« Au début des comètes balbutiaient, ni poissons, ni rades, ni horloges, ni mesure ». Le chanteur anglais Robert Wyatt lit quelques mots, avec un accent vibrant. Les mots de Denis Péan, auteur de Lo’Jo. Un groupe qui vient d’avoir trente ans d’existence et revient avec Cinema El mundo, son 13e opus.

Il est enfin là, ce nouvel album. Après quatre ans de silence discographique, leur microcosme musical était attendu. Pour un nouveau voyage, une farandole poétique autour du monde. Cinema El Mundo, ou comment effacer les frontières avec des notes. Lo’Jo a toujours su habilement manier les influences, aussi géographiquement variées que les identités dont « La Marseille en créole » se moque éperdument. Alors il est tout naturel de croiser Ibrahim Al Agbib de Tinariwen, un n’goni en pointillés, des sonorités asiatiques, le coup d’archet du violoncelliste Vincent Segal. Et la voix d’un enfant pour l’introduction de « Deux bâtons ». La paix règne dans ce cinéma, où la pellicule ne fait défiler que des scènes oniriques. La poétique de la plume de Lo’Jo et la qualité des compositions nous amènent dans un univers où le réel n’existe plus vraiment ; l’indicible est roi, les instruments aussi. Ils jouent avec le vent, et s’envolent pour célébrer « 6 milliards de souffles ». D’Alger qui a des mosquées en guise de collier à Vientiane où « les autels de bouddhas sont roses ou dorés », la musique tutoie les « Zetwal » et croise une « Comète algébrique ». C’est ainsi que la fin retourne « Au début ».
Le sextet angevin doit quelque part avoir des formules chamaniques planquées sous un arbre magique pour réussir encore à nous surprendre. Par une simplicité mélodique qui dépasse la technique, par un art de l’écriture et celui de la distiller. Il y a du travail, qui puise son inspiration en partie grâce à la maison de la Fontaine du Mont, lieu dédié à la création artistique. Et force est de constater que trente ans après, les racines de leur poésie y sont demeurées intactes.