’est pas mon délire à la base. D’ailleurs, ce que je trouve dommage, c’est qu’aujourd’hui plein de gens s’auto- proclament « penseurs de la musique ». Surtout qu’on trouve quand même énormément de projets dans le rap, qui touchent plein de styles différents. Tu peux passer du boombap à des choses un peu plus trap par exemple, il y en a vraiment pour tous les goûts en fait ! Ça c’est vraiment cool, ça montre qu’il y a une vraie créativité. Alors pourquoi j’irais perdre mon temps à critiquer des projets que je n’aime pas ?
Écoutez « Ma Clique », extrait exclusif du prochain album d’Alexel
Les secrets de fabrication de Nos
- Son parcours rap.
J’ai commencé la musique dans les années 1999/2000 en écrivant mes premiers textes, et c’est devenu sérieux à mon arrivée à Rennes en 2003. J’avais un crew qui s’appelait Kon7ept avec deux gars de Saint-Malo et un autre de Rennes qui s’appelle Kopt avec lequel je bosse toujours. On a fait quelques scènes, quelques projets et on a terminé avec la première partie de La Rumeur en 2011. Puis le groupe s’est un peu desolidarisé pour diverses raisons, que ce soit personnelles ou professionnelles. Aujourd’hui, il y a La Fab’, le duo que je forme avec Alexel. On a sorti un premier album qui s’appelle Crash Test, et on en prépare actuellement un deuxième qui s’appellera Déviances.
- La première claque d’auditeur rap.
Illmatic de Nas, sans hésitations. Je l’avais en cassette, c’était en 1994 ! J’écoutais aussi pas mal TSN, Les Sages Poètes de la Rue. J’avais 8 ans à ce moment-là, et un an plus tard il y a eu Paris Sous Les Bombes de NTM. Illmatic m’a clairement donné envie de faire ça. Et l’idée d’écrire m’a toujours beaucoup plu. En fin de compte, je pense que ces envie de découvrir du son et d’écrire des textes sont venues très naturellement.
- Question de Posture, son projet solo.
Jusqu’à maintenant, j’ai toujours travaillé en groupe, que cela soit avec Kon7ept, avec La Fab’ ou à travers différents featurings. En 2011, j’avais essayé de faire un 6, 7 titres en solo mais je n’étais pas convaincu du truc. J’ai donc remis le couvert et sorti Question de Posture il y a quelques semaines. Ce projet, c’est aussi en réaction à l’image un peu agressive et trash qui me colle toujours un peu à la peau. J’ai voulu prendre ça à contre-pied, pour montrer ce que je suis de manière un peu plus réaliste, de ne pas me faire enfermer dans une case. Ca donne ce 11 titres, sur des thèmes assez variés, un peu nostalgiques. C’est un projet que j’ai plus vu comme une démonstration textuelle que comme un exercice de style rap.
- Question de Posture, un titre en réaction.
Dans tous les milieux, tu te rends compte que les gens sont assez souvent des girouettes en fait. Les gens aiment bien se placer. Moi j’aime les gens francs, qui disent ce qu’ils pensent, qui font ce qu’ils disent. J’ai horreur de l’entourloupe, et au final j’aime les choses simples et carrées. Et j’ai remarqué que dans la musique, tout le monde essaie de tirer la couverture à soi, quel que soit le genre, le rock, la drum, l’électro, le rap. « Question de Posture » c’est aussi en réaction à ça : pendant que vous êtes tous en train de tirer la couverture à vous et d’essayer de créer un buzz qui au final ne reste que local, moi j’en ai rien à faire, je suis en retrait de tout ça. Voilà ma posture, et cela même si sur certains morceaux j’ai l’air revanchard.
- La concurrence entre les artistes.
Il y en a moins maintenant qu’il y a quelques années. Je pense que tout le monde a bien compris qu’il ne vivrait pas immédiatement de sa musique, même certaines personnes qui sont un peu têtes d’affiche de la ville. Les gars qui sortent des projets, même les plus anciens d’entre nous, ils ont une vie et un boulot à côté. Mais c’est vrai que quand on avait tous vingt ans, on se disait dès le début qu’on percerait, qu’il fallait faire sa place. Dix ans plus tard, on est tous revenus de ce genre d’idées. Personnellement je fais ma musique pour le plaisir et le divertissement avant de penser au reste, comme la notoriété par exemple.
« Je suis comme ça : une grande gueule qui aime l’humour au 70e degré »
- L’inspiration, le choix des thèmes.
C’est très aléatoire ! J’ai toujours vu la musique comme un divertissement accompagné par une véritable émotion. Au final, entre un rappeur pseudo-engagé qui ne cherche que le buzz et un un artiste qui ne rappe pas forcément grand-chose d’engagé ou de super-évolué, je vais préférer le deuxième. Pour mon écriture, ça se joue aussi très souvent à l’instrumental. Souvent, c’est elle qui fait aller vers un thème, qui peut aussi bien être du vécu que des sujets de société, ou n’importe quel autre sujet ou délire auquel tu accroches !
Son style d’écriture, l’héritage d’un parcours personnel.
Que ça soit lié à une histoire personnelle c’est évident. J’ai grandi dans un milieu qui était une classe moyenne, enfant d’ouvrier et j’en passe. Du coup j’ai connu un milieu assez spécial où effectivement, si tu n’es pas le plus fort à gueuler tu ne te fais pas entendre. Donc oui je pense que c’est aussi ce qui m’a forgé. Avec ce côté grande gueule, il y a de l’ironie, car je suis comme ça : une grande gueule qui aime l’humour au 70e degré. Je suis à la fois en groupe et solitaire.
- Le morceau « Rain City Blues », clin d’œil à Rennes.
Rennes a toujours ce côté de « Vivre en intelligence » comme ils disent, une ville étudiante que les Parisiens appellent le mini-Paris. Moi ce n’est pas le Rennes que je connais. Le Rennes que je connais c’est celui de 2h30 du matin devant le Petit Vélo, les mecs alcoolisés, et ça tu n’en entends pas parler dans les journaux. Je pense que ce morceau montre un véritable fossé entre ce qu’on dit de la ville et sa réalité quotidienne. Et « Rain City Blues » n’essaie pas forcément d’enfoncer le clou…
« Le Rennes que je connais, c’est celui dont tu n’entends pas parler dans les journaux, celui de 2h30 du matin devant le Petit Vélo avec les mecs alcoolisés, pas celui du Mini-Paris comme disent les Parisiens »
- Son ancien groupe, Kon7ept
On a commencé à 14 ans avec les gars, dont Rhaps et Skribe, et on a monté plein de groupes avec des noms comme Double face ou Frénétique. Un jour on a eu un concert en 2004 au Grand Cordel, mais le groupe s’était déjà séparé une fois pour des questions d’affinités. Du coup, avec un autre pote DJ on avait monté un set qu’on avait appelé Le Kon7ept. J‘ai invité mes potes à faire le truc et avec la rencontre de DJ Kopt et DJ Foch on a remonté le groupe. On avait pour projet de sortir un album mais au final on a sorti un maxi 7 titres. On voulait en faire des déclinaisons : un 7.0, puis un 7.1, et un 7.2 etc., un peu comme des chapitres. Au final, on en a sorti 3, et on s’est arrêtés. Kon7ept, c’est un peu mon enfance, plein de souvenirs, quand j’en parle aujourd’hui, je suis plus dans l’affection que dans la musique. C’était les bonnes époques, et c’est aussi le moment aussi où j’ai rencontré Alex avec qui on a monté La Fab’.
- Le collectif Apéro Smooth.
Apéro Smooth, c’est un regroupement de MCs qui aiment la musique, faire la fête et faire des lois. Sauf que nous les lois on en a fait des morceaux. L’état d’esprit d’Apéro Smooth c’est la dérision et l’auto-dérision soutenues par un flow endurant.
- Les prochains projets.
Il y a le nouvel album de La Fab’ qui arrive. J’aurai un autre projet avec Ymsé, dont la date n’est pas vraiment fixée pour le moment. Le projet sera dans un délire un peu plus différent, ce ne sera pas comparable avec Question de Posture. Il s’appellera AMPM, et ce sera un petit 10 titre avec des influences plutôt trap et drum’n’bass, avec en exclu pour vous le titre Overdose !
- Un clip sorti récemment.
« Break the Bank » du dernier album de Schoolboy Q. Je l’ai trouvé magnifique visuellement.
Ecoutez Question de Posture, le projet Solo de Nos :
Interview réalisée par Camy