Éditée il y a maintenant deux ans, Habibi de Craig Thompson est une source inépuisable de plaisir visuel, de surprises scénaristiques et de virtuosité créative.
Habibi, ce sont trois récits qui se mêlent : les aventures de Dodola et Zam qui tentent d’échapper à leur condition d’esclaves dans un Moyen-Orient post-apocalyptique où la rareté d’eau potable dirige le monde, les merveilleuses histoires du Coran et une histoire de la calligraphie et de sa symbolique. Dans cette bande dessinée de près de 700 pages, fond et forme ne font qu’un et chaque planche est composée comme une architecture orientale dans laquelle cases et bulles se mêlent aux caractères de l’alphabet arabe qui se dissimulent dans le décor pour renvoyer à des poèmes ou des extraits du Coran. Le lecteur se retrouve partagé entre son admiration grandissante à chaque page tournée et son empathie pour les personnages qui se débattent dans un magnifique récit de vie qui pourrait être l’épopée intemporelle de ces humains renvoyés à une simple condition de marchandise.
L’auteur américain a voulu montrer dans son œuvre les richesses culturelles d’une civilisation et en redorer le blason si inconsidéré dans son pays. Et c’est une réussite complète, bien loin des clichés qu’on peut entendre sur le monde musulman et la région du Moyen-Orient, Craig Thompson nous livre une bande dessinée éloignée de tout manichéisme où l’on peut distinguer tout à la fois une admiration culturelle et une mise en garde politique.
Petit conseil pour finir, préférez l’édition marron et rigide bien plus agréable à lire que sa réédition blanche.
Article signé Lucas S.