Actuellement en tournée, Wax Tailor, artiste devenu incontournable sur la scène électro-trip hop, a posé ses platines au Liberté de Rennes le 29 mars. L’occasion d’en savoir plus sur ce conte musical et visuel, et aussi sur ses projets futurs.
Wax Tailor bonjour ! Tu es actuellement en tournée pour le projet Dusty rainbow from the dark ; ça se passe comment ?
On a eu une grosse tournée à l’automne, entre les États Unis et l’Europe on a fait une cinquantaine de dates, on est reparti aux États Unis en janvier, puis en Europe de l’Est en février, et nous revoilà en France. Le projet a bien pris forme, on a retrouvé certains automatismes de la scène, c’est agréable !
Un projet pareil, avec de la vidéo, beaucoup de matériel, plusieurs artistes sur scène, ça se monte comment ?
Ça reste un projet, de mon point de vue, alternatif et artisanal ; avec une grosse machine derrière, on sait tous que c’est possible d’avoir des résultats. Là c’est une petite équipe qui a bossé derrière, un noyau dur, avec un gros travail de création l’année dernière. Le fait que ce soit un album avec un narrateur, le côté album conté, il y avait pas mal de professionnels qui voyaient ça d’un œil méfiant en se disant que c’est un peu casse gueule. Au final les gens adhèrent.
Comment travailles-tu le lien entre le son et l’image ?
Il y a en effet un lien qui est constant et super présent dans mon parcours, c’est un truc qui m’intéresse vraiment. Par contre, ce que je trouve intéressant, c’est qu’on est actuellement dans une position où on arrive un peu à renverser la vapeur par rapport à ce qui est le discours constant que l’image est prédominante et que la musique arrive pour souligner, en deuxième plan. Sur un projet de cette nature, l’image est vraiment vue dans un deuxième temps. Le concept de l’album c’est le pouvoir d’évocation de la musique, la façon dont elle est un moteur à l’imaginaire au quotidien ; du coup c’est compliqué pour travailler les visuels, il faut créer un univers sans imposer une lecture de la musique. L’image vient donc souligner le propos musical, poser l’atmosphère et que ce soit une invitation.
Le gamin sur la pochette de l’album Dusty Rainbow from the dark qui joue avec des vinyles, est-ce que c’est toi ?
Non. A la base, non. Après objectivement, tu mets toujours un peu de toi. Au début tu mets de la distanciation, tu prends la précaution de dire que c’est pas toi. Dans la création il y a beaucoup de notes d’intention et c’est écrit nulle part ; je faisais ma propre histoire, le gamin va grandir à la fin des années 60, je m’étais imaginé le coup de la platine vinyle. Une fois que tout est terminé, en prenant du recul, tu te rends compte que c’est plus introspectif que tu croyais. Donc c’est pas calqué sur ma propre histoire mais il y a beaucoup plus que je ne le pensais.
Avec la narration qui est la voix de Don McCorkindale de la BBC, le conte est finalement uniquement en anglais ; est-ce que ça aurait pu te tenter de faire ça en français ?
Non. A chaque question je vais dire non ! Non en soi parce que musicalement on est clairement anglophone. Je ne m’interdis pas non plus le français, j’ai déjà fait des morceaux comme ça et il y a des choses que j’apprécie. Mais pour un album en entier je sais pas.. Le rapport à la langue est tellement différent, paradoxalement je n’y ai pas tellement de confort. J’ai un niveau d’exigence qui est pas le même non plus, il y a des choses que je fais passer en anglais que je n’arriverais pas à transmettre en français. La seule petite frustration pour être honnête, c’est qu’on est confronté à ça pour le live. Pour le disque, les gens ont le livret, l’histoire est traduite. D’habitude quand on me demande la différence de réception entre les Etats Unis et la France, je trouve qu’il n’y en a pas vraiment. Aujourd’hui c’est un peu différent ; en France le retour est positif sur le global, l’ambiance, les arrangements, les lumières, les vidéos, mais il y a un petit élément qui échappe à chaque fois c’est la narration. Elle est prise comme un gimmick mais tout le monde n’a pas intégré le truc de « c’est une histoire » et si c’était en français ils comprendraient mieux. On s’est même posé la question à un moment si on mettait des sous-titres, mais on a déjà trop de technique.
« Les victoires de la musique pour moi, c’est du folklore. »
Depuis tes débuts dans l’ombre jusqu’aux victoires de la musique, à des tournées internationales, comment gère-t-on ce passage à une grande notoriété tout en restant indépendant ?
Le café ! Je peux pas avoir la naïveté de te dire que je n’ai pas vu une évolution. Mais tu ne deviens pas non plus une super star internationale, ça reste humain et c’est pas ingérable. J’ai l’impression que dans le quotidien ça ne change rien, dans le rapport aux gens. Après c’est juste que parfois ça devient dur au niveau du planning, parce qu’il y a plein de choses à gérer. Les victoires de la musique pour moi c’est du folklore et ça l’a toujours été ; pour le coup cette année ça m’a fait marrer, le fait d’avoir un projet artisanal et de te retrouver nommé avec des artistes de major, c’est la seule satisfaction que j’en retire. On va pas faire de poncif David contre Goliath, mais il y a un peu de ça.
Après cette tournée, est-ce que tu as déjà un projet dans les cartons ?
Oui, celui-là j’espère qu’on va y arriver puisque j’en parle. Le prochain en date pour 2014 ce serait de mettre en place une série de dates avec orchestre symphonique. Donc ça j’y travaille. On est en train de voir comment on pourrait le faire. C’est un truc qui me tient vraiment à cœur, un projet qui a été super dur à convaincre de la faisabilité du projet. Maintenant que c’est fait et qu’il y a un intérêt dessus, les problématiques ne plus de l’ordre de voir si on va réussir, mais plutôt comment et dans quelles modalités.
Ton dernier coup de cœur musical ?
Woodkid. C’est banal mais c’est vrai ! Il y a deux ans comme tout le monde j’ai vu le clip Iron, j’ai pris une claque. Quand c’est arrivé c’était tellement un buzz que je me suis méfié, mais je suis obligé de dire que l’album est mortel. Et il y a aussi Atoms for peace.
