N’attendez pas pour « Attente »

Il s’agit d’un petit recueil de poésies. Il s’agit aussi d’une honorable maison d’édition. Et il s’agit surtout d’un auteur. Un auteur et une voix lumineuse. Attente, d’Amjad Nasser.

attente

La maison d’édition Al Manar fait un travail remarquable. Il ne s’agit ici de vanter les mérites de cette entreprise qui vogue tranquillement depuis 1998. Mais il convenait de souligner la qualité de leurs publications, la facture des ouvrages d’Al Manar y étant pour beaucoup dans la réussite de la combinaison entre l’art et la poésie, les textes courts et envoutant des voix de la Méditerranée.

Le recueil Attente d’Amjad Nasser est publié, en 2012, dans la collection Voix Vives. L’auteur est né en Jordanie, en 1955. Partisan palestinien, il s’engage très tôt dans le conflit et collabore notamment au magazine Al-Hadaf. Journaliste, il s’installe par la suite à Beyrouth puis à Londres où il fonde le journal al-Quds al-Arabi. Il écrit des poèmes depuis l’âge de 20 ans mais n’y intègre pas ses engagements politiques. Il fait partie de cette nouvelle génération de poètes arabes des années 80/90. Ses poèmes en prose sont imprégnés du quotidien. Certains poètes sont hermétiques, difficiles d’accès. Parce que la poésie est personnelle, elle trifouille l’intérieur, elle est le prélude de la voix. Elle est spontanée et maîtrisée à la fois. Mais certains poètes peuvent nous donner les clés de leur perception. C’est le cas d’Amjad Nasser. Chacun de ses mots semble nourri de la terre. Entre ces mots, il y a des odeurs, il y a des ombres qui dansent. Il y a des silences. Il y a un pays. Un homme.

« Sous les averses de la solitude »

Les portraits qu’il dresse filent comme un récit en prose. Le rythme pourrait être celui de sa voix, si nous en connaissions le timbre. À la première lecture nous vient une idée. À la deuxième, une autre. À la troisième, le récit a encore changé. Comme s’il voulait nous perdre dans ses pensées. Une poésie, n’est-ce pas cela ? À chaque instant, une épreuve différente, les mots ont d’autres goûts.

Tout au long de ce recueil, mince et dont chaque verso est consacré au texte dans la langue originale, nous suivons l’auteur dans son exil. Nous le suivons « sous les averses de la solitude », sans ciller, sans lever le nez. Nous le suivons parce que c’est agréable et que là où il nous perd, nous aimons y rester.

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